{"id":7208,"date":"2018-04-01T11:46:04","date_gmt":"2018-04-01T10:46:04","guid":{"rendered":"https:\/\/paroissereformeevaldetravers.wordpress.com\/?p=7208"},"modified":"2018-04-01T11:46:04","modified_gmt":"2018-04-01T10:46:04","slug":"passer-la-porte","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/www.eren.ch\/vdt\/passer-la-porte\/","title":{"rendered":"Passer la porte"},"content":{"rendered":"
<\/a> Lecture biblique : Jn 20,1-10<\/a><\/p>\n T\u00e9l\u00e9charger la pr\u00e9dication au format pdf<\/a><\/p>\n C\u2019est l\u2019histoire d\u2019un homme qui va chez son m\u00e9decin. Il arrive avec la t\u00eate de quelqu\u2019un qui n\u2019a pas bien dormi depuis longtemps\u00a0: le visage d\u00e9fait, le teint gris, les yeux rouges et cern\u00e9s…<\/p>\n – Docteur, dit-il, il faut que vous m\u2019aidiez. Je ne trouve plus le sommeil\u00a0!<\/p>\n – Vous avez des soucis\u00a0? lui demande le m\u00e9decin.<\/p>\n – Non non, tout va bien, r\u00e9pond l\u2019homme. C\u2019est juste que d\u00e8s que je ferme les yeux, je fais toujours le m\u00eame r\u00eave. Je suis devant une porte ferm\u00e9e, et je sais que derri\u00e8re cette porte, il y a quelque chose d\u2019extraordinaire qui m\u2019attend. Alors je mets la main sur la poign\u00e9e et je pousse doucement. Rien ne se passe. Je pousse plus fort\u00a0: toujours rien. Je pousse encore plus fort\u00a0: la porte ne bouge pas d\u2019un pouce. Alors je me mets \u00e0 lui donner des coups d\u2019\u00e9paule, des coups de genou, et je hurle et je tambourine \u00e0 la porte \u00e0 m\u2019en \u00e9corcher les mains. Rien. Et je me r\u00e9veille en sursaut, tremp\u00e9 de sueur.<\/p>\n Le m\u00e9decin est perplexe, mais il essaie tout de m\u00eame d\u2019aider\u00a0:<\/p>\n – Et cette porte, elle a quelque chose de particulier\u00a0? Je ne sais pas, une serrure ou une inscription peut-\u00eatre\u00a0?<\/p>\n Et l\u2019homme s\u2019\u00e9crie\u00a0:<\/p>\n – Ah mais oui\u00a0! Maintenant que vous le dites, je crois bien qu\u2019il y a marqu\u00e9\u00a0: \u00ab\u00a0Pour ouvrir, tirez\u00a0\u00bb\u00a0!<\/p>\n Le h\u00e9ros malheureux de cette histoire, \u00e7a aurait pu \u00eatre ce jeune homme \u2013 appelons-le Jean \u2013 qui est all\u00e9 un jour sur la tombe de son ami, un ami tr\u00e8s cher disparu trop t\u00f4t dans des circonstances affreuses. Il a \u00e9t\u00e9 averti par une connaissance commune que la tombe a \u00e9t\u00e9 vandalis\u00e9e\u00a0: plus de pierre, plus de corps\u00a0! Alors, avec Simon-Pierre (un autre gars de la bande, mais un peu plus vieux que lui) il court, il court, jusqu\u2019au tombeau, il voit la pierre roul\u00e9e, le linge pli\u00e9… et il s\u2019arr\u00eate l\u00e0. Il n\u2019y a rien qui l\u2019emp\u00eache d\u2019entrer. Mais dans sa t\u00eate, il y a encore une porte, et c\u2019est une porte blind\u00e9e, une porte de salle des coffres dans une banque genevoise, une porte infranchissable. Il s\u2019arr\u00eate l\u00e0, sur le seuil, son \u00e9lan coup\u00e9 net. Peut-\u00eatre qu\u2019il pressent que quelque chose d\u2019extraordinaire est l\u00e0 pour lui, \u00e0 l\u2019int\u00e9rieur. Mais il ne peut pas aller plus loin.<\/p>\n Et franchement, je ne peux pas lui jeter la pierre. Peut-\u00eatre que comme moi, en entendant l\u2019Evangile tout \u00e0 l\u2019heure, vous l\u2019avez int\u00e9rieurement encourag\u00e9, le petit Jean\u00a0: \u00ab\u00a0Vas-y\u00a0! Entre\u00a0! Il est ressuscit\u00e9\u00a0!\u00a0\u00bb<\/p>\n Oui, mais voil\u00e0\u00a0: ce que nous, nous savons depuis deux mille ans, lui, il le d\u00e9couvre \u00e0 peine. Il ne sait pas qu\u2019un jour il y aura un culte de l\u2019aube le dimanche de P\u00e2ques, il ne sait pas qu\u2019un d\u00e9nomm\u00e9 Haendel \u00e9crira un oratorio de la r\u00e9surrection, il ne sait pas qu\u2019il y aura une ic\u00f4ne traditionnelle qui le repr\u00e9sente, cet instant o\u00f9 le Christ a vaincu la mort\u00a0: rayonnant, triomphant, debout sur les battants de la porte du s\u00e9jour des morts dont les cl\u00e9s et les verrous sont \u00e9parpill\u00e9s \u00e0 terre, vaincus, inutiles. Il ne le sait pas encore, que cette porte est bris\u00e9e, d\u00e9fonc\u00e9e, pour toujours.<\/p>\n Au fond, quand je regarde ce petit jeune homme h\u00e9sitant que nous montre l\u2019Evangile, c\u2019est aussi un peu moi-m\u00eame que je vois. J\u00e9sus a vaincu la mort\u00a0: c\u2019est une affirmation tellement \u00e9norme qu\u2019elle d\u00e9passe l\u2019entendement. Je n\u2019arrive m\u00eame pas \u00e0 me repr\u00e9senter ce que c\u2019est, vaincre la mort. Et je me dis que peut-\u00eatre, il y a une porte plus infranchissable encore que celle de la mort\u00a0: celle de mon doute, celle de ma peur, celle de mon h\u00e9sitation \u00e0 croire.<\/p>\n Mais heureusement, il y a Simon-Pierre. Il n\u2019y va pas par quatre chemins, Simon-Pierre. Il en a vu d\u2019autres\u00a0: dans sa vie rude de p\u00eacheur, dans sa vie rude de disciple de J\u00e9sus. La mort\u00a0? il est d\u00e9j\u00e0 pass\u00e9 tout pr\u00e8s, plusieurs fois. J\u00e9sus, il l\u2019aime\u00a0; et ne pas oser le rejoindre l\u00e0 o\u00f9 il est, serait-ce dans le tombeau, il a d\u00e9j\u00e0 essay\u00e9, non pas une fois mais trois fois, lors de cette fameuse nuit de proc\u00e8s au palais, avant le cri du coq. Et cet abandon lui a fait tellement mal qu\u2019il en a pleur\u00e9 toutes les larmes de son corps. Il n\u2019est plus pr\u00eat \u00e0 payer ce prix-l\u00e0, m\u00eame en \u00e9change de sa vie. Alors, sans se poser de questions, il entre. Et il voit.<\/p>\n Que se passe-t-il \u00e0 cet instant dans la t\u00eate de Simon-Pierre\u00a0? Est-ce qu\u2019il se demande, comme Marie-Madeleine, o\u00f9 a bien pu passer le corps de son Seigneur\u00a0? Est-ce qu\u2019il voit et croit, est-ce qu\u2019il comprend qu\u2019il est inutile de chercher le Vivant parmi les morts\u00a0? L\u2019Evangile ne nous en dit rien. Et au fond, ce n\u2019est pas grave, car ce n\u2019est pas ce qui compte. Ce qui compte, c\u2019est le geste tr\u00e8s simple qu\u2019il a accompli\u00a0: celui de faire un pas, de franchir le seuil, parce que celui qu\u2019il aime l\u2019a franchi avant lui. Le geste de passer la porte, parce que quoi qu\u2019il y ait dans ce tombeau, la mort ou la vie, J\u00e9sus a pass\u00e9 cette porte en premier.<\/p>\n Par ce geste qui peut nous sembler si banal, si anodin, Simon-Pierre fait plus que d\u2019entrer dans le tombeau vide. Il montre \u00e0 son jeune ami, \u00e0 celui que J\u00e9sus aimait mais qui n\u2019ose pas franchir le pas, que c\u2019est possible, que la seule barri\u00e8re qui reste n\u2019existe qu\u2019en lui-m\u00eame. Ce petit pas est un grand t\u00e9moignage. Et parce que Simon-Pierre est l\u00e0, parce que Simon-Pierre ose regarder en face le vide, le linge pli\u00e9, l\u2019absence incompr\u00e9hensible, Jean ose faire la m\u00eame chose\u00a0: il regarde, et il croit.<\/p>\n Si aujourd\u2019hui nous proclamons, encore une fois, que Christ est ressuscit\u00e9 des morts, c\u2019est gr\u00e2ce \u00e0 ce petit pas. Si nous nous sommes tous lev\u00e9s aux aurores ce matin pour nous rassembler ici dans cette \u00e9glise, c\u2019est gr\u00e2ce \u00e0 ce petit pas. Et au fond, \u00eatre une communaut\u00e9, c\u2019est sans doute tout simplement cela\u00a0: quand je peux, faire un pas, pour t\u00e9moigner \u00e0 mes fr\u00e8res et s\u0153urs que c\u2019est possible\u00a0; t\u00e9moigner que la route est ouverte, que je peux y passer parce qu\u2019avant moi Simon-Pierre y est pass\u00e9, parce qu\u2019avant lui le Christ y est pass\u00e9. C\u2019est t\u00e9moigner que la victoire du Christ sur la mort de ma chair est aussi la victoire sur la mort de mon esp\u00e9rance. Car oui, c\u2019est bien vrai\u00a0: aujourd\u2019hui, Christ a ouvert devant nous une porte que nul ne pourra refermer.<\/p>\n Amen.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":" Lecture biblique : Jn 20,1-10 T\u00e9l\u00e9charger la pr\u00e9dication au format pdf C\u2019est l\u2019histoire d\u2019un homme qui va chez son m\u00e9decin. Il arrive avec la t\u00eate de quelqu\u2019un qui n\u2019a pas bien dormi depuis longtemps\u00a0: le visage d\u00e9fait, le teint gris, les yeux rouges et cern\u00e9s… – Docteur, dit-il, il faut que vous m\u2019aidiez. 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