Prédication prononcée le 22 mars à Môtiers et le 23 mars aux Verrières
Texte : Jean 4, 1-42 (extraits)
Une rencontre peut changer une vie.
L’évangile de Jean nous raconte longuement la rencontre de Jésus avec une femme samaritaine. A travers ce récit dont nous avons entendu des extraits, l’évangile de Jean met en évidence plusieurs choses.
D’abord, il souligne que Jésus est le don que Dieu fait au monde. Avec lui est offerte une nouvelle vie, une source inépuisable d’eau vive que chacun peut recevoir comme un nouveau regard sur l’existence. Croire en Jésus, c’est entrer dans cette dynamique de vie.
L’évangile de Jean souligne aussi que ce don de Dieu s‘adresse à chacun et chacune, même aux Samaritains que les Juifs détestaient et même à une femme à l’histoire de vie si compliquée qu’elle vient puiser de l’eau en plein midi, sans doute pour ne rencontrer personne.
Une rencontre peut changer une vie. La rencontre avec Jésus est de ces rencontres-là qui peuvent donner une nouvelle orientation, un nouveau regard, une nouvelle dynamique à l’existence.
Mais la plupart du temps, cela ne se fait pas d’un coup. Dans ce dialogue entre la femme et Jésus et à travers le récit qui l’entoure, l’évangile de Jean nous montre tout un cheminement qui conduit à la confession de foi de plusieurs Samaritains : « nous savons qu’il est vraiment le Sauveur du monde ».
J’aimerais méditer sur ce cheminement du texte qui, j’en suis convaincu, rejoint beaucoup de nos cheminements spirituels.
Commençons par la fin du récit : Après avoir rencontré Jésus, les Samaritains disent à la femme : « Maintenant, nous ne croyons plus seulement à cause de ce que tu as raconté, mais parce que nous l’avons entendu nous-mêmes, et nous savons qu’il est vraiment le Sauveur du monde. »
Pour moi, comme beaucoup, mon cheminement de foi a commencé par ce que les autres disaient. Parce que je sentais que quelque chose les faisait vivre et portait leur existence. Très souvent, nous accédons à la foi par le témoignage des autres et en partageant avec eux.
Pourtant, parler de sa foi, dialoguer autour de ses convictions, ce n’est pas quelque chose de facile. Le dialogue entre la femme et Jésus le montre bien. Il est truffé de malentendus. On dirait même presque que Jésus et la femme ne parlent pas la même langue.
Dans l’évangile de Jean, le malentendu est un moyen de mettre en évidence la nouveauté apportée par Jésus. Je crois que ce malentendu rejoint aussi ces moments de dialogue où nous peinons à nous comprendre.
Ces dernières semaines, nous avons des séances de catéchisme autour de la prière. En relisant ce texte, j’ai eu l’impression d’avoir vécu le même type de malentendu qu’entre la femme et Jésus. Comment parler de la prière ? Comment transmettre quelque chose de la foi ?
Certains parmi les jeunes ont déjà vécu des expériences de prière ; ils ont déjà un cheminement de foi qu’ils ont vécu dès l’enfance. Pour d’autres, c’est une question qu’ils se posent pour la 1ère fois. Prier, ça n’a simplement aucun sens pour eux. Alors, nos représentations ne sont pas les mêmes.
Peut-être déjà fait cette expérience en parlant de question de foi et de sens de la vie avec des proches : il est parfois difficile de se comprendre.
Je crois que l’évangile de Jean nous encourage à oser le partage autour de la foi. Le dialogue est le début d’un chemin ensemble devant Dieu. Et le malentendu, la difficulté à se comprendre fait partie du chemin de la foi.
Il y a quelque chose d’intrigant et même de choquant dans l’affirmation centrale de la foi chrétienne : Jésus crucifié et ressuscité est le sauveur du monde. Cela nécessite un chemin pour le rencontrer. Pour parcourir ce chemin, la rencontre, le partage et le dialogue sont nécessaires.
L’évangile de Jean nous montre aussi que la femme est touchée d’être accueillie comme elle est sans être jugée. Elle ose ainsi être vraie et entrer dans le partage avec Jésus.
Etre accueilli comme j’étais, sans jugement, a aussi été important dans mon cheminement de foi. Je crois profondément que c’est un des premiers témoignages que l’Eglise peut donner dans ce monde.
Reconnaître aussi que nous avons besoin les uns des autres, comme Jésus commence le récit en demandant à boire à la femme. Se savoir utile, attendu donne aussi du sens à l’existence.
Dans ce temps du Carême, nous sommes invités par ce récit à faire encore et toujours ce cheminement de la foi, à le faire pour nous-mêmes et aussi avec les autres au-delà des malentendus, même avec ceux que nous ne comprenons pas. Et cela même quand comme Jésus, nous sommes fatigués du voyage et arrêtés au bord de la route.
Une rencontre peut changer une vie. De nos rencontres peut naître la rencontre avec le Christ pour nous et pour les autres. Jésus nous fait cette promesse : « celui qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif : l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’où jaillira la vie éternelle ».
Amen.