Prédication du 2 août 2015 à Couvet
Textes :
- Exode 16, 2-4 + 12-15
- Jean 6, 24-35
- Ephésiens 4, 17 + 20-24
« Il s’agit de vous défaire de votre conduite d’autrefois, c’est-à-dire de l’homme ancien corrompu par les convoitises qui l’entraînent dans l’erreur. Laissez-vous renouveler par la transformation spirituelle de votre pensée. Revêtez-vous de l’homme nouveau, créé, selon Dieu, dans la justice et la sainteté conformes à la vérité. »
Tout comme les récits de l’Exode et du livre de Jean, ces paroles de la lettre aux Ephésiens nous posent la question de l’identité chrétienne. Qu’est-ce qu’être chrétien et le devenir ?
Les questions d’identité ne sont jamais simples que ce soit au niveau personnel et aussi collectif.
Ces questions d’identité sont aussi au cœur de la célébration de la fête nationale suisse avec un débat autour de ce qu’est la Suisse. Le télétexte titrait ainsi pour résumer le discours de la présidente de la Confédération : « plaidoyer pour une Suisse ouverte. » La question de l’identité suisse dans le monde suscite du débat.
Laissons-là cette question pour nous mettre à l’écoute des textes d’aujourd’hui. Ils nous posent la question de l’identité croyante et là aussi, ces questions ne sont pas faciles, car dans nos 3 textes, il y a un conflit autour de cette question:
Les Israélites se sont lancés à la suite de Moïse dans l’aventure de la sortie d’Egypte qui va les constituer comme peuple. Mais voilà que les difficultés les font regretter leur situation d’abri en Égypte où ils étaient esclaves. La précarité et la faim rendent cette question plus aiguë. L’événement de la manne et des cailles va manifester que Dieu écoute son peuple et en prend soin. Le Seigneur donne du pain à son peuple.
Jésus dans l’évangile de Jean vient de rassasier les foules et il engage le lendemain un dialogue autour de sa personne et des signes permettent de croire en lui. Ses interlocuteurs laissent entendre : « Jésus ne pourrait-il faire un signe aussi clair que celui de la manne? »
Jésus les invite à aller plus loin : le signe fondamental, c’est sa personne qui vient dans le monde.
Dans les 2 récits, comme dans la lettre aux Ephesiens, l’identité croyante est présentée comme une identité en mouvement. C’est en sortant d’Egypte que les Israélites deviennent un peuple. C’est ainsi qu’ils font l’expérience de la manne. Pourtant, au temps de Jésus, cet événement de la manne, signe de la puissance de Dieu, est devenu un souvenir figé : les interlocuteurs de Jésus ne voient pas que Dieu agit autrement. Ils attendent une nouvelle manne alors que Dieu a fait le pari de les rejoindre dans cet homme, Jésus, qui est juste en face d’eux.
L’identité chrétienne est donnée quand on croit au Christ qui rassasie notre désir de Dieu. Pourtant, comme le dit la lettre aux Ephésiens, elle est toujours à revêtir. Vous êtes des hommes nouveaux et des femmes nouvelles en Jésus-Christ, alors revêtez cette identité, devenez ce que vous êtes ! Vivez pleinement de la confiance en Dieu et que vos vies soient cohérentes avec vos convictions.
Il est sans doute humain de vouloir s’installer dans une identité, de célébrer le passé. Et c’est une bonne chose, mais si la Bible nous raconte l’histoire des Israélites dans le désert et des interlocuteurs de Jésus, c’est pour nous rappeler que notre identité nous est donnée par Dieu quand nous lui faisons confiance pour le présent et l’avenir.
Quand l’identité croyante devient seulement tournée vers le passé, elle peut justement se couper de son origine : la confiance en un Dieu qui nous conduit. La mémoire du passé doit servir à redire ce mouvement de confiance qui est à refaire chaque jour :
Jésus leur répondit : « Moi, je suis le pain de la vie. Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura jamais soif. »
Si Paul interpelle les Ephesiens, c’est que ce mouvement est à refaire pour vivre toute sa vie dans la confiance en Dieu et agir en conséquence. Vous connaissez la phrase : « on ne naît pas chrétien, on le devient ». J’aurais même envie de dire on le devient sans cesse parce qu’on reçoit son identité de Dieu quand on lui fait confiance.
Revêtez-vous de l’homme nouveau, créé, selon Dieu, dans la justice et la sainteté conformes à la vérité.
Je crois que notre pays a besoin de chrétiens qui vivent la cohérence de leur foi et refont sans cesse ce mouvement de la confiance en Dieu, cela pour envisager l’avenir. Cela nécessite de prendre de la hauteur, d’approfondir sans cesse sa relation au Christ comme nous y invite l’évangéliste Jean qu’on compare souvent à un aigle, aigle que vous pouvez voir sur le grand vitrail central au nord de l’Eglise.
L’art, la beauté, les rencontres avec des gens différents peuvent nous aider à refaire ce mouvement de la foi. Puissions-nous y méditer en regardant les beautés de ce temple : parce que d’autres nous ont précédés, nous pouvons nous aussi refaire ce mouvement de la foi dans nos vies : célébrer le passé pour aborder confiants notre présent et y reconnaître Dieu à l’œuvre aujourd’hui en nous et à travers nous!
Amen