Siméon le juste, Anne la fidèle

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Prédication de David Allisson – dimanche 28 décembre 2014, temple de Saint-Sulpice – cliquer ici pour télécharger le texte en format pdf

Lecture de la Bible

Esaïe 62,11-12

Luc 2,22-40

Prédication

Il nous arrive de regretter que l’Eglise en général et nos cultes en particulier soient fréquentés surtout par des personnes âgées. On se demande alors où sont les jeunes. Et cela nous rend inquiets pour l’avenir de l’Eglise et son renouvellement.

Mais si les vieux qui portent la vie de l’Eglise aujourd’hui sont de la trempe de Siméon et Anne, l’avenir de l’Eglise est décidément ouvert !

L’Evangile de ce jour est porté par la joie d’un vieil homme et d’une vieille femme. Ce sont le vieux Siméon et la vieille Anne qui savent reconnaître la promesse de vie que manifeste la naissance de Jésus.

« Maintenant, Seigneur, tu as réalisé ta promesse : tu peux laisser ton serviteur mourir en paix. » Lc 2,29

Il est magnifique, le vieux Siméon.

Il est comme une sentinelle qui a vu ce qu’elle attendait.

Il est comme le veilleur qui a vu s’accomplir ce qu’il espérait.

Nous avons besoin de ces attitudes de vieux sages.

Nous avons besoin de ces paroles d’accomplissement et de sérénité.

Le vieux Siméon s’exprime comme si toutes ses attentes étaient remplies. Voir le petit enfant lui ouvre l’éternité. Il est prêt à mourir en paix.

Siméon attendait le Messie promis, celui qui devait sauver Israël.

Et la vue d’un bébé l’apaise et le comble.

Fêter Noël, c’est une évidence dans notre culture. Les uns et les autres mettent même des attentes gigantesques sur Noël. Autant la foi et la religion chrétiennes semblent perdre du terrain chez nous, autant on multiplie ce qu’on espère partager à Noël. Nous attendons la paix dans le monde.

Nous attendons la paix dans nos familles et des relations sereines.

Nous attendons de trouver un sens plus profond à notre vie.

Nous attendons que chacun soit heureux.

C’est intéressant de comparer l’attitude de Siméon aux attentes de paix, de sérénité familiale, de plénitude partagée et de satisfaction de chacun que nous et nos proches mettons sur Noël.

Nous voyons les uns et les autres chercher à combler ces attentes par de chères dépenses pour des cadeaux. Nous cherchons à combler ces attentes dans des menus sophistiqués.

Nous cherchons à combler ces attentes par le nombre de lumières et de décorations chez nous et à l’extérieur.

Et Siméon reconnaît le salut du Seigneur dans la personne de ce nouveau-né.

Dans la fragilité et l’inexpérience de Jésus nouveau-né, nous sommes invités à reconnaître la vitalité d’un monde qui prend naissance : la création du ciel et de la terre.

Anne poursuit la mise en valeur de la vieillesse en reconnaissant elle aussi en Jésus la lumière du monde. Dans les représentations des icônes orthodoxes où elle apparaît, elle se tient à côté de Joseph et porte une tablette avec l’inscription Ce nouveau-né a créé le ciel et la terre.

Elle est étonnante, la vieille Anne. L’évangile de Luc donne sa carte d’identité complète : fonction, origines, parcours de vie et âge exact. C’est pourtant de Siméon qu’on se souvient, parce que l’évangile relève des éléments de son intérieur en citant ses paroles de bénédiction et de prophétie.

Mais Anne, à elle seule, est une figure de la grâce de Dieu. Elle représente l’attente de tout un peuple. Elle séjourne au temple dans la piété et la prière. Elle se met à parler de l’enfant à ceux qui attendaient la libération. On ne connaît pas le détail de ses paroles, mais par elle, femme prophétesse, on voit déjà que les femmes vont jouer un rôle important. Cela se répétera dans la suite du récit de l’Evangile et aussi dans l’histoire de l’Eglise et même ce matin, où les femmes sont en majorité.

Ce seront des femmes qui accompagneront Jésus le plus fidèlement, jusqu’à être les seules à témoigner de sa résurrection, dans un premier temps.

La vieille Anne est attentive à la promesse de la grâce de Dieu depuis 84 ans nous dit le texte.

Cette veille attentive lui permet de reconnaître en Jésus bébé le Seigneur créateur du monde et lumière pour les peuples.

Et comme les femmes témoins de la résurrection de Jésus, Anne dit ce qu’elle a vu : elle parla de l’enfant à tous ceux qui attendaient que Dieu délivre Jérusalem. Luc 2,38

Un auteur nommé Jacques Leclerq a écrit un livre qui porte le titre joie de vieillir. Il y commente ce passage d’Evangile que nous méditons ce matin : « Nous devons opérer un retournement. Il ne s’agit pas de consoler les vieillards, mais de leur faire prendre conscience de la joie qu’il peut y avoir à être vieux, d’abord parce que la vieillesse suppose tout ce qui précède et que le vieillard est seul à avoir une vie complète ; ensuite, et avant tout, parce que la vieillesse débouche sur l’éternel.

Nous vivons ici-bas dans une sorte de brouillard, avançant à tâtons, faisant ce que nous pouvons… L’homme doit faire sur terre ce qu’il peut, en s’inspirant de ce qu’il sait – qui n’est pas grand-chose. Ensuite il se présente devant Dieu qui l’accueille dans l’infini de son amour. Alors nous comprendrons : ce sera le moment de la lumière. Le vieillard est au moment où, la vie terminée, il n’a plus qu’à attendre que la lumière brille. » [J. Leclerq, « Joie de vieillir », Paris, Ed. Universitaires, 1987]

Siméon et Anne : deux vieux qui reconnaissent la lumière de Dieu dans le monde.

Siméon et Anne : deux veilleurs dont l’attention leur permet de reconnaître que les promesses du Seigneur sont en train de s’accomplir.

Siméon : un vieillard qui prononce des paroles de bénédiction et de prophétie qui animent les liturgies et les célébrations depuis la rédaction de l’Evangile et probablement même déjà avant.

Anne : une vieille femme dont Luc relève qu’elle est prophétesse sans transmettre le contenu de ses paroles. Elle nous invite à accueillir les promesses d’accomplissement et à devenir nous-mêmes veilleurs et porte-paroles. Notre défi : à l’image de ces veilleurs expérimentés, trouver les paroles qui expriment pour nos voisins, pour nos concitoyens et pour nous-mêmes la venue de la lumière de Dieu dans notre monde sombre et fragile.

La Fédération des Eglises Protestantes de Suisse propose un petit bloc qui porte le titre « 40 thèmes pour cheminer ». Ces 40 thèmes veulent nous stimuler, quelque soit notre âge, à devenir la vieille Anne et le vieux Siméon qui expriment leur foi et la réalisation des promesses du Seigneur. A notre tour, nous sommes invités à dire ce qui nous nourrit dans la foi chrétienne au point de dire comme Siméon que nous pouvons maintenant mourir en paix.

J’ai avec moi quelques exemplaires de ce petit bloc et ses 40 thèmes pour cheminer.

Servez-vous, cheminez et appelez moi ou appelez vos voisins et connaissances pour cheminer avec eux dans la méditation de ces thèmes et des textes bibliques. Et transmettez vos réflexions et éventuellement vos thèses pour l’Evangile aujourd’hui.

En ce dernier dimanche de 2014, nous recevons de la matière à vivre et à espérer pour 2015.

L’enfant grandissait et se fortifiait. Il était rempli de sagesse et la faveur de Dieu reposait sur lui. [Luc 2,40]

Que notre foi grandisse et se fortifie à l’image de Jésus, Dieu sur terre.

Amen.