
Culte du dimanche 21 juin 2020 à Fleurier
Célébrants: Claire-Lise Vouga, Florian Stirnemann. David Allisson, pasteur.
Musiciennes: Fabienne Pantillon, orgue. Lisette Paillard, flûte.
Télécharger les textes du cultes en fichier pdf grâce à ce lien.
Merci à l’EPER pour la mise à disposition de ce culte clé en main. Texte complet à consulter grâce à ce lien.
Accueil
Que le souffle du Christ nous rejoigne en ce dimanche des réfugiés : la paix soit avec vous.
Bienvenue en ce dimanche où nous sommes accueillis dans la présence de Dieu comme les réfugiés aimeraient être accueillis dans leur exil.
Soyons attentifs au souffle du Seigneur. Prions.
Invocation
Dieu notre Père,
Devant Toi nous venons ensemble,
A toi nous nous adressons,
Toi qui écoute les chants et les cris de tous tes enfants dispersés sur la terre.
Chants de louange ou cris de détresse,
Hymnes de joie ou lamentations de deuil,
Tu nous entends et tu descends pour nous conduire au chemin de la paix. Tu es béni, Seigneur. Viens!
Amen
Psaume 31 (30) (extraits)
Prière de repentance
Seigneur,
Toi qui connais le cœur de chacune et chacun et l’état de notre monde nous crions à toi !
Plus nous sommes dans l’angoisse et l’incertitude, plus nous nous sentons fragiles, plus nous avons besoin de Toi pour garder confiance.
Plus nous savons l’être humain bafoué, méprisé, malmené, plus nous avons besoin de toi pour que notre foi ne soit pas bouleversée.
Plus nous découvrons la violence des hommes, plus nous découvrons la bêtise des violents et la brute qui veille dans le puissant, plus nous avons besoin de Toi pour croire encore que tu as des projets de vie et de bonheur pour notre humanité.
Plus nous avons conscience de l’ampleur de la tâche et du peu que nous pouvons, plus nous savons qu’il faudra toujours recommencer, plus nous avons besoin de Toi.
Seigneur,
Toi qui as connu la détresse de ton peuple, Toi qui sais les épines, les clous, les coups et le mépris, et la douleur de l’amour refusé, viens à notre secours pour garder foi et espoir.
Amen
Paroles de grâce
« Moi, je sais les projets que j’ai formés pour vous – Parole du Seigneur. Projets de vie, et non de malheur. Je veux vous donner un avenir, un espérance ! »
Recevons de notre Dieu le pardon, le courage et l’espérance ! Amen
Lecture de la Bible
Luc 10,25-37
Exode 2,23-3,10
Exode 4,10-17
Méditation
Il ne suffit pas de voir. Encore faut-il se rendre compte, pour réagir à la détresse d’un autre et se mettre en mouvement.
Dieu lui-même s’est rendu compte. Vous rendez-vous compte ? Dieu lui-même !
Dieu se rendit compte…
Nous avons toutes et tous vu des images de réfugiés. De bateaux en détresse. De camps bondés. De longues colonnes de marcheurs face aux barbelés. Que faire ?
Voir et faire. Entendre et agir. Les deux textes que nous avons entendus décrivent ce mouvement qui permet de sauver des vies.
Mais avant de réfléchir au « que faire », arrêtons-nous un instant sur : « se rendre compte ».
Avant le Samaritain qui semble s’être rendu compte de la situation du blessé, le prêtre et le lévite n’ont pas pu. Ils sont passé à bonne distance, comme s’ils ne se rendaient pas compte.
Nous avons toutes et tous vu des images de réfugiés. Parmi d’autres images de personnes en détresse et en souffrance. Les appels ne manquent pas.
Que faut-il pour que nous nous rendions compte, nous aussi ?
Que faut-il pour que nous percevions, derrière chaque image, chaque nouvelle, un visage de femme, d’homme, d’enfant qui appelle à l’aide, qui cherche à sauver sa vie ? Ceci peut-être justement. Une certaine contemplation. Un certain questionnement.
Qui sont-ils ? Comment se retrouvent-ils dans cette situation ?
On me parle d’un garagiste syrien qui a vu son affaire engloutie, ses biens pillés dans la guerre, avant de se sentir lui-même en danger d’être enrôlé de force dans l’armée. Alors il a fui. […]
J’ai reçu le récit d’une mère de famille qui entendait siffler les bombes au-dessus de sa maison. A chaque fois elle priait, en se disant : « ce sera peut-être mon tour ? Ah non, je suis encore en vie… » Et elle a fini par prendre la route, pour fuir cette angoisse. […]
Et ce jeune homme afghan. Dès son enfance il a été emmené par ses parents en exil dans deux pays du Moyen-Orient, à la recherche d’une
vie en sécurité physique et économique. Difficile à trouver. Devenu jeune homme, confronté à une absence totale de perspectives, il prend la route de l’Europe. Il lui aura fallu plus de 7 ans entre le moment où il débarque en Italie et celui où il reçoit une autorisation de séjour en Suisse. Il est arrivé à 23 ans, il en a 30 aujourd’hui. Il voulait venir en Suisse parce que son frère y vit. Mais les accords de Dublin avaient décidé, comme ça – sans le connaître, sans reconnaître l’importance du lien familial – qu’il devrait faire sa vie en Italie. Il y a été renvoyé, deux fois, a dû survivre dans la rue, connaître la faim et l’insécurité. Il n’a pas tenu le coup. Il a sombré dans une profonde déprime. Il se sent comme un homme fini à qui on a volé les meilleures années de sa jeunesse. Il voulait travailler, construire sa vie et sa famille. Il n’a pu que se battre contre les moulins à vent de règlements administratifs… des règlements qui ne se rendent plus compte. Qui perdent de vue, trop souvent, le visage humain, les liens familiaux, la détresse et les besoins vitaux de celles et ceux dont ils ont pourtant pris la responsabilité. Et qui font des dégâts.
Voilà ce que provoque la guerre, la dictature, l’errance ou la pauvreté.
Des vies comme toute vie, comme la mienne, comme la vôtre, se trouvent soudain chamboulées.
Tout doit changer et il faut partir, errer, chercher, recommencer, pour sauver au moins son existence.
Nous avons un repère pour nous rendre compte. Le coronavirus a bousculé certains de nos repère du jour au lendemain. C’est peu de choses par rapport à la situation de beaucoup de réfugiés. Mais c’est une occasion de nous rendre compte.
Ce que nous avons vécu, toutes et tous à l’échelle du monde, peut enraciner plus profondément la conscience d’une solidarité les uns avec les autres, d’humains à humains, par-delà les frontières. Mais d’un autre côté, cette crise a recentré chaque pays sur lui-même, fermé les frontières et mobilisé tout l’espace médiatique, de pensée, de réflexion, toutes les forces de chaque peuple pour lui-même, et c’est bien normal. Pourtant le monde ne s’est pas arrêté de tourner. On a espéré au début que l’ampleur de la crise sanitaire permettrait une trêve dans les conflits… mais non. Et le monde en ressortira un peu plus pauvre qu’avant.
Ce ne sera donc pas si simple de rester enracinés dans ce dont nous avons pu nous rendre compte de manière inédite, comme fragilité, comme difficulté de vivre du jour au lendemain un basculement qui chamboule tout, et comme solidarité à l’échelle du monde. Pour que cette crise devienne le terreau d’une solidarité plus grande, plus simple, plus évidente, il faudra le choisir, il faudra s’y tenir et s’y engager. Nous avons toutes et tous exploré des choses nouvelles pendant ce temps différent, d’un commerce plus local à des solidarités nouvelles, des proximités autrement dans la distance. Des trésors précieux d’humanité ont émergé, qui nous permettent de la traverser.
Nous sommes les prochains les uns des autres et nous sommes les prochains de ces enfants, de ces femmes et de ces hommes qui ont besoin d’un refuge.
Nous voilà invités à nous en rendre compte.
Nous mettrons-nous en route?
Moïse, lui, préfèrerait malgré tout rester derrière son troupeau. Après une longue négociation avec Dieu, Moïse essaye encore un 4e, et un 5eargument – pour ne pas être celui qui est envoyé.
Livre de l’Exode, chapitre 4
Méditation (suite)
Pas moi, Seigneur, pas moi… je ne peux pas, je ne peux rien, c’est trop, c’est pas mon affaire ! J’ai peur.
Nous n’avons pas à nous en vouloir de ressentir un sentiment d’impuissance, de crainte en nous rendant compte des situations si douloureuses, compliquées, de certains réfugiés et migrants. Dans le texte on voit que Dieu prend le temps de discuter avec Moïse, de se révéler, d’essayer de le rassurer, de l’encourager, lui donner des assurances à présenter au peuple d’Israël comme au Pharaon.
On voit aussi que Dieu ne lâche pas le morceau : c’est sur toi que je compte. Vas-y. Maintenant !
Alors, à côté de notre sentiment de crainte, d’impuissance, d’être dépassés par ces réalités tragiques, nous pouvons essayer de tenir cet élan qui nous dit : « On ne peut pas laisser ça comme ça ! Il faut faire quelque chose ! ». Le même que celui de Dieu qui se rend compte… et passe à l’action.
Et nous pouvons beaucoup : engagements concrets, rencontres, participation à des prises de paroles et prises de position, soutien financier à des projets. Mais aussi simplement ne pas oublier, prier. Ne jamais oublier ce dont nous nous sommes rendus compte.
Ne faisons pas taire la voix qui nous a fait prendre conscience de la souffrance d’autrui. La compassion, se rendre compte et agir, est le cœur même et le moteur de notre foi chrétienne.
Cela ne résoudra pas notre sentiment d’impuissance. Il y a trop pour nous. Aucun de nous ne sauvera le monde et surtout pas à lui tout seul. Mais ensemble, par notre engagement, nous faisons vivre davantage de justice, de paix et d’amitié dans le monde. N’ayons pas peur et engageons-nous, que la solidarité grandisse dans notre monde. NOUS en avons besoin.
Mon modeste témoignage – Florian Stirnemann
Alors que j’avais encore une activité professionnelle j’ai eu l’occasion d’accueillir des réfugiés dans les ateliers de l’institution dont j’avais la responsabilité. Ces réfugiés à qui nous donnions du travail dans les jardins ou à la ferme m’ont toujours étonné. En effet ils avaient une soif de travail hors du commun.
A cette époque j’étais responsable d’atelier pour personnes ayant des problèmes d’addictions. Les réfugiés qui étaient au centre de Perreux se démarquaient par leur motivation au travail, ce qui me changeait beaucoup de mon quotidien ! Qu’ils soient Somaliens, Ethiopiens ou Tchétchènes, tous étaient heureux de pouvoir vivre une activité professionnelle.Ce qui m’étonnait toujours, c’est que le soir en nous quittant pour retourner au centre, ils venaient vers moi et me disaient MERCI !
Intervention de Claire-Lise Vouga
Depuis plusieurs années, je suis engagée au sein de Requ’eren ici au Val de Travers.
Tout d’abord nous avons accueilli les requérants du centre de Couvet pour un accueil café à la Cure de Couvet. Puis le centre a fermé et les personnes que nous avions l’habitude de rencontrer à la cure ont déménagé mais nous avons constaté que chacun d’entre nous avait gardé des liens privilégiés avec certains.
Changement de cap, maintenant, nous nous tournons plutôt vers le parrainage.
Depuis plusieurs années donc j’ai l’occasion de rencontrer des personnes qui ont quitté leur pays et qui se retrouvent chez nous souvent par le plus grand des hasards. Les voilà au Val-de-Travers dans le petit canton de Neuchâtel. Nous, nous vivons bien dans ce petit coin de pays et eux… ils survivent, avant de réapprendre à vivre.
Pendant ces trois derniers mois de confinement suite à la pandémie de covid 19 nous avons quelque peu perdu nos repères nous aussi. Nous avons perdu certaines certitudes. Nous avons eu peur. Nous ignorions de quoi demain serait fait. Ainsi nous nous sommes posés des questions qu’avant nous préférions ignorer.
Ces questions que les requérants se posent : et demain ? Comment se portent mes parents, mes enfants ? Oui on les a eu au téléphone, mais j’aimerais tellement les serrer dans mes bras ! C’est pas possible ici c’est tout juste si on veut de moi, alors mes enfants non ils ne sont pas les bienvenus. Les lois suisses je ne comprends pas. Berne a dit non !
Dans le cadre de la formation offerte par Requ’eren, l’hiver passé nous avons eu l’occasion de suivre un cours sur les traumatismes. Ce qui m’a frappé, dans de ce cours, c’est que lors des traumatismes importants, notre zone de confort se réduit considérablement. La personne qui subit un fort traumatisme est comme éclatée. Elle perd ses repères, ne trouve plus le chemin qui la ramène vers la vie.
Et moi, quand je côtoie un tel malheur, je me sens impuissante. Moi qui suis vivante. Où est-il ce fil qui peut nous unir pour reprendre contact avec la vie. Au secours Seigneur ! Aide-moi !
Dois-je parler, me taire, pleurer, donner la main…
Sans pouvoir m’appuyer sur Dieu je ne saurais que faire.
J’ai aussi besoin qu’Il change mon regard, pour recevoir le visage de l’autre, sa culture , ses habitudes, et alors, les différences m’enrichissent.
Nous n’avons pas besoin de se ressembler pour s’assembler.
Merci à vous les gens d’ailleurs pour tout ce que vous m’apportez. Merci pour vos différences, votre foi, vos rires au milieu de vos tempêtes. Merci pour vos cultures pleines de couleurs. Merci pour le piment que vous donnez à ma vie.
Intercession
Dieu notre Père,
Les cris du monde viennent à nos oreilles et nous les portons devant Toi !
Cris des exilés qui cherchent refuge, sur la route et dans des camps de longues années parfois avant de trouver une terre d’asile. Seigneur, rends-nous et rends nos politiques accueillants à ces cris, nous t’en prions
Cris de familles endeuillées, qui ont perdu l’un des leurs. Que ce soit dans la maladie, ou sur la route de l’exil, cette même douleur du manque de l’être aimé hurle… O Dieu, dessine pour chacune et chacun des chemins de réconfort
Cris de toutes celles et ceux qui se retrouvent dans le chômage, la précarité́ économique, la faim, suite à la crise sanitaire ou de longue date déjà… Seigneur, fais grandir en nous et en notre monde la flamme de la solidarité, avec courage et clairvoyance, nous t’en prions.
Amen
Annonces Voir. Se rendre compte. Se mettre en mouvement. Actions possibles en ce dimanche des réfugiés :
- Contribuer à l’offrande d’aujourd’hui, destinée au dimanche des réfugiés pour des actions en faveur des réfugiés
- Écrire des lettres au Conseil fédéral et au Parlement pour demander à la Suisse un engagement plus grand pour sauver davantage de vies en méditerranée. Cette action est décrite sur votre feuille de culte à emporter avec vous et par ce lien
- Lire des livres, par exemple un des « livres en liberté » que j’ai apporté avec moi aujourd’hui :
- Lettres de Syrie et d’exil – Bachar Alkazaz : De 2010 à 2017, Bachar, instituteur en Syrie, a écrit à Philippe, son ami suisse. Depuis Damas d’abord, alors que la guerre débute, on suit le quotidien de cette famille ballottée par des événements toujours plus terrifiants. Puis vient le temps de l’exil, en Jordanie d’abord, en Suède ensuite.
- L’apiculteur d’Alep – Christy Lefteri : L’autrice s’est inspirée pour son récit des témoignages qu’elle a entendu de réfugiés alors qu’elle était bénévole dans un camp à Athènes. L’histoire raconte le chemin de réfugiés entre les ruches dont le personnage s’occupait à Alep et celles de son cousin parti avant lui pour l’Angleterre.
- Le riz pousse au pied de Tourbillon : Tuyet Trinh Geiser a quitté au milieu des années 1970 le Vietnam où elle est née. La guerre et les conflits politiques l’ont obligées à chercher refuge alors qu’elle avait 16 ans. Elle est arrivée aux Cernets à l’époque et raconte son parcours avec beaucoup de recul et de reconnaissance pour son accueil au Val-de-Travers.
Envoi [Texte du romancier San Antonio]
Il n’y a qu’une « vertu » en ce monde: LA CHARITÉ
Et la charité, c’est quoi ? De la colère.
La charité consiste à s’indigner !
La charité, c’est pas de chialer sur la misère du monde : c’est de la combattre !
La charité n’est pas humble, mais elle est belliqueuse ! La charité c’est de l’amour.
En amour faut pas s’aplatir, c’est inopérant, et négatif. La carpette ? Jamais ! Dieu a en horreur les serpillères !
Bénédiction
Recevez la bénédiction du Seigneur, celle qui a été posée déjà par Aaron sur le peuple en marche (Nombres 6.24-26)
Que le Seigneur nous bénisse et nous garde !
Qu’il fasse briller sur nous son visage et nous fasse grâce !
Qu’il porte sur nous son regard et nous apporte la paix ! Amen