Message à partir de Jean 12, 1-8 et 2 Co. 2, 14-17
Essayez de faire l’exercice de vous rappeler une odeur agréable ou désagréable de votre enfance…
Les traces laissées par les parfums et les odeurs marquent notre existence.
Les senteurs s’associent à des souvenirs émotionnels et déclenchent en nous des pulsions d’attrait ou de répulsion.
Notre nez peut nous mettre spontanément en présence d’événements passés et nous replonger dans les joies ou les peurs d’autrefois.
Le parfum du nard dont il est question dans l’Évangile de Jean a probablement suscité des sentiments et des souvenirs divers parmi les premiers chrétiens. Mais pour moi, les senteurs qui traversent ce texte convergent dans l’image d’une fête : il y a le repas préparé, on a mis les petits plats dans les grands. Marthe a bien fait les choses pour réunir tous ces gens… l’odeur de l’agneau rôti flotte dans l’air, et on perçoit la senteur des herbes aromatiques comme le thym, le romarin, l’odeur de l’ail sauté dans l’huile d’olive. Les lentilles laissent filtrer leur fumet… l’ambiance est à la joie et à l’amitié. C’est comme cela que Marthe montre combien elle aime Jésus.
Marie manifeste son affection différemment. Elle cherche à être proche physiquement de Jésus. Mais avec tout ce monde autour de lui, seuls ses pieds restent accessibles. Alors c’est aux pieds de Jésus que Marie prodigue son amour débordant.
Elle répand une grande quantité d’utile parfumée, qu’elle a acquis à un prix exorbitant.
Elle masse les pieds de Jésus…Entre Jésus et Marie, ce massage devient une forme de communication. Elle sèche le parfum excédentaire avec ses cheveux… symboliquement, grâce au parfum, ils sont unis des pieds à la tête.
L’épisode est hautement érotique et probablement très choquant pour les hôtes.
Mais en même temps, la scène de Béthanie se déroule dans le contexte dramatique de la future mort de Jésus. Le parfum rappelle celui qui servira à embaumer le Crucifié.
Amour et mort s’enchevêtrent, douloureusement proches l’un de l’autre.
Mais le parfum du nard va au-delà de l’odeur de la mort. Il a des notes de résine, d’herbes sauvages, et de plantes aromatiques… une senteur qui conduit au souvenir de celui qui, ressuscité, apparaît à l’aube de Pâques.
Ce texte fait de senteurs répand un souffle de résurrection. Je ne parle pas seulement de la résurrection finale, promise à toutes et tous… mais de cette odeur de résurrection qui embaume le monde chaque fois que l’on célèbre la vie en aimant sans retenue, chaque fois que l’on respecte la vie, chaque fois que l’on cherche les traces de Dieu.
Autre exercice : quelle odeur perçoit-on dans une église protestante ?!
Le produit de nettoyage, la pierre froide, l’encaustique des bancs, les bougies, les fleurs ?! si il y a assez de monde, on peut sentir le parfum de notre voisine, l’après rasage du monsieur devant, le produit de lessive, le shampoing…
Mais peut être que je devrais dire que dans le fond, honnêtement, l’odeur qui ressort le plus de notre Église, c’est la neutralité des odeurs… on ne veut heurter personne, ne pas attirer l’attention.
Quelle odeur souhaitons-nous donner à notre communauté ?!
Comme Marie, l’odeur d’un amour débordant ?!
Ou comme le dit Paul, avons-nous l’ambition d’être un « un parfum agréable offert par le Christ à Dieu « ?!
Ou au contraire, prendrons-nous l’option de répandre l’odeur de la mort par nos relents toxiques de manque de tendress ?!
Choisirons-nous de sentir le renfermé par notre manque d’ouverture au monde ?!
Mais nous pouvons aussi décider de nous souvenir de Marie de Béthanie et de son geste d’Amour débordant.
Nous pouvons continuer de sentir ce parfum qui embaume notre mémoire….
Oui, que ce parfum d’Amour ressuscité se laisse sentir en nous-mêmes, afin que ma sœur, mon frère, la création soient remplis d’un parfum de joie et d’espérance. Amen.
Message inspiré par le document OECO (www.oeku.ch), Eglise et Environnement, dossier 2017, » Parfums célestes, odeurs terrestres ».