Prédication du culte de l’Ascension – 26 mai 2022, Les Bayards

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Lecture de la Bible

Actes des Apôtres 1,1-11
Luc 24,46-53

Le Royaume, quelle histoire ?!

prédication de David Allisson

L’Ascension est un moment clé de l’histoire de l’Église, même si à l’Ascension, on se préoccupe plus de s’assurer que l’on fera le pont pour un long week-end ou on s’inquiète de la longueur des bouchons sur la route du tunnel du Gothard.

L’Évangile de Luc relate la mission et la prédication de Jésus. Son auteur poursuit son récit avec celui des Actes des Apôtres qui évoque la mission et la prédication des chrétiens à la suite de Jésus.

La Bonne Nouvelle qu’annonce Jésus est la venue du Royaume de Dieu. Les premiers auditeurs du message voulaient entendre un message de libération et de vie pour eux et pour leur peuple.

Avant-hier soir, les membres du Conseil paroissial ont eu un partage sur le thème de l’éco-anxiété. De plus en plus de personnes aujourd’hui ont peur de vivre les derniers moments du monde et qu’il ne soit plus possible d’inverser le mouvement du changement climatique, et peut-être même de la situation sociale et économique. Pour les éco-anxieux, c’est une fin du monde proche qui se dessine, et on ne sait pas quoi faire ni comment se positionner par rapport à ça.

Il y a aujourd’hui une attente impossible d’un Royaume de Vie, comme les chrétiens attendaient le Royaume de Dieu au lendemain du ministère de Jésus dans l’humanité. C’est comme si le temps du monde qui se déroule de sa création jusqu’à sa fin, avait besoin d’un temps particulier de renouveau de la Vie et d’installation d’un Royaume des cieux pour délivrer et rétablir l’humanité.

Ce temps de renouveau est attendu encore aujourd’hui. Il n’est pas encore là. Et même, la situation empire, puisque les éco-anxieux ressentent que nous sommes à la fin de l’existence du monde et de l’humanité.

Ce que les chrétiens espèrent doit être réalisé et accueilli à la fin des temps. Selon le déroulement de l’histoire biblique, ce temps de vie marquera l’aboutissement de l’histoire.

D’une certaine manière, entre la proclamation de la résurrection et l’arrivée de ce temps où la vie sera partagée et vécue pour toutes et tous, il y a le temps que l’Ascension inaugure et qui est un temps de l’attente. C’est d’ailleurs dit explicitement dans le texte que nous avons lu : « Ne quittez pas Jérusalem, mais attendez ce que le père a promis. »

Pourtant, cette attente n’a pas besoin d’être passive. Les chrétiens sont impliqués dans le monde et pas juste en attente d’un autre monde. Une vie sociale continue de s’organiser et demande que nous y participions. Une vie économique suit son cours et par notre manière d’y prendre part nous pouvons l’orienter vers ce Royaume de Vie attendu. De même sur les plans politique et humanitaire, les besoins sont là et l’engagement est nécessaire. Nous ne pouvons pas imaginer être dispensés de cette vie concrète, humaine et terrestre par notre attente d’une Vie renouvelée et pleine de la présence de Dieu.

En fait, notre attitude et notre engagement dans notre vie actuelle est une manière de signifier que le Royaume de Dieu attendu, annoncé et promis, ce Royaume est déjà là. Je pourrais dire qu’il est en quelque sorte déjà présent. En fait, il est à la fois attendu et à la fois à vivre comme une réalité présente. C’est une invitation à ajuster nos attentes et nos priorités sur ce trésor dont Jésus parlait comme étant dans le ciel, qui ne moisit pas et que les bandits ne peuvent pas voler.

Cette dimension de vie victorieuse de la mort est promise et déjà présente par la résurrection du Christ crucifié que nous fêtons à Pâques et que nous rappelons chaque dimanche. Ce n’est pas seulement un souvenir positif, c’est une vie qui est appelée à couler dans notre être comme le sang dans nos veines pour renouveler chaque jour et chaque instant de nos vies, pour y être plus proche de la présence et du Royaume de Dieu.

C’est une vie concrète et terre à terre parce qu’elle nous emmène les uns vers les autres. C’est une vie concrète et terre à terre qui emmène les uns et les autres à la vie renouvelée en Dieu et en Christ ressuscité.

Cette vie qui coule en nous, c’est une disponibilité à nous-mêmes, aux autres, à la nature et à Dieu. Ces dimensions trouvent leur place les unes par rapport aux autres et ouvrent nos êtres et nos possibilités à l’Esprit Saint qui fait déjà vivre et sentir cette Vie et ce Royaume de Dieu.

L’histoire du monde dans laquelle nos vies se déroulent nous fait sentir parfois de manière pesante que le Royaume n’est pas encore là. Pourtant, il y a des ouvertures, des moments particuliers dans le déroulement de cette histoire qui sont ce que la langue grecque appellent kairos. Ce sont des temps, des moments favorables dans lesquels cette Vie de Dieu nous rejoint et s’exprime.

Ces temps-là sont comme des ouvertures, des éclats de Royaume, des signes que la réalité de Dieu rejoint la réalité humaine et vient répondre à notre attente et combler notre besoin de présence et de Vie.

Le Royaume de Dieu vient faire irruption dans l’Histoire et tout en étant une réalité vécue, il est en même temps signe d’un changement à venir et un accomplissement de l’Histoire. Il s’agit donc pour le croyant d’être dans cette tension qui l’invite à agir dans le monde d’aujourd’hui pour faire advenir le Royaume tout en pouvant d’ores et déjà vivre le Royaume comme une réalité présente, dans le moindre évènement de l’existence, dans la rencontre, le partage, l’admiration, la prière, l’échange, etc.

Vivre le Royaume permet aussi de le préparer.

C’est pour cela que l’Ascension n’est pas une histoire où Jésus abandonne les chrétiens ou l’humanité à sa situation terrestre.

L’Ascension est la reconnaissance et l’acceptation qu’il y a une vie à vivre dans ce monde. Et aussi, l’humanité attend et prépare le Royaume de Dieu annoncé et déjà présent. C’est là que nous vivons. C’est là que Dieu vient nous rencontrer.

Pourquoi restons-nous à regarder le ciel et à rêver de Royaume ? Le ciel est présent dans nos existences et il signale déjà maintenant le Royaume que nous attendons encore.

Amen