Planter un pommier la veille de la fin du monde – Prédication des 17-18 novembre 2018

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17 novembre 2018, Môtiers 17h, baptême de Maliya De Marzo
18 novembre 2018, Noiraigue 10h, baptême de Mila Dubois

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Prédication de Patrick Schlüter

Textes bibliques :
Hébreux 10, 11-14.18
Marc 13, 24-32

Prédication sur « Planter un pommier la veille de la fin du monde »

« En ces jours-là, après une grande détresse, le soleil s’obscurcira et la lune ne donnera plus sa clarté ; les étoiles tomberont du ciel, et les puissances célestes seront ébranlées. »

En lisant ces mots de Jésus annonçant la fin des temps avec des images marquantes, je n’ai pu m’empêcher d’avoir l’impression d’entendre une sorte de journal télévisé imagé. Nous aussi, nous entendons parler de grandes détresses, de catastrophes naturelles, de guerres, de changement climatique. Nous oreilles se sont même habituées à cela, si bien qu’il peut m’arriver de ne pas avoir envie d’entendre ou de prendre cela comme un refrain habituel.

Les mots de Jésus, comme le refrain des actualités que nous entendons posent la question de l’avenir : comment le voyons-nous ? Dans quel monde nos enfants vont-ils grandir ?

La question du regard sur l’avenir pose finalement la question de comment nous vivons dans le présent et des choix que nous y faisons. Parfois, nous nous demandons : « A quoi bon ? » A quoi bon, poser tel choix de vie ? A quoi bon s’engager si l’avenir est sombre ? La question se pose aussi face au baptême : A quoi bon baptiser un enfant dans notre monde d’aujourd’hui ?

Jésus interroge notre regard avec cette image du figuier. Nous savons reconnaître les saisons et nous préparer à récolter les fruits du figuier. Est-ce que nous savons reconnaitre les signes des temps, reconnaître sa présence quand il vient à notre rencontre ? Est-ce que nous savons poser un juste regard sur le monde, sur le présent, sur l’avenir, sur nos vies ?

Il n’est pas facile de discerner les signes des temps. « Personne ne connait le jour et l’heure si ce n’est le Père » nous dit Jésus. D’ailleurs, Jésus lui-même ne s’est-il pas trompé quand il dit que « cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive » ?

La lettre aux Hébreux pose un regard sur cette question. Le monde a changé avec la mort et la résurrection de Jésus. La bascule de l’histoire a déjà eu lieu. La lettre compare 2 modes de relation à Dieu en imaginant 2 grands-prêtres, celui de l’ancienne alliance entre Dieu et les hommes et celui de la nouvelle alliance Jésus.

J’ai aimé lire ces images et essayer de les imaginer :
(Voix rapide)
D’un côté, le grand-prêtre de l’ancienne alliance, debout, chaque jour dans le temple. Il s’affaire à offrir toujours les mêmes sacrifices, sans que ceux-ci puissent effacer totalement les péchés, rétablir l’équilibre entre Dieu et les hommes.

(Voix calme et lente)
De l’autre côté, Jésus-Christ, grand-prêtre de la nouvelle alliance, assis, à la droite de Dieu. Il attend tout simplement que l’accomplissement arrive, parce que la victoire est déjà remportée, par sa mort et sa résurrection. Il a mené les siens, ceux qui croient en lui à la perfection, à la réconciliation avec Dieu, avec les autres et avec eux-mêmes.

Et nous dit la lettre aux Hébreux, quand le pardon est accordé, plus besoin de s’agiter à offrir des sacrifices !

(Voix normale)
Et nous aujourd’hui, dans notre XXIe siècle, quel regard posons-nous sur le présent ? Nous qui essayons de suivre le Christ, sur quel mode vivons-nous notre présent ?

Sommes-nous dans l’agitation à vouloir tout porter ?
Ou alors dans le revers de celle-ci, c’est-à-dire la résignation que rien ne peut changer ?

Ou bien sommes-nous dans la sereine assurance que tout est déjà accompli en Jésus-Christ ? Que nous pouvons vivre et habiter pleinement notre présent dans la confiance en Dieu ?

L’histoire a basculé en Jésus-Christ, nous dit la lettre aux Hébreux. Le temps de la rencontre avec lui, c’est aujourd’hui. Cette rencontre change le regard sur la vie et le monde.

Que ferions-nous si nous savions que la fin du monde venait demain ?

Une légende raconte que le réformateur Martin Luther aurait dit : « Si l’on m’apprenait que la fin du monde est pour demain, je veux quand même planter aujourd’hui mon pommier. » Cette parole ne figure dans aucun livre et on ne sait pas quand Luther l’aurait prononcée. Ce qui est intéressant, c’est qu’il semblerait que cette parole se soit répandue parmi les chrétiens de l’Église confessante allemande en 1940 alors qu’il y a de quoi désespérer face à la puissance et la folie d’Hitler.

Planter un pommier la veille de la fin du monde…
Le geste seul se justifie pour lui-même. C’est une manière d’habiter le présent dans l’espérance parce que demain est toujours ouvert.

Planter un pommier la veille de la fin du monde…
Le geste se situe au-delà de l’utilitarisme, au-delà des résultats. Il dit ce royaume de Dieu qui est là, ouvert en Jésus-Christ.

« Regardez les branches du figuier qui deviennent tendres et produisent des feuilles » dit Jésus. Le temps de l’été est là.

La vraie question de notre présent que nous pouvons nous poser, ce n’est pas « à quoi bon ? » ou « à quoi ça sert ? »

La vraie question, c’est plutôt « Sur quoi comptons-nous ? ».
Comme chrétiens, nous comptons sur Jésus-Christ.
C’est pour cela que nous baptisons. C’est pour cela que nous pouvons poser des gestes et des signes d’amour, même s’ils ne semblent que des gouttes d’eau dans l’océan. Ils disent ce Royaume et cet amour de Dieu donné en Jésus-Christ pour chaque humain de cette terre.

Amen.

Note : les explications sur l’origine de la légende du pommier proviennent de la prédication de Marc Pernot : https://oratoiredulouvre.fr/index.php/libres-reflexions/predications/si-la-fin-du-monde-etait-demain-planter-un-pommier-matthieu-6
Je lui ai aussi emprunté la formulation de la question finale « sur quoi comptons-nous ? »