Nous avons vu son astre à l’orient et nous sommes venus l’adorer – célébration œcuménique lors de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens

Célébration œcuménique dans le cadre de la semaine mondiale de prière pour l’unité des chrétiens

Dimanche 23 janvier 2022, temple des Verrières

La célébration a été préparée sur la base des textes élaborés et proposés par des chrétiens du Liban, de Syrie et d’Egypte du Conseil des Eglises du Moyen-Orient basé à Beyrouth. Le dossier complet est disponible et accessible par ce lien.

Le texte de la prédication donnée par le Père Charles Olivier Owono Mbarga est disponible par ce lien et à lire ci-dessous.

Lecture de la Bible

Esaïe 9,1-6
Ephésiens 5,8-14
Matthieu 2,1-12

Prédication du Père Charles Olivier Owono Mbarga

Bien-aimés dans le Christ,

Je suis profondément reconnaissant vis-à-vis de nos frères du Conseil des Églises du Moyen-Orient, qui nous ont proposé le thème et les textes de cette semaine de prière pour l’Unité des Chrétiens. Ils sont particulièrement riches et profonds.

« Nous avons vu son astre à l’Orient et nous sommes venus lui rendre hommage » Mt 2,2

Nous venons de fêter la naissance de Notre Seigneur Jésus Christ à Noël et son Epiphanie, c’est-à-dire sa manifestation aux nations païennes. Puis, aussitôt après la célébration de la fête liturgique de son baptême au jourdain le 09 janvier, la liturgie catholique nous a aussitôt replongés dans les débuts de la vie publique du Seigneur. Pourtant, avec la semaine de prière pour l’unité des chrétiens, ce thème, autant que le texte d’Ésaïe et le récit de la visite des Mages nous replongent dans le mystère de l’incarnation.

Pour mieux nous réapproprier l’hommage rendu par les Mages à l’Enfant-Dieu, il convient de comprendre la démarche de Matthieu, le seul évangéliste à proposer ce récit. Qu’est-ce que ce dernier essayait de dire aux gens de son temps ? Il convient de rappeler que Matthieu, en vrai Juif de son temps, vivait lui aussi dans l’attente du Messie ; une attente vive. Rappelons aussi que la majorité des Juifs pensait que ce serait un roi, descendant de David. Il règnerait sur le trône de Jérusalem, chasserait les occupants romains et rendrait sa gloire à Israël par une royauté stable. Il rétablirait la paix, la justice et la fraternité en Israël.

Comme beaucoup de Juifs de son temps, mais en chrétien éclairé, Matthieu revisite les prophéties de l’ancienne alliance pour montrer que dès sa naissance, Jésus est bel et bien celui dont les Ecritures ont annoncé la venue. L’important signe naturel qu’il présente, c’est d’abord l’étoile. Au Proche-Orient, les gens pensaient communément que chacun avait son étoile ; mieux encore, que chacun naissait sous une étoile spéciale. De nos jours également, on dit souvent, en parlant de certaines personnes qu’elles sont nées sous une bonne étoile ou que leur étoile brille pour dire que leur vie est une réussite ou qu’un bel avenir se dessine pour elles. Revenant au Messie, dans le livre des Nombres (24,17), la vision du prophète païen Balaam clame ce qui suit : « Ce héros, je le vois – mais pas pour maintenant – je l’aperçois – mais pas de près : Un astre se lève, issu de Jacob, un sceptre se dresse, issu d’Israël. »

Matthieu met également en valeur les présents offerts à l’enfant de Bethléem ; puis le geste d’adoration accomplit par les Mages. Ces deux faits non seulement soulignent la majesté du nouveau-né, mais aussi sa grandeur et sa divinité face aux grands des nations, qui viennent à lui : Ésaïe en parlant de la venue de la lumière et de la gloire de Dieu sur Jérusalem, avance ce qui suit : « En grand nombre, des chameaux t’envahiront, (…) Tous les gens de Saba viendront, apportant l’or et l’encens » (Esaïe 60,6). Nous citons également ce qu’en dit le Psaume 71 (72) : « Les rois de Tarsis et des Iles apporteront des présents. Les rois de Saba et de Seba feront leur offrande. Tous les rois se prosterneront devant lui, tous les pays le serviront. » (Psaume 71/72, 10-11)

Finalement, Matthieu évoque l’importance primordiale de la citée de Bethléem, cité du Grand Roi David, dont la lignée est dépositaire de la promesse de Dieu évoquée dans une prophétie de Michée, que les scribes donnent en réponse à la question d’Hérode : « Et toi, Bethléem Éphrata, le plus petit des clans de Juda, c’est de toi que sortira pour moi celui qui doit gouverner Israël. »

Soulignons aussi une bonne combinaison mise en évidence : d’une part la connaissance des astres et leur juste interprétation, qui portera les Mages, experts en astronomie ou astrologie, à la recherche du Messie, et d’autre part, la lecture des saintes Ecritures par les Grands-prêtres et les scribes, qui en donnent aussi la juste interprétation, mais ne feront pas le voyage de Jérusalem à Bethléem pour chercher le Messie pourtant si près d’eux ! Matthieu veut par là souligner le fait que Jésus n’est pas le Messie que pour les Juifs, mais il est aussi le Sauveur des Gentils. Les Mages représentent ainsi les gens venus de toute la terre, qui croient et vénèrent le Christ.

Après cette relecture des Ecritures, nous pouvons également nous demander ce que ce passage de l’évangile de Matthieu signifie pour nous aujourd’hui. En quoi est-ce que le voyage des Mages en suivant l’Etoile, la consultation des saintes Ecritures, leur vénération de l’Enfant de Bethléem, leurs cadeaux nous parlent-ils ?

Des chercheurs de Dieu

Aujourd’hui, frères et sœurs, tout d’abord par notre baptême, et par la beauté infinie de la Création, nous sommes ces gens-là, ces chercheurs de Dieu venus de loin. Nous pouvons reprendre à notre compte ces paroles du psalmiste : « Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l’aube : mon âme a soif de toi ; après toi languit ma chair, terre aride, altérée, sans eau. » (Psaume 62,1) Car seule la soif de Dieu nous oblige à nous mettre en marche, à ne jamais nous contenter de marquer le pas sur place, encore moins de la routine. La soif de Dieu nous pousse aller à sa recherche, à être des pèlerins sur les chemins du monde/de la vie où le Christ nous attend pour être lui-même notre guide et notre compagnon de route.

Des étoiles destinées à briller pour montrer le chemin

Comme précise le commentaire introductif de cette semaine de prière pour l’Unité des Chrétiens : « L’astre guide les Mages à travers l’agitation qui règne à Jérusalem où Hérode prépare le meurtre de vies innocentes. Aujourd’hui encore, et dans diverses régions du monde, des innocents subissent des violences ou la menace des violences, et de jeunes familles fuient des tyrans tels qu’Hérode et Auguste. Dans de telles conditions, les personnes cherchent un signe leur indiquant que Dieu est avec eux. Ils cherchent le Roi nouveau-né, le Roi de bonté, de paix et d’amour. Mais où est l’étoile qui mène à Lui ? L’Église a pour mission d’être l’astre qui éclaire le chemin menant au Christ, lumière du monde. En se faisant l’étoile, l’Église devient un signe de la présence de Dieu auprès de son peuple qu’il accompagne à travers les difficultés de la vie. Par leur parole et leur action, les chrétiens sont appelés à éclairer le chemin afin que le Christ soit à nouveau révélé aux nations. Mais les divisions entre nous estompent la lumière du témoignage chrétien et assombrissent le chemin, empêchant d’autres que nous de parvenir au Christ. »

Être les rois Mages dans un monde où murs et barrières se multiplient

Comme souligne ce même commentaire introductif, « Les mages nous révèlent l’unité entre toutes les nations voulue par Dieu. Ils viennent de pays lointains et représentent des cultures diverses, mais ils sont poussés par la même faim de voir et de connaître le roi nouveau-né et sont réunis dans l’étable de Bethléem pour simplement rendre hommage et offrir des dons. Les chrétiens sont appelés à être un signe pour le monde que Dieu a créé, afin de réaliser cette unité qu’il désire. Avec leurs diversités culturelles, ethniques et linguistiques, les chrétiens partagent une même recherche du Christ et le désir de l’adorer. Le peuple de Dieu a donc pour mission d’être un signe comme le fut l’étoile, de guider l’humanité dans sa quête de Dieu, de conduire tous les êtres au Christ, et d’être l’instrument par lequel Dieu réalise l’unité de tous les peuples. »

Être la lumièreEn conclusion, frères et sœurs bien-aimés, j’aime souvent penser que lorsque Jésus nous donne son commandement nouveau : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jean 15,12), il ne nous laisse pas d’autre choix, sinon celui de nous aimer pour de vrai les uns les autres. Ce n’est pas facultatif. Si nous voulons construire l’unité dans et entre nos communautés chrétiennes, ne vaudrait-il pas mieux commencer par être vrais dans l’amour du prochain ? Ne vaudrait-il pas mieux commencer par poser un regard plein d’amour, de respect et d’estime vis-à-vis des autres ? Je termine par cette citation de Saint Paul aux Ephésiens « Autrefois, vous étiez ténèbres ; maintenant, dans le Seigneur, vous êtes lumière ; conduisez-vous comme des enfants de lumière – or la lumière a pour fruit tout ce qui est bonté, justice et vérité » (Ephésiens 5,8).