Notre Père qui es aux cieux – culte du 3 juillet 2016

Culte de dimanche 3 juillet 2016 à Couvet – Prédication de Patrick Schlüter à télécharger en pdf

Série de cultes d’été sur le « Notre Père »

Lecture de la Bible

Matthieu 6, 9-13

Luc 15, 11-24

Jean 14, 1-11

Prédication

Notre Père qui es aux cieux

Ces mots, nous les connaissons. Peut-être même que parfois, nous les disons sans réfléchir comme un refrain. Pourtant, dans ces 6 mots, il y a 2 réalités qui se télescopent : la réalité terrestre des liens familiaux – « Notre Père » et la réalité céleste du monde de Dieu – « qui es aux cieux »

Ces 6 mots, ce sont l’invocation fondamentale. Ils disent en quel Dieu Jésus croit. Ils disent à quel Dieu nous sommes invités à nous adresser avec Jésus.

Notre Père qui es aux cieux

J’aimerais prendre le temps d’explorer les 2 parties de cette invocation, mais commençons à l’envers par la fin : « qui es aux cieux »

C’est qu’ « il y a bien quelque chose au-dessus de nous ! ». C’est l’expression du langage courant pour dire qu’il y a une réalité qui nous dépasse, un dieu, une force, un esprit, un ange gardien… qui sait ce que celui qui dit cette expression a derrière la tête ?

« Il y a bien quelque chose au-dessus de nous » et au-dessus de nous, ce sont les cieux que nous ne pouvons pas atteindre même en ballon, en avion, en fusée. Il y a toujours un au-delà qui nous fascine, nous les humains.

Et c’est dans cet au-delà que nous plaçons Dieu. Et Dieu nous le percevons dans certain moment de nos vies. C’est d’ailleurs parfois quand on fait une expérience de ce type que l’on dit cette expression « il y a bien quelque chose au-dessus de nous ». On a perçu cette réalité de Dieu dans un moment fort ou quand un malheur nous a été épargné. On dit aussi qu’il a un « bon Dieu qui veille sur nous ».

C’est le mystère de Dieu, de la vie. Ce Dieu se ressent, se pressent, mais en même temps, il reste insaisissable. Si Dieu est « aux cieux », c’est qu’il vit dans son monde à lui qui n’est pas le nôtre, dans une réalité qui n’est pas la nôtre, même s’il se rencontre.

J’aime bien que Dieu soit « aux cieux ». Cela veut dire pour moi que Dieu reste Dieu, que je ne peux pas le saisir. Que même si j’aimerais bien mettre la main sur lui, le domestiquer, Dieu reste le Tout-Autre. Je peux arranger Dieu à ma sauce, mais quand je découvre qu’il est aux cieux, c’est tout un horizon de possibles qui s’ouvre. Quand je dis que Dieu est aux cieux, je laisse Dieu être Dieu.

Mais ce Dieu qui est bien au-dessus de nous, Jésus invite à le prier comme « Notre Père ». Et ces mots résonnent pour nous comme une réalité connue : celle de la famille, celle du père que nous avons eu ou que nous aurions aimé avoir. Celle du père qui nous a permis de nous construire, avec lequel nous nous sommes accrochés, qui a empêché notre développement, qui a été absent, qui a fait simplement ce qu’il a pu ou alors encore un mélange de tout cela. On ne sait d’ailleurs pas quel rapport Jésus avait avec son père terrestre Joseph.

Dieu comme Père, cela peut nous plaire, nous heurter ou nous interroger. Il y a plusieurs images pour parler de Dieu. Celle du Père en est une. Elle a bien entendu ses limites, mais j’aimerais explorer ses forces ce matin.

La première expérience quand nous commençons notre vie, c’est celle de la mère qui nous porte. La réalité du père vient après. Elle vient séparer l’enfant de sa mère pour qu’il puisse se développer. Cette réalité se construit, plus ou moins bien. Ce rôle du père peut être celui du père biologique. Il peut aussi se construire par d’autres figures que nous rencontrons et qui nous permettent d’avancer dans la vie. Un père peut aussi être un père adoptif et c’est peut-être la meilleure image pour comprendre comment Dieu est père.

Dieu devient notre Père par Jésus-Christ. Dans l’évangile de Jean, c’est après sa résurrection que Jésus dit « je monte vers mon Père qui est votre Père, vers mon Dieu qui est votre Dieu ».

C’est ainsi aussi que l’on peut comprendre cette parole de Jésus : « Je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient au Père que par moi. » Ce qui est exclusif ici, c’est que Jésus fait découvrir Dieu comme Père.

J’aimerais souligner les mots que Jésus utilise :

Le chemin :

La réalité d’un Dieu-Père ne va pas de soi : elle implique un déplacement. Elle se construit comme le rapport à un père adoptif. Elle se construit dans le dialogue avec Jésus qui est lui-même le chemin, qui est fils de ce père qui veut devenir le nôtre. C’est comme une demeure à explorer. Et comme dans une famille, les enfants n’ont pas la même relation avec leurs parents, il y a plusieurs demeures dans la maison de ce Père et c’est par Jésus, ce frère que nous pouvons les habiter.

La vérité :

Dans la foi chrétienne, la vérité n’est pas d’abord un savoir : c’est une personne. C’est Jésus qui vit pleinement sa relation à Dieu, qui vit pleinement comme être humain. Par lui, nous pouvons aussi vivre dans la vérité, être ce que nous sommes, devenir vrais parce que Jésus est vrai. Un bon père nous aime comme nous sommes – c’est ce que fait le père de la parabole du Fils prodigue. Parce que nous sommes aimés comme nous sommes, nous pouvons oser la vérité comme le fait ce fils prodigue qui rentre chez lui après avoir traversé des difficultés.

La vie :

Ce que Jésus propose, ce n’est pas un loisir ou quelque chose de superflu dont nous pourrions nous passer. Il en va de la vie, de la vie véritable. Pour pouvoir habiter notre vie, pour être nous-mêmes, Jésus se propose comme chemin vers ce Dieu-Père qui est l’origine de la vie et qui veut nous permettre de l’habiter vraiment.

Quand nous appelons Dieu « Père », nous reconnaissons qu’il nous a donné la vie, qu’il nous aime inconditionnellement quelles que soient les circonstances de nos vies, qu’il veut être proche comme un « papa ». C’est d’ailleurs ainsi que Jésus appelait son Père en araméen : « Abba », qui veut dire « papa » et cette expression a marqué les premiers chrétiens jusque dans leurs prières.

Dieu comme Père, c’est aussi celui qui nous permet de nous construire, nous structurer, nous confronter à sa loi, à sa volonté. C’est ce que fait le fils de la parabole. Il fait ses choix, se confronte à son père.

Le Dieu des cieux s’offre à nous comme un Père. Comment faire le chemin de ce Dieu au-dessus de nous à ce Dieu paternel qui ouvre à la vérité et à la vie ?

La prière fait partie de ce chemin, nous dit Jésus. C’est pourquoi, il ne fait pas seulement un discours sur Dieu, mais il invite à s’adresser à lui. La prière, c’est le lieu du dialogue avec Dieu, un lieu pour dire ses besoins, exprimer ce que l’on vit.

Pour faire ce chemin, il y a aussi le premier mot de la prière, en français en tout cas. C’est le « Notre ». Dieu n’est pas seulement « Mon Père ». Je ne suis pas seul. Il y a Jésus. C’est en écoutant ses paroles, en regardant son accueil des plus petits et des plus faibles, en le découvrant au cœur de la vie humaine jusque dans la mort que je peux comprendre comment Dieu est Père. C’est en mettant en route à la suite du Christ et en prenant sa main que j’entre dans la maison de ce Père.

Dans le « Notre », il y a aussi les croyants de tous les temps, mes frères et sœurs dans la foi. C’est par leur expérience, par le partage que je peux faire le chemin pour découvrir ce Dieu qui s’offre à nous comme un Père.

Vous le savez aussi: on dit parfois : « tel père, tel fils ». Un enfant veut ressembler à son père. C’est également en nous mettant à l’œuvre à la suite du Christ que nous découvrons comment cette réalité du Père peut transformer nos vies. C’est en osant la fraternité humaine comme Jésus l’a fait que nous pouvons entrer dans la réalité de Dieu comme Père.

Alors, laissons Dieu être Dieu, laissons-le s’approcher de nous pour nous entrainer dans la vraie vie en lui disant : « Notre Père qui es au cieux. «

Amen