La volonté…

Cultes des samedi 10 et dimanche 11 février 2024 à Môtiers et Noiraigue

Prière avant les lectures

Seigneur, quand le bruit du quotidien nous empêche d’entendre ta voix,
quand le bruit de nos soucis couvre tes paroles d’espérance,
quand le tumulte de la vie semble nous emporter, éveille nos cœurs à ta Parole.

Seigneur, quand nous n’arrivons plus à laisse ta seule volonté agir,
quand nous ne voyons plus que l’ombre des choses,
quand nous ne savons plus distinguer l’essentiel du superflu,
ouvre nos yeux à ta présence.

Eveille nos cœurs à la Parole que nous allons entendre maintenant,
qu’elle soit notre nourriture, celle qui nous permet d’avancer et de toujours espérer. Amen

Lectures : Romains 7, 15 + 18b-20 et Marc 1, 40-45

Message de Véronique Tschanz Anderegg

L’Évangile de Marc nous fait le récit d’une prière exaucée, une guérison réussie, même si la communication entre Jésus et le lépreux ne semble pas tout à fait maximale !

Laissez-moi vous raconter une histoire vraie de prière non exaucée, une guérison qui a échoué.

« J’étais alors aumônière à l’hôpital et je me rendais régulièrement dans le service d’oncologie. C’est là que j’ai rencontré David, un père de famille de 40 ans, qui était suivi pour un cancer de l’estomac. Il avait été un grand sportif. Il ne craignait pas la douleur, il se montrait persévérant et courageux dans ses lourds traitements. Il exprimait une foi confiante et n’envisageait pas la mort. D’ailleurs, il ne voulait jamais que ses enfants ni sa femme viennent le visiter à l’hôpital. Il voulait les protéger.

Mais les traitements se sont avérés inefficaces. Le médecin a annoncé à David que désormais, ses soins seraient palliatifs.

Dès ce jour, nous n’avons plus revu David. Il ne répondait plus au téléphone, il ne venait plus à ses rendez-vous. L’équipe médicale m’a demandé d’aller le visiter à domicile.

J’ai trouvé David prostré sur son canapé, très affaibli, mutique. Rassemblant tout mon courage, je lui ai dit qu’il serait probablement temps de songer à préparer la fin de sa vie. De longues minutes se sont écoulées, puis David s’est levé, il a pris le téléphone, a contacté la Chrysalide (Centre de soins palliatifs), m’a offert un café et nous avons parlé de la suite.

A la Chrysalide, David s’est ouvert, telle une fleur : il a vu ses enfants, leur a expliqué sa maladie, sa mort proche. Il a beaucoup parlé avec sa femme, il a fait venir celles et ceux qu’il souhaitait encore voir. Il est mort peu de temps après ».

Bien entendu, on peut considérer ce récit comme un échec. Et pourtant, je perçois plusieurs parallèles avec le récit de la guérison du lépreux. Je vous en cite 2 :

1.La maladie de David pourrait se comparer avec la lèpre de l’époque : elle l’avait coupé de ses proches, de son monde sportif, social et professionnel. On pourrait même dire que la maladie avait rendu David « impur » au sens où, du point de vue de la société, il était devenu dépendant, une charge pour ses proches ; en terme cru de rentabilité, David était impur car il coûtait cher à la société et ne produisait plus rien.

2.L’autre parallèle que j’établis entre ces 2 histoires, c’est cette petite phrase prononcée par le lépreux : « Si tu le veux »

En prononçant cette phrase, le lépreux s’abandonne à une volonté autre que la sienne. C’est comme s’il lâchait prise sur sa propre volonté humaine.

En d’autres termes, le lépreux s’ouvre à une autre dimension, à une volonté qui vient de Dieu.

Et j’ai vraiment ressenti ce lâcher prise chez David. C’est comme s’il se déchargeait d’un immense fardeau : désormais, sa vie ne dépendait plus de ses propres forces, de sa persévérance, mais tout se trouvait désormais « entre les mains » d’une autre Volonté.

Alors bien sûr, on aurait vraiment pu espérer que ce lâcher prise trouve une autre issue que la mort de David. Il reste dans ce dénouement quelque chose de profondément injuste et mystérieux. Pourquoi le lépreux est-il guéri et pas les autres ?

« Qu’est-ce que la volonté de Dieu ? » A ce sujet, je ne prétends pas avoir un « savoir » à vous transmettre, mais des pistes nées de vécu, d’observations et bien sûr les savoir immense de l’apôtre Paul !

1.D’abord, je perçois la volonté de Dieu non pas comme une volonté de mort ou de souffrance. La volonté́ divine veut que la vie soit bonne pour tous les vivants, sans oublier personne ! Elle a pour but que chaque être humain puisse développer les dons placés en lui par le Créateur, pour la beauté́ de la vie. Avec les mots de Paul, cela reviendrait à dire que la volonté de Dieu, c’est « notre sanctification, pour que nous devenions à son image ».

2. La volonté divine dépasse notre compréhension humaine. Elle est atemporelle, éternelle, non mesurable. Elle est, et demeurera, un mystère complet.

La volonté divine ne se confond pas avec la nôtre. En effet, notre volonté́ humaine est si souvent pervertie, tributaire de nos peurs, de nos égoïsmes, de notre soif de pouvoir, de notre tendance à nous fier aux apparences et à ne voir que le court terme ; comme le disait l’apôtre Paul (Romains 7), on fait le mal qu’on ne voudrait pas au fond de soi, et on ne fait pas le bien que l’on souhaite.

Et puis, notre volonté́ d’humains se fatigue parfois et se décourage au point de disparaitre.

3. Je pense que la volonté divine nous sera peut-être révélée un jour, au moment de notre passage dans l’autre Vie. Comme le dit Paul dans l’épître aux Corinthiens : « Maintenant, nous voyons la réalité d’une manière floue et confuse. Dans notre vie terrestre, nous ne connaissons qu’incomplètement. Mais dans l’autre vie qui nous est promise, nous verrons face à face, nous connaîtrons Dieu complètement, comme il nous connait »

(1 Corinthiens 13, 12).

Une autre question se pose alors : comment suivre la volonté de Dieu ? Là encore, je propose des pistes, pas un mode d’emploi !

1. D’abord, je pense que faire la volonté de Dieu n’est pas un état permanent ou un objectif atteint une fois pour toutes. C’est un chemin fait de réussite et d’échecs, une recherche perpétuelle.

N’oublions pas que Jésus lui-même a demandé plusieurs fois à Dieu d’agir selon la volonté de son Père. Au jardin de Gethsémané, par 3 fois, Jésus demande à son Père s’il existe une autre solution possible que celle qui l’attend (Matthieu 26, 28-44).

Cette demande est un modèle pour nous. Désirer que Sa volonté soit faite, ne nous interdit pas d’exprimer à Dieu ce que nous souhaitons et ce que nous ressentons profondément. 

Jésus ouvre, par son exemple une porte à la reconnaissance de nos émotions, de nos désirs, de nos affections de nos aspirations profondes. Il créé un espace dans notre dialogue avec Dieu. 

Jésus nous montre comment nous pouvons être libres, vrais, authentiques, sincères avec nos désirs profonds. Mais parfois, nous sommes éloignés de nous-mêmes, éloignés de nos peurs de nos angoisses, éloignés de nos émotions quand nous nous approchons de Dieu. Nous « spiritualisons » tellement !

Combien de fois n’ai-je pas entendu : « C’est vous qui allez prier Madame la pasteure, c’est vous la spécialiste ! »

Or nous sommes invités à venir à Dieu avec ce qui se trouve réellement dans notre cœur, avec nos mots de tous les jours, avec nos colères, nos révoltes, nos chants de joie et pourquoi pas nos gros mots !

2. Pour faire la volonté de Dieu, il s’agit de se mettre en position d’écoute… par la prière et par sa Parole, bien sûr, mais pas seulement. ! De plus en plus, je crois que la contemplation, la rencontre réelle et profonde avec les autres et avec notre environnement, nous permettent de discerner la volonté de Dieu.

3. L’autre piste que je vois, c’est une posture d’élargissement de nos idées, de notre horizon, de notre façon de penser ! Ne pas arriver dans la prière ou la Parole avec des propositions étroites et verrouillées, mais à être prêt à se remettre en question, à bouger, à se laisser inspirer par Dieu, y compris dans des chemins qui nous semblent difficiles et improbables dans notre réalité.

4. La dernière piste, c’est celle de la confiance. Jésus s’est abandonné avec confiance entre les mains de son père, même si le chemin était au-dessus de ses forces. Il a lâché prise.

Voilà peut-être un défi à relever : nous abandonner avec confiance entre les mains de notre Père bon, et plein de grâce, afin de pouvoir prononcer, en toute confiance, ces mots, comme l’a fait le lépreux et David à sa façon : « si tu le veux » Amen

Prière intercession

Seigneur,

Nous venons avec notre volonté d’hommes et de femmes.

Une volonté étriquée, pervertie par nos peurs et nos besoins de reconnaissance.

Mais nous avons à cœur de déposer à ta croix nos émotions, nos sentiments et nos aspirations profondes.

Ainsi nous te remettons les peuples qui subissent les atrocités de la guerre au nom de la religion.

Nous intercédons pour celles et ceux qui luttent pour un monde de paix et de réconciliation. Donner-leur la persévérance et l’espérance pour travailler sans relâche.

Nous te prions pour la Création que tu as voulus à ton image, belle, solide. Que chaque geste d’amour et de protection soit un signe de ton Royaume en marche.

Seigneur, avec notre volonté humaine nous te remettons les malades, le personnel soignant, nos aînés et leurs proches aidants, ainsi que les bénévoles de PHEA.

Nous te remettons les agriculteurs d’ici et d’ailleurs, qu’ils soient remerciés et reconnus pour leur travail.

Nous prions pour l’EREN, pour la paroisse, pour leur avenir.

Et surtout, nous nous en remettons à toi dans la confiance et te disons « Que ta volonté soit faite ».

Amen