Prédication de Patrick Schlüter, prononcée le 12 avril 2015 à Buttes
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Le Christ est ressuscité !
« Et alors ? Qu’est-ce que cela change ? »
Cette question que plusieurs peuvent se poser peut aussi parfois être la nôtre quand l’espérance semble faire défaut face aux événements de la vie ou face à la marche du monde. La résurrection de Jésus semble alors un événement du passé, dont l’impact sur notre vie est limité.
Cette question semble bien être aussi une de celles que se pose les chrétiens à l’époque où l’évangile de Jean est rédigé probablement en plusieurs étapes. La génération des apôtres qui ont connu Jésus est en train de disparaître. Ceux qui ont connu Jésus de son vivant et qui ont été les premiers témoins de sa résurrection ne seront bientôt plus là.
Alors que signifie « croire », faire confiance au Christ ressuscité ? Comment faire l’expérience de la rencontre avec Jésus ? Il ne reste que la parole, le message transmis par les premiers témoins.
L’évangile de Jean poursuit cet objectif de dire le chemin ouvert par le Christ pour son époque :
« Heureux sont ceux qui croient sans avoir vu le ressuscité !
Jésus a fait encore, devant ses disciples, beaucoup d’autres signes miraculeux qui ne sont pas racontés dans ce livre. Mais ce qui s’y trouve a été écrit pour que vous croyiez que Jésus est le Messie, le Fils de Dieu. Et si vous croyez en lui, vous aurez la vie par lui. »
Et ce chemin s’adresse à chacun : ceux qui croient sont appelés à approfondir leur relation au Christ pour comprendre sa présence dans leur vie. Ceux qui ne croient pas sont invités à entrer sur ce chemin qui mène à la vie : une vie vraie, pleine et entière.
Alors, Thomas, ce disciple qui n’était pas avec les autres quand le Christ ressuscité s’est montré à ses disciples, c’est un peu le lecteur de l’évangile qui est invité à croire en lisant le message transmis par les premiers témoins.
Thomas, c’est aussi nous quand nous recevons ce témoignage de foi de la résurrection. Nous n’étions pas là lors des 1ères apparitions de Jésus à ses disciples. Alors quelles preuves avons-nous pour croire ? Comment faire aussi cette expérience de rencontre avec Jésus.
Thomas, c’est aussi Louane qui a reçu le baptême ce matin. Louane va entendre parler de la foi. Vous allez lui partager vos convictions, vos questions, vos valeurs de vie. Mais elle devra se demander comment elle va y entrer, si c’est vrai aussi pour elle. Comment croire à ce qu’on ne voit pas ?
En lisant ce récit, je me reconnais en Thomas à plusieurs moments de ma vie et en particulier à un temps de mon adolescence : à l’époque du catéchisme et après. Dans ma prière, je demandais alors à Dieu de me donner une preuve irréfutable de son existence pour ne plus avoir de doutes.
Avec le recul : je crois que je me sens exactement comme Thomas qui a souhaité toucher le Christ, mais qui dans l’expérience de rencontre avec lui, n’a plus besoin de le faire. Il dit : « mon Seigneur et mon Dieu » sans mettre dans son doigt dans la marque des clous et sa main dans le côté de Jésus.
Si je relis mon chemin de foi, je peux dire que j’ai vécu des expériences fortes que j’ai considérées comme des signes. Sur le moment, je les considérais même comme des « preuves ». Avec le recul de la vie, je me rends compte que je n’ai jamais reçu la preuve que je demandais à mon adolescence, mais je me rends compte aussi que je n’en ai plus besoin parce que Dieu a répondu autrement, en ouvrant un chemin qui donne sens à ma vie.
Le Christ est ressuscité !
« Et alors ? Qu’est-ce que cela change ? »
Si l’on regarde l’expérience des disciples qui rencontrent le ressuscité, nous pouvons y lire des éléments qui donnent de l’épaisseur à cette vie dont nous parle l’évangile de Jean.
D’abord, croire au Christ, cela donne un autre regard sur la vie. C’est discerner la présence de Dieu derrière les personnes, les événements. C’est reconnaître dans l’autre un enfant de Dieu. C’est voir un autre chemin qui s’ouvre plutôt qu’une porte qui se ferme.
Des portes fermées justement : c’était la situation des disciples qui se barricadaient par crainte de connaître le même sort que Jésus. Le ressuscité vient les sortir de leurs enfermements.
Je crois qu’aujourd’hui, croire au ressuscité, c’est sortir de ses enfermements. Nous vivons dans un monde qui se barricade de toutes les manières possibles : par des frontières, des murs, des barbelés, des lois, des rancunes, la loi du donnant-donnant. J’ai l’impression que la crainte de l’autre et de celui qui différent est actuellement très élevée.
Les défis sont réels et les questions de notre monde ne sont pas évidentes. Mais ma foi au ressuscité m’appelle à les aborder en considérant l’autre non pas comme quelqu’un dont je dois me protéger à tout prix, mais d’abord comme quelqu’un avec qui je dois vivre en me respectant aussi moi-même. C’est en ouvrant la porte de la rencontre que cela devient possible. Si les premiers disciples étaient restés barricadés, s’ils n’étaient pas sortis de leurs murs, nous ne serions simplement pas rassemblés ici ce matin !
Croire au ressuscité, c’est aussi pardonner et transmettre cette logique de vie. C’est trouver la paix intérieure comme le Christ la souhaite trois fois à ses disciples. C’est aussi souhaiter la paix et agir dans cette direction.
C’est se laisser porter par le souffle de vie que le Christ veut nous transmettre. L’Esprit et le souffle : en grec, c’est le même mot. Se laisser habiter par l’Esprit, c’est comme une respiration : c’est entrer dans un chemin de vie en plénitude avec Dieu, les autres et soi-même. Cette vie commence maintenant et donne l’espérance qu’elle est plus forte même que la mort.
Ce qui se trouve dans ce livre a été écrit pour que vous croyiez que Jésus est le Messie, le Fils de Dieu. Et si vous croyez en lui, vous aurez la vie par lui. »
Amen.