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Pasteur : Yves Bourquin, président du Conseil synodal Dimanche 26 mars 2023, Temple de Môtiers
Texte de l’Evangile : Jean 11,3-7.17.20-27.33b-45
La Résurrection de Lazare
Chères paroissiennes et paroissiens du Val de Travers, chers amis,
Merci beaucoup de m’accueillir ce matin et de me donner l’occasion de prêcher devant vous ; c’est un privilège.
J’ai envie d’entrée de jeu de vous poser une question ! Dites-moi, est-ce que véritablement pour Dieu tout est possible ?
Oui ! Est-ce que vraiment il peut tout… même outrepasser les lois de l’univers, celles qu’il a lui-même établies.
Peut-il arrêter le cours des choses ? Peut-il stopper le soleil ? Peut-il effacer le passer ? Revenir en arrière ? Effacer la mort ? Recommencer l’Histoire ? Sauver le monde ?
S’il est Dieu, il doit le pouvoir. Mais certaines choses semblent tellement impossibles.
C’est bien l’enjeu de notre Evangile d’aujourd’hui. Dieu, et en fait, dans notre cas, son Envoyé, son fils, est-il capable de faire sortir Lazare vivant du tombeau, lui qui était mort.
Le texte l’affirme ; comment doit-on le comprendre ? Est-ce juste une image, une métaphore, une fable pour illustrer la renaissance spirituelle, ou est-ce une proclamation de la toute-puissance de Dieu.
Quelqu’un vient dire à Jésus de la part de Marthe et de Marie, que Lazare, le frère des deux femmes, est très malade.
Mais cela ne provoque aucune précipitation de Jésus. Comme si Jésus, en effet, souhaite attendre la mort de Lazare. Il ne se précipite pas. Il pourrait se dépêcher et le guérir. Ce miracle, plus simple qu’une résurrection, aurait eu l’avantage d’éviter les larmes du deuil…
Mais, non… Jésus attend sans se précipiter. Le lecteur ne peut s’empêcher de penser que Jésus a derrière la tête de faire une grande démonstration de son pouvoir. Il préfère montrer devant leurs yeux ébahis, Lazare sortir de la tombe, plutôt que de « juste » le guérir.
Et c’était à prévoir, lorsqu’il arrive « tranquillement », il est trop tard. Lazare est mort depuis quatre jours. Quatre jours, c’est juste un peu trop, pour ces pays chauds. Il doit déjà être en décomposition.
S’engage alors un surprenant dialogue avec Marthe, et Marthe dans l’Evangile de Jean, c’est la pragmatique. Sa foi est vivante, mais elle doute sur la question que je vous ai posée tout à l’heure. A Dieu tout est possible… Ah oui, vraiment ? Je veux bien, pour la fin des temps, lorsqu’un nouveau règne adviendra et que les règles du jeu (celles de l’univers entier) seront redéfinies. Mais en attendant, pas question, Lazare est mort, il sent, c’est trop tard.
Jésus reprend fermement Marthe. « Celui qui donne la vie, c’est moi ! Je suis la vie » – dit Jésus. Et Marthe le croit. Mais, je pense qu’elle attend de voir. Quant à Marie, elle est assise chez elle. Dans une posture attentiste.
Ce Jésus, décidément, ne manque pas de culot. Lui qui est pourtant un homme, il affirme que, lui, il décide de qui vit et de qui reste mort.
J’ai dit que Jésus était un humain… Le lecteur va découvrir encore une surprise de taille. Lorsque Jésus se rend sur les lieux, il pleure. Mais pourquoi ? Pourquoi diantre pleure-t-il ? Il vient de dire que c’est lui qui a le pouvoir sur la vie et la mort et là il pleure son ami… Ah moins que ces larmes ne soient que des larmes de compassion envers celles et ceux qui pleurent à côté de lui.
Mais néanmoins, quelle étrange réaction. La réaction naturelle en pareil cas aurait été la consolation : Consolez-vous mes amis, je vais vous le ressusciter notre Lazare. Les larmes se seraient changées en rires, dont certains moqueurs… bien évidemment.
Et ensuite le miracle se produit.
Jésus loue Dieu. Il appelle ensuite Lazare. Et Lazare sort du tombeau.
Pour ma part, et je dois vous l’avouer, je suis sûr que si j’avais été dans l’assemblée, j’aurais cherché une explication logique à tout cela. Par exemple, une sorte de coma, interprété à tort comme une mort. Bref, j’aurais dit : Lazare a été enterré vivant.
Car, moi, je suis vraiment comme Marthe… et comme Thomas aussi ; je doute !
… Et force est de constater, que ce brave Lazare est mort deux fois. Car, cette résurrection par Jésus, il y a environ deux mille ans, ne l’a pas empêché de quitter notre monde quelques années plus tard. Sinon, il serait ici parmi nous comme témoignage vivant de ce qu’il a vécu.
Arrivés au terme de notre petite analyse de l’histoire, qu’allons-nous donc retenir pour notre foi personnelle. Car, ma prédication, j’en suis sûr, si elle s’arrêtait ici aurait un petit goût d’amertume voire de déception.
Mes amis,
Déjà, il y a en effet un sens spirituel intense à ce récit. Parfois, nous séjournons dans des tombeaux. Et au dehors, des gens, des personnes bienveillantes, des amis, s’activent pour nous faire sortir de ces tombeaux.
Certains, à l’image de Marthe, remuent ciel et terre, par amour. D’autres, comme Marie, prient de toutes leurs forces et espèrent, animés par le même amour.
Mais, parfois, la pierre est trop lourde et la seule chose qui peut nous redonner la vie n’est pas un amour humain, mais un amour divin, celui du Père dont seul le Fils est l’enseignant véritable.
Mais le Fils, même s’il redonne la vie, le fait qu’avec notre concours. Il laisse les humains pleurer. Il laisse les humains rouler la pierre. Il laisse les humains l’appeler, l’interpeler, intercéder auprès de lui.
La résurrection dépend de la foi, de l’amour et de l’espérance de tous. Même Dieu espère en la résurrection. Il croit en notre résurrection. Il nous aime malgré nos tombeaux.
Mais… je vais encore vous dire autre chose. Lazare est aussi une image de l’Eglise. Combien de fois l’Eglise s’est-elle retrouvée dans un tombeau ? Considérée comme morte… et sans doute morte réellement.
Mais dès que la parole de Dieu à nouveau la touche. Dès que des femmes et des hommes à nouveau appelle le nom de Jésus. Dès que l’espérance se fait plus
forte que la résignation et que l’amour l’emporte sur le désespoir, alors des tombeaux s’ouvrent et des vies reprennent. Et l’Eglise, c’est-à-dire la communauté de celles et ceux qui confessent l’amour de Dieu révélé en et par Jésus-Christ, renait, ressuscite, à la vie. Voilà qui est pour notre journée une belle perspective d’espoir.
Alors, chers amis, où en êtes-vous avec ma question du début ? Est-ce qu’à Dieu tout est possible ?
Je vous ai dit que j’étais plutôt un dubitatif par nature et je crois en la connaissance scientifique axée sur des faits.
Mais, j’avoue que mon esprit est quand même ouvert à cette question. Car je crois en Dieu ! Je crois qu’il conduit le monde et je crois qu’il est cette force d’Amour qui en est à l’origine. Je crois aussi que, s’il est le Créateur de tout cela, de la vie et de la mort, oui ! en effet il peut tout.
Dès lors, il ne dépend que de sa volonté de modifier les règles qu’il a lui-même établies, même pour un gars nommé Lazare… et cela même si ça parait impossible ou absurde.
Que Dieu, par Jésus-Christ, vienne chaque jour vous ressusciter, vous sortir de vos tombeaux, vous faire renaître à la vie, car aucun espoir n’est perdu. Dieu est là et il veille, hier, aujourd’hui et demain.
Amen !