"La résurrection… c'est pour aujourd'hui!", prédication du 10 novembre 2019

Message de Véronique Tschanz A. d’après les textes bibliques : Luc 20, 27-38 + 2 Thessaloniciens 2, 16-3, 5

Le texte de Luc m’a rappelé un épisode de ma vie de pasteure !

Alors que j’étais toute nouvelle pasteure, une dame s’est approchée de moi pour me demander si elle allait revoir dans l’Au-delà son mari décédé récemment. Avec le recul, je pense que je n’avais pas un avis très précis sur la question et que j’ai voulu lui donner la réponse qu’elle souhaitait entendre ! Alors je lui ai assuré qu’elle allait probablement retrouver son mari un jour ou l’autre, dans un monde autre… Mais la dame s’est mise à pleurer et entre 2 sanglots, j’ai compris qu’elle disait : « Mais je n’ai pas envie de le revoir, c’était un vrai c.. ! »

La question de la résurrection a toujours posé question.

À l’époque de Jésus l’opinion restait très divisée pour les Juifs.

D’un côté, les Pharisiens qui enseignaient la foi en la résurrection et de l’autre côté, les Saduccéens (ceux qui interpellent Jésus) qui refusaient de croire que les morts ressuscitent.

Pour eux, la seule façon de se perpétuer au-delà de la vie terrestre était la descendance. En fait, ils observaient à la lettre la Torah qui préconisait la loi du Lévirat (décrit en Dt 25 : si une femme sans enfants devient veuve, c’est le frère de son mari qui se doit de l’épouser afin de trouver un héritier qui puisse porter la responsabilité du patrimoine familial laissé par le défunt.

Jésus est donc sollicité pour prendre position au cœur d’un débat assez passionné.

D’emblée, il n’entre pas dans l’histoire rocambolesque des femmes aux 7 maris. Comme bien souvent dans son enseignement, il propose de laisser derrière soi les anciennes réalités pour s’ouvrir à un autre monde.

Il dit à ses interlocuteurs : « les morts ressusciteront… c’est une autre réalité qui commencera. Car la vie terrestre et la vie nouvelle dont on héritera sont deux réalités radicalement différentes ».

Jésus utilise la figure des anges comme comparaison. Comme eux, les ressuscités ne se marient pas, ils appartiennent à une autre dimension et la mort n’a plus de pouvoir sur eux. Ils n’ont plus besoin d’avoir une descendance pour perpétuer la vie, plus besoin de contrats de mariages, ni de loi du Lévirat

Jésus appuie son témoignage sur la réalité de la résurrection en introduisant l’anecdote du buisson ardent et de la présence des Patriarches. L’argument de Jésus mérite une petite explication :

Pour les Juifs de l’époque, le séjour des morts est le lieu où Dieu n’est pas présent. Donc si le Seigneur se présente comme étant le Dieu de chacun des pères, c’est que pour Dieu, ces pères sont vivants. Sinon, il dirait « j’étais le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ». Donc, Abraham, Isaac et Jacob continuent d’être vivants pour Dieu. Ainsi, la résurrection existe.

Voilà pour nous une parole de vie. Peu importe les modalités de la résurrection, le comment, le pourquoi ou le quand.

C’est vrai que l’on aimerait tous savoir comme cela se passe. Les questionnements de ma paroissienne ne sont pas uniques. Il nous arrive bien souvent de nous poser de telles questions.

Mais ces questions dépassent notre entendement humain. Cela reste de l’ordre du secret de Dieu. Même Jésus qui a passé par la résurrection ne laisse aucun indice, témoignages sur les comment

Et je pense que c’est plutôt sain de vivre avec ce mystère et de n’avoir, dans le fond, que notre confiance en Dieu comme seule réponse !

Au-delà des aspects techniques de la résurrection, ce qui est primordial de savoir, c’est que Dieu EST pour toujours celui d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, de Jésus… et donc aussi de celles et ceux qui ont quitté cette vie terrestre.

Nos Défunts ne sont pas juste un souvenir, mais ils continuent de vivre dans l’Etre de Dieu, dans un profond mystère.

Une autre chose qui me parait essentiel, c’est de savoir que Dieu est le Dieu des vivants sur terre et qu’il vient s’impliquer dans notre vie à nous, ici et maintenant.

Croire en la résurrection, ce n’est pas seulement parler de l’au-delà, c’est aussi donner du sens à la vie terrestre.

Je trouve la phrase du théologien catholique Maurice Zundel très forte: «Le vrai problème n’est pas de savoir si nous vivrons après la mort, mais si nous serons vivants avant la mort».

Cette phrase dis que, dans le fond, il n’est pas important de s’attarder sur la question des comment de la résurrection. C’est un fait acquis et promis.

Mais ce qui importe plus, c’est de savoir ce que je mets en place dans ma vie terrestre pour qu’elle soit vivante, pleine de sens pour moi, pour les autres. ??

Est-ce que je suis vivante quand je me coupe de mes joies, de ma liberté, de ma spiritualité ?

Est-ce que je suis vivante quand je me plie aux dictats de la société qui vise le succès, la surconsommation et la performance avant tout ?

Est-ce que je suis vivante quand je me voile les yeux sur les souffrances des hommes, des animaux et de la Terre ?

«Le vrai problème n’est pas de savoir si nous vivrons après la mort, mais si nous serons vivants avant la mort».

Cette réflexion nous met en mouvement. Elle nous invite à vivre notre vie en témoins d’un Dieu qui nous offre un regard aimant, un chemin de liberté, un accompagnement infaillible.

Cette pensée nous interpelle à vivre dans l’essentiel, comme par exemple : témoigner de l’importance de la valeur de chaque particules vivantes de la Terre.

Elle nous interpelle à vivre dans l’assurance que l’amour de Dieu est plus fondamental que ma capacité personnelle à réussir ma vie par mes propres forces.

Cette phrase choc nous invite à percevoir la résurrection non pas comme un savoir ou comme un futur mais comme un chant de vie pour aujourd’hui, maintenant:

« Brisure dans ma nuit

Peur éclatée

Mort déchirée

Possible d’amour

Brèche d’espérance

Espace de naissance

Accueil d’étonnement

Semence de liberté

Eblouissement de joie

Visage de l’Autre

Où m’est offerte

La présence ds autres

Grâce d’un jour

Quête de chaque jour

A jamais ! »

Poème de Francine Carillo, « Traces vives », p. 171