La liberté est devenue une prison

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Cultes de baptêmes et confirmations

15 mai 2016 – Fleurier / 22 mai 2016 – Couvet

Lecture de la Bible

Galates 5,13-15

Luc 24,13-35

Prédication David Allisson Téléchargez ici le texte en format pdf

La liberté est devenue une prison.

J’ai entendu cette phrase dans une chanson de Sophie Hunger sur ce qui est nouveau dans le monde. Et comme les catéchumènes ont beaucoup montré qu’ils recherchaient la liberté, ces deux idées en opposition m’ont fait réfléchir : est-ce que la liberté est devenue une prison ou est-ce que la liberté est quelque chose à espérer, quelque chose qui nous motive dans la vie ?

L’apôtre Paul souligne la liberté comme une ouverture qui nous est donnée par le Christ : Le Christ nous a libérés pour que nous soyons vraiment libres. (Ga 5,1)

5 catéchumènes sur 18 ont choisi le même verset de confirmation ou de baptême, qui parle de liberté et de vivre cette liberté dans le service motivé par l’amour.

Vous avez été appelés à la liberté. Laissez-vous guider par l’amour pour vous mettre au service les uns des autres. (Ga 5,13)

Pour ce choix, les catéchumènes avaient chacun leur raison, mais celle qui m’a d’abord frappé disait que la liberté recherchée, c’est la liberté de pouvoir penser ce qu’ils veulent et qu’on ne les embête pas trop avec d’autres manières de voir.

Mais je ne crois pas que la liberté évoquée par l’apôtre Paul était vraiment celle qui se résume à pouvoir faire tout ce qu’on veut sans contrainte.

La liberté est devenue une prison.

La publicité, la mode, les plans de carrière et le show-business ont de la liberté à vendre et à revendre.

Tout faire pour conquérir et vivre sa liberté. Notre monde véhicule cet appel à vivre sa vie comme l’effort sans cesse recommencé de conquérir et vivre ce qu’on pense être sa liberté. Bien souvent, c’est par la satisfaction immédiate des désirs et de toutes sortes de besoins créés avant tout par le monde de la consommation.

Et alors, la liberté devient une prison. Je serai libre en portant tel vêtement, en conduisant telle voiture, en courant sur telles chaussures, en réussissant telle carrière, etc.

Et je n’arrive jamais à réunir toutes les conditions.

Il y a de quoi désespérer.

La publicité ou la mode réveillent en moi des désirs qui ne se réalisent que dans un avenir qui ne vient jamais.

Le manque se creuse un peu plus profondément au fur et à mesure qu’il est comblé et au fond de ce trou, il y le désespoir.

Il y avait de quoi désespérer aussi pour les disciples qui marchaient sur le chemin d’Emmaüs ce jour-là : le désir de vie éveillé par Jésus venait d’être anéanti. Le désir de vie qu’ils avaient sentis grandir en eux en côtoyant Jésus avait été enterré avec le corps mort de cet ami qui les avait fait espérer.

Espérer.

Justement, c’est l’espérance qui va surgir de ce chemin de désespoir qui marque beaucoup de nos vies et qui a marqué ces deux disciples qui rentraient à Emmaüs.

L’espérance de la foi, c’est croire pour réel quelque chose que l’on ne voit pas encore. C’est la joie du Royaume des cieux. C’est la joie de la vie en présence de Dieu. Nous en sentons des traces sans bien le savoir comme les disciples qui peuvent dire après coup qu’ils avaient sentis comme un feu brûler en eux.

La réalisation de cette promesse, c’est la joie de la vie en présence de Dieu, la vie en présence du Christ ressuscité. C’est la joie d’une vie digne, dense et ouverte.

Cette joie, c’est bien davantage que la jouissance attendue de la réalisation des désirs commerciaux ou de bien-être qu’on nous vend à gauche et à droite.

C’est une ouverture à une liberté que plusieurs catéchumènes ont vue bien mieux que je ne l’ai laissé entendre il y a quelques instants !

Les catéchumènes relevaient que ce qui ouvrait leur liberté, c’était l’amour et le service les uns des autres.

Et il y a là bien plus que le confort et le plaisir de bien vivre ensemble. Il y a là une joie profonde et nourrissante qui peut se relever de tous les désespoirs. Cette joie se relève même de situations dures de la vie qui en font voir de toutes les couleurs à certains parmi nous ou proches de nous.

Car toute la loi se résume dans ce seul commandement : « Tu dois aimer ton prochain comme toi-même ». Ga 5,14

Dans la liberté que le Christ nous ouvre, il reste un article de loi. Il reste une exigence : aimer. Cet amour a deux directions en même temps : aimer l’autre et s’aimer soi-même. C’est une liberté des grands espaces qui est dite ici. J’imagine un saut en parachute ou en parapente. Il y a la liberté de l’espace à découvrir au moment du saut. C’est le moment où l’on se tourne vers l’autre, ce moment où s’ouvre tout un espace de liberté. Et en même temps, il est essentiel de s’aimer soi-même : maîtriser la technique qui permettra d’entreprendre un vol et éviter une chute à la manière d’un caillou. Cette maîtrise de la technique, c’est le respect de soi qui incite à s’entraîner pour le vol plutôt que de risquer la chute. C’est une manière de s’aimer soi-même.

Que le souffle de Dieu vienne en nous pour nous donner le goût de cette découverte de notre liberté dans l’amour.

N’ayons pas peur, apprenons à construire notre vie dans la confiance. Voilà une base solide pour vivre cette exigence d’amour qui évite les slogans égoïstes et destructeurs de l’autre. Une liberté patiente, qui apprend à construire des liens avec les autres, qui apprend à construire le respect de soi devant Dieu, c’est ce que nous pouvons vous souhaiter aujourd’hui, chers catéchumènes.

C’est ce que nous voulons aussi chercher pour nos vies. C’est l’aspiration aux grands espaces de liberté du parapentiste. Profiter de ces grands espaces c’est aussi apprendre le respect de nous-mêmes et de la technique de vol. Aimons-nous assez nous-mêmes pour ne pas nous écraser volontairement ou par négligence au sol des grands espaces à découvrir.

Vivre libres. Vivre aimés.

La proposition de l’Evangile pour réaliser ce souhait est de vivre en aimant. En s’aimant soi-même et en aimant les autres, on réalise la liberté que donne le Christ. En s’aimant soi-même et en aimant les autres, on ouvre une vie digne et qui a confiance en son avenir.

Aimez-vous assez pour rester disponibles à aimer les autres.

Vivez cette confiance que le Christ nous a libérés pour une vie à vivre au souffle de son Esprit, pour l’amour des autres sans l’esclavage de règles qui nous enferment et que nous ne pouvons pas respecter sans nous détruire.

« Le Christ nous a libérés pour que nous soyons vraiment libres ».

Aimez votre liberté. Aimez-vous et votre prochain.

Amen.