Job, un homme atterré mais debout – Culte du souvenir

Prédication prononcée par René Perret lors de ce culte, le 24 novembre 2018 à Môtiers

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Chers amis, j’aime que le livre de Job soit dans la Bible.

C’est l’histoire d’un homme qui a tout perdu, et qui n’accepte pas son sort. Il demande à Dieu en qui il croit de lui répondre sur le pourquoi de son malheur. Il n’acceptera que de Dieu lui-même la réponse qu’il lui faut. Cet homme, nous le voyons bien, nous est donné comme un exemple à suivre, comme une attitude à vivre. Alors, écoutons-le et regardons-le se démener dans son malheur.

Job croit en Dieu, sincèrement, fortement. Jusqu’ici, sa vie ressemble à une récompense de Dieu pour sa piété : il est riche, il a de nombreux enfants, une santé splendide. Et tout cela, il va le perdre du jour au lendemain. Le ciel lui tombe sur la tête, et après un temps de silence – comme celui du choc qui nous anesthésie devant une trop grande douleur – il va se lever et s’adresser à Dieu.

Trois de ses amis l’entourent et essayeront de le raisonner dans ses propos. Mais Job persiste et repousse leurs tentatives de répondre au nom de Dieu.

Je vois Job comme un homme debout, debout bien qu’atterré, et qui dit haut et fort ce qu’il ressent, ce qu’il pense, ce qu’il espère et ce qu’il veut. Devant Dieu, il exprime toute sa douleur, son incompréhension, sa révolte. Il ne voit pas en quoi il mérite ce qui lui arrive ; il clame son innocence, il refuse toute idée de punition divine.

Réduit à rien, anéanti, Job exige de Dieu lui-même sa réponse sur le sens de ce qui lui est arrivé. Il met toute son énergie à l’exiger et à l’attendre.

Finalement, Job obtiendra ce qu’il a demandé avec une telle obstination : Dieu lui répondra et Job en sera apaisé. Dieu approuvera l’attitude exigeante de Job à son égard.    Dieu désapprouvera les amis de Job dans leurs efforts d’être les avocats de Dieu.

Nous qui sommes ici, nous connaissons la douleur de la mort d’un proche. Cette douleur peut s’accompagner d’autres douleurs, liées à la maladie ou à des malheurs vécus précédemment. Chacun de nous a son lot de déchirures, d’histoires de vie lourdes à porter. Et dans ce qui nous rend proches de Job, dans ce « ciel qui nous est tombé sur la tête », il y a notre foi en Dieu qui est remise en question.

« Qu’ai-je fait au bon Dieu pour mériter ça ? » disons-nous parfois. Et si nous disions, comme Job et avec la même fermeté : « Je n’ai pas mérité ce qui m’arrive ! » ?

Notre foi en Dieu peut être grande ou petite, selon notre appréciation. Mais pour Dieu, je le crois, elle est suffisante pour nous lever et lui demander sa réponse à notre malheur.

Oser exprimer ce qui nous opprime et nous déprime : tous ces sentiments, toutes ces questions, tout ce qui forme en nous cette boule étouffante, même par des soupirs, des cris, des pleurs,… Dieu écoute tout cela et le reçoit. Il nous invite à le dire, au lieu de le garder en nous et que cela macère et nous ronge davantage.

Oser demander à Dieu lui-même une réponse pour nous-mêmes, une réponse que nous comprendrons et qui nous apaisera, qui nous libèrera, qui nous consolera. Cette réponse viendra, Job nous encourage à le croire et le vouloir ! Elle arrivera au temps voulu, mais elle sera la récompense de notre « bras de fer » avec ce Dieu qui semble nous avoir abandonné.

Nous croyons en un Dieu vivant et qui nous aime comme ses enfants. Cette confiance ne nous épargne pas les épreuves que nous avons subies, elle n’est pas un talisman contre tout mal. Mais cette confiance est partagée : Dieu nous aime comme ses enfants, et il veut nous rejoindre dans ce que nous vivons, de bien comme de mal. C’est pourquoi nous pouvons faire appel à lui quand sa présence nous est cachée, son amour n’est pas évident, quand notre vie perd son sens et sa saveur.

« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » s’écria Jésus sur la croix. Il reprenait la première phrase du Psaume 22, cette prière jaillie de la douleur pareille à celle de Job. Comme Job, Jésus appelait Dieu de toutes ses forces.

Comme Job et Jésus, osons convoquer Dieu à nous répondre, à nous donner un signe de son secours, une parole qui nous parle vraiment, qui nous redonne vie.

Et s’il nous arrive d’être des amis de Job, côtoyant quelqu’un dans le malheur, que nous sachions retenir notre langue d’être l’avocate de Dieu, même et surtout avec toute notre bonne volonté. Avec une écoute respectueuse, avec un effort de compréhension sans jugement, que nos paroles laissent libre celui qui souffre à nos côtés de dire ce qu’il vit et ce qu’il pense, ce qu’il veut. Que nos paroles soient comme une main posée sur son bras, comme une présence aimante et un compagnonnage dans ce qu’il doit traverser seul. Et que notre prière pour lui l’épaule dans sa demande d’une réponse qui lui vienne de Dieu.          Amen.