«Je crois en Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre» – Série d’été partie 1

Dieu-le-Pere

Prédication du dimanche 2 juillet 2017 à La Côte-aux-Fées à l’occasion d’une série d’été sur le symbole des apôtresTexte de la prédication à télécharger ici en format pdf

Lectures bibliques :

Genèse 2, 4-15
Luc 17, 20-21

Prédication

«Je crois en Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre».

Une phrase à commenter pour une prédication, c’est un peu court, non ?

En même temps, si vous étiez là hier à la conférence introductive sur le symbole des apôtres à Môtiers, vous ne serez pas surpris si je vous dis qu’avec cette phrase, j’aurais pu faire plusieurs prédications. Quasiment une sur chaque mot…

JE : prononcer ce “je”, c’est une manière de rendre sa foi personnelle, tout en se rattachant à la confession de foi de la communauté qui la dit avec moi.

JE CROIS : croire, c’est autre chose qu’avoir la foi. La foi n’est pas quelque chose qu’on peut posséder, mais elle nous renvoie à un Autre.

JE CROIS EN : je ne crois pas à un objet, un contenu, à des dogmes, mais en quelqu’un qui est venu se mettre en lien avec moi.

JE CROIS EN DIEU : le nommer, c’est reconnaître qu’il existe une réalité plus grande que moi, qui me dépasse, et en qui je me réfère.

Ce Dieu, il faut encore le qualifier, dire qui il est pour moi, pour nous dans une perspective chrétienne.

C’est donc sur ces qualificatifs que j’ai choisi de m’arrêter ce matin. Et je commence paradoxalement par la fin.

  • Ce Dieu, il est créateur.

Il est celui qui donne la vie au monde.

C’est à lui que les êtres vivants doivent leur existence.

Il est notre origine.

Il est intéressant de noter que la confession de foi ne précise pas “créateur des animaux, de l’homme…” ; seul “créateur du ciel et de la terre” est mentionné.

Dans le premier récit de la création, au tout début de la Genèse, l’homme et la femme apparaissent à la fin, une fois que toute l’œuvre de Dieu est terminée. Leur environnement et les êtres vivants qui s’y meuvent sont déjà là.

Dans cet autre récit qui le suit, au moment où Dieu façonne l’être humain et lui insuffle la vie, on a l’impression d’un cadre de vie minimaliste ; c’est après seulement que Dieu plante un jardin pour lui et assure sa subsistance.

Si le premier texte parle de dominer la terre et d’être maître des autres êtres vivants, le deuxième introduit une notion de responsabilité : “ Le Seigneur Dieu prit l’homme et l’établit dans le jardin d’Éden pour le cultiver et le garder.”

Il en fait des vis-à-vis, des partenaires pour continuer son œuvre.

  • Ce Dieu à l’origine de notre vie, qui s’est inscrit dans l’histoire des humains, et dont le peuple d’Israël a rendu témoignage, les chrétiens ont appris à le connaître, à le découvrir de manière particulière, comme Père.

Ce mot fait partie des premiers qu’un petit enfant prononce quand il découvre le langage : “maman”, “papa”…

Pour Jésus, c’est aussi le mot premier, supérieur à tout-autre, qu’il choisit pour parler de Dieu. C’est ainsi qu’il s’adresse à lui ; c’est avec cette image qu’il raconte la parabole du fils prodigue, c’est par ce mot qu’il nous invite à la prière.

Mais de quelle sorte de père s’agit-il ?

On a souvent eu tendance à calquer notre image du père à Dieu, avec parfois tous les défauts qui vont avec (qu’il soit trop autoritaire, trop permissif ou carrément indifférent).

Mais dans les textes bibliques il ne s’agit pas de n’importe quel père. L’Ancien Testament comporte déjà quelques images évocatrices donnant à Dieu des attributs paternels, et même maternels ! Ce sont des images qui évoquent amour, tendresse, soin et protection.

En outre, le symbole n’évoque pas UN père parmi d’autres, mais LE Père.

C’est–à-dire Dieu révélé comme Père par le Christ, son Fils unique. L’Evangile de Jean révélera l’intimité de ce lien, un lien d’Amour qui dépasse le temps et l’espace.

C’est de cet amour-là du Père de Jésus–Christ que nous sommes aimés, de manière tout aussi unique et personnelle.

Lors de la conférence nous avons pu entendre plusieurs citations d’Alphonse Maillot, et je ne résiste pas à l’envie de vous en faire découvrir une autre ce matin :

«Quand tout aura sombré, quand les astres seront morts, quand l’univers sera froid, quand l’histoire aura cessé, quand les ténèbres se seront refermées sur elles-mêmes, quand la poussière sera redevenue lunaire, dans un monde déserté et inerte, flamboiera encore cette certitude qui suffira d’ailleurs à recréer un nouveau monde : “Dieu est Père, Dieu est notre Père”.» (citation tirée de son livre “Le credo, une foi pour l’an 2000” – Réveil Publications, p. 28)

  • Ce Dieu est qualifié aussi de tout-puissant.

Et cela pose problème à plus d’un. Comment croire à la toute-puissance de Dieu quand on voit tout ce qui se passe dans le monde ? C’est la question que les personnes éloignées de l’Eglise nous posent le plus souvent…

Le commentaire d’Alphonse Maillot apporte une réponse intéressante à cela. “Tout-puissant” n’est qu’un adjectif, relié au mot “Père”. Il n’est pas dit “Je crois en Dieu, le Tout-puissant qui est aussi père”, ni “Je crois en Dieu le Père ET le Tout puissant”, mais bien “Je crois en Dieu, le Père tout-puissant”.

Sa toute-puissance est subordonnée à son rôle de Père.

Cela ne décrit pas un Dieu magicien, une divinité qui devrait réparer les bêtises de ses enfants ou éloigner les difficultés de leur chemin ; cela décrit un Dieu qui ne laissera aucun obstacle le détourner de son amour de Père. «Rien ne pourra l’empêcher d’être Père, notre Père.» (p. 32)

A ce propos, je me rappelle étant enfant, d’une discussion de table. Mon grand-père était très croyant. Je ne sais plus de quoi il était question au départ, mais à un moment donné ma mère lui a lancé : “S’il y avait quelqu’un là-haut qui dirigeait tout, cela ne se passerait pas comme ça !”. Mon grand-père n’avait pas de réponse. Mais cela n’a pas ébranlé sa foi et sa confiance.

Et moi, en mon for intérieur, j’ai pris le parti de mon grand-père. Parce que je voyais bien qu’en lui, il portait quelque chose de plus fort que tous les arguments rationnels qu’on pouvait bien apporter à la discussion…

On ne peut pas en effet apporter de réponse à tout le mal qui se passe. Ni la Bible ni Jésus n’expliquent comment le mal est arrivé. Il est là. Il fait partie de la vie… mais Jésus nous donne cette espérance qu’il n’est pas le plus fort, et que quelque chose dépasse tout cela.

La toute-puissance de Dieu s’est manifestée dans la personne du Christ. Lors de l’épisode de la tentation, il aurait pu recevoir tous les pouvoirs… mais il y a renoncé, pour vivre pleinement l’Amour de Dieu, vivre notre chemin d’homme, et passer par la mort. Cependant, la mort n’a pas eu le dernier mot…

Cela rejoint l’interpellation qu’il nous lance dans l’Evangile de Luc : vous attendez le Règne de Dieu ? Eh bien, arrêter de chercher, il a déjà commencé, il est ici, malgré tout ce qui s’y passe !

C’est à nous d’en voir les signes : même si son plein accomplissement aura lieu plus tard, il est déjà là, car lui Jésus est venu, et il a manifesté à tous l’Amour du Père.

C’est à nous d’en vivre, dès maintenant : vivre selon les valeurs de ce Royaume, au travers des exemples qu’il a montrés.

Les 3 termes évoqués pour nommer Dieu, chacun à leur manière, nous engagent :

– Quelle que soit l’importance accordée par Dieu à ses créatures humaines, la terre et le ciel, le monde et tout ce qu’il contient ne lui appartiennent pas. Ils lui sont confiés. Il s’agit de participer et de continuer l’œuvre de Dieu, de la sauvegarder.

– La puissance de Dieu manifestée dans la fragilité d’un enfant, et les souffrances acceptées par le Christ nous invitent à accepter nos faiblesses humaines, et celles des autres, et à les laisser être habitées par lui.

– Etre relié à Dieu comme un enfant à un Père aimant nous engage aussi vis-à-vis des autres : l’autre en face de qui je me tiens est toujours lui aussi un enfant de Dieu, avec toutes les qualités et les défauts qu’il ou elle peut avoir.

«Je crois en Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre».

C’est notre responsabilité de rendre compte de ce Dieu-là, de lui donner vie, en lui rendant témoignage, et en étant à notre tour créateur de vie autour de nous !

Pendant la musique d’orgue, nous pouvons prendre le temps ; prendre le temps d’apprécier la musique, prendre le temps aussi de laisser nos pensées dériver et écouter comment cette phrase résonne en nous après avoir cheminé avec elle…

Amen.