En avant, arche! Prédication du 7 juillet 2018

Culte présidé par René Perret à Môtiers

2ème culte de la série d’été consacrée aux engagements œcuméniques prononcés en août 2017 à Chézard-St-Martin.

4ème engagement : «Nous, chrétiens et citoyens du canton de Neuchâtel, nous voulons nous engager pour le bien de la cité. Nous voulons collaborer plus étroitement dans nos actions diaconales, dans la solidarité partagée, notamment en faveur des migrants».

Humour anglais par rapport à la lecture de Genèse 6 et 7 (Noé):

Nooo... aaaah!

Textes du culte  en pdf

1ère lecture : Genèse 6,5-12, 7,1-16 (extraits)

Le SEIGNEUR voit que sur la terre, les êtres humains sont de plus en plus méchants. Et toute la journée, dans leur cœur, ils ne pensent qu’à faire le mal. Le SEIGNEUR regrette d’avoir fait les humains sur la terre, et son cœur est rempli de tristesse. Il se dit : « Je vais faire disparaître de la terre les humains que j’ai créés, les grands animaux, les petites bêtes, et même les oiseaux. Vraiment, je regrette de les avoir faits. ». Mais le SEIGNEUR se montre bon pour Noé. Noé est le père de trois fils : Sem, Cham et Japhet. Parmi les hommes de son époque, Noé est un homme juste, il fait ce qui plaît à Dieu. Il suit le chemin de Dieu. Le SEIGNEUR dit à Noé : « Entre dans le bateau avec ta famille. En effet, je le vois : tu es le seul juste parmi les hommes de ton époque. Parmi les animaux purs, prends sept couples de chaque espèce, un mâle et sa femelle. Parmi les animaux impurs, prends un couple de chaque espèce, un mâle et sa femelle. Pour les oiseaux, prends aussi sept couples de chaque espèce, un mâle et sa femelle. Ainsi, on conservera leur race sur toute la terre. Dans sept jours, je vais faire tomber la pluie pendant 40 jours et 40 nuits. Je vais faire disparaître de la terre tous les êtres que j’ai faits. » Noé fait tout ce que le SEIGNEUR lui a commandé. Noé a 600 ans quand la grande inondation arrive sur la terre. Il entre dans le bateau avec ses fils, sa femme et les femmes de ses fils, pour fuir l’inondation. Les animaux purs, les animaux impurs, les oiseaux et toutes les bêtes qui remuent sur le sol, tous viennent auprès de Noé dans le bateau. Ils sont deux par deux, mâle et femelle, comme Dieu l’a commandé à Noé. Puis le SEIGNEUR ferme la porte derrière Noé.     L’année où Noé a 600 ans, le deuxième mois, le 17 du mois, toutes les sources de l’océan immense situé sous la terre jaillissent, et les fenêtres du ciel s’ouvrent toutes grandes. La pluie tombe sur la terre pendant 40 jours et 40 nuits.

2ème lecture : Evangile selon Marc 6,1-6

Jésus revient à Nazareth, la ville où il a grandi. Ses disciples l’accompagnent. Le jour du sabbat, il se met à enseigner dans la maison de prière. Il y a beaucoup de gens. En l’écoutant, ils sont très étonnés et ils disent : « Qui lui a appris tout cela ? Cette sagesse qu’il a reçue, qu’est-ce que c’est ? Et ces miracles qu’il fait, comment les fait-il ? Pourtant, c’est bien le charpentier, le fils de Marie, le frère de Jacques, de José, de Jude et de Simon, et ses sœurs vivent ici chez nous ! » Cela empêche les gens de Nazareth de croire en Jésus. Alors Jésus leur dit : « Un prophète est respecté partout, sauf dans sa ville, dans sa famille et dans sa maison. » Jésus ne peut faire aucun miracle à Nazareth. Pourtant, il guérit quelques malades en posant les mains sur leur tête. Et il s’étonne parce que les gens ne croient pas. Ensuite, Jésus va enseigner dans tous les villages qui sont autour de Nazareth.

Prédication

Cet engagement, nous l’avons pris en août dernier lors d’une célébration œcuménique cantonale à Saint-Martin. Et qui dit engagement dit suite à donner à ces paroles fortes par des actions concrètes.    C’est cet engagement dont nous allons parler à la lumière des deux textes que nous avons lu et qui nous présentent deux hommes attelés à la tâche que Dieu leur a confié : Noé et Jésus.

Mais je commence par un témoignage : j’ai vécu ma jeunesse à l’époque de la Guerre froide et de la grande peur atomique. À l’armée comme dans nos foyers, nous imaginions avec terreur les Rouges de l’URSS nous envahir. Et moi qui n’y connais rien à la politique, j’ai eu un jour cette pensée : et si c’était plutôt les pauvres du monde qui viendront nous envahir, poussés par leur misère vers nos richesses ? Cette pensée ne m’a pas quittée et elle me fait voir, dans le flux migratoire qui s’est mis en marche plus fortement ces dernières années, comme une conséquence logique de la vie du monde : quand rester chez soi signifie vivre de rien et en mourir, quelle autre solution reste-t-il aux plus volontaires que de chercher ailleurs de quoi vivre mieux ? Est-ce que je ne ferais pas pareil, si ici la vie ne me permettait pas de me nourrir, d’être libre et digne, de gagner mon pain et mon logis ? Qui de nous se résoudrait à rester, à mendier, à perdre des forces et des proches ?

Prenons Noé. Homme juste selon Dieu, et d’un grand âge – synonyme de sagesse et de santé bénie, le voilà prié de construire un grand bateau en plein désert. Pour sauver l’humanité et les vivants, Dieu a choisi ce moyen et cet homme. Pour reprendre les termes de notre engagement œcuménique, Noé s’engage pour le bien de la cité (ici tous les vivants), à une action précise et réaliste : un bâtiment qui tiendra au-delà du déluge à venir. La solidarité est partagée envers les humains – la famille de Noé – et tous les animaux, dont un couple de chaque espèce monte à bord.

Précisons : en auditeurs attentifs, vous avez remarqué deux choses :

Premièrement : dans l’extrait que nous avons lu, il manque la construction du bateau. Merci de l’avoir reconstituée par votre imagination !

Deuxièmement : on parle à la fois de 7 paires d’animaux purs, mais aussi à la fin d’une paire d’animaux, purs ou impurs. C’est le signe que deux traditions orales se sont mêlées dans l’écriture de ce récit. Cette histoire vaudrait bien une pleine soirée d’étude biblique, mais j’ai déjà dit cela souvent ! Encore un engagement à finir par tenir ?! À un moment précis de sa vie, Noé obéit à la volonté de Dieu, qui est de sauver l’humanité et la vie – certes au travers d’une catastrophe immense. Il lui faut du courage et de la force pour réaliser l’appel de Dieu, certainement au milieu de moqueries et de critiques de ses contemporains.

Prenons maintenant Jésus. Déclaré à son baptême par Dieu comme son Fils bien-aimé, Jésus exerce depuis peu comme porteur d’une Parole qui guérit l’esprit, l’âme et le corps. Bien des gens ont déjà été retournés dans leur façon de vivre ; d’autres ont été relevé physiquement, d’autres pardonnés. Et ses paraboles sont des graines de vie pour qui les écoute avec le cœur. Ici, il est revenu dans le village de son enfance. Et ceux qui l’ont connu « tout petit déjà », qui connaisse sa famille, ceux-là n’arrivent pas à lui accorder leur foi. « Nul n’est prophète en son pays ! » Ce n’est pas écrit qu’ici ; c’est une constante de notre histoire personnelle et communautaire. Quand quelqu’un a une idée qui dépasse notre entendement ; quand quelqu’un ose une parole nouvelle, inattendue et qui nous pousse à nous situer, surgit rapidement la méfiance tapie au fond de nos entrailles : « Mais pour qui il ou elle se prend pour nous dire ça ? Pour nous demander ça ? Pour nous critiquer comme ça ? » Alors nous nous empressons de le faire taire par nos critiques : il n’est pas des nôtres ; c’est un gauchiste, un écolo ou un UDC ; c’est un marginal, un faux prophète, un idéaliste. Jésus ne put faire aucun miracle à Nazareth. Jésus ne peut rien faire avec notre fermeture de cœur, d’esprit, avec nos œillères. Lui qui peut et veut le Royaume de Dieu sur terre, qui y mit toute son énergie, sa volonté et jusqu’à son dernier souffle, il est impuissant contre ceux qui le refusent, et contre nous qui parfois refusons sa volonté quand elle ne correspond pas à la nôtre.

Il nous reste ces questions, surgies de notre engagement œcuménique et des deux hommes qui habitent notre méditation :

Voulons-nous le bien de la cité (village, commune, canton, pays, notre Terre) ? Si oui, nos forces et nos idées sont sollicitées par Dieu lui-même, qui « a tant aimé le monde » et qui continue à l’aimer totalement.

Voulons-nous collaborer plus étroitement dans ce que nous faisons en faveur des plus pauvres d’entre nous, des isolés par la maladie, l’âge et l’épreuve ; et notamment en faveur des migrants, qu’ils soient d’aujourd’hui, d’hier et de demain ? Si oui, comment faire ?

Je vois ces propositions comme autant de talents qui nous sont confiés par Dieu (clin d’œil à la paraboles des talents) :

1er talent : prions, chacune et chacun, pour demander à Dieu de nous préciser sa volonté dans ce domaine. Il peut ouvrir les yeux de notre cœur sur des situations que nous ne percevons pas encore ;

2ème talent : prier ensemble pour que l’Esprit souffle sur notre conscience communautaire et lui redonne un élan vivant, des envies qui nous poussent ensemble en avant.

3ème talent : chercher entre nos Eglises comment collaborer plus étroitement et concrètement dans ces domaines. Autrement, cet engagement reste une « belle parole », une lettre morte. Pour cela, peut-être se mettre à quelques-uns pour « secouer le coco » de nos Eglises dans ce canton. Au risque de trouver une démarche qui nous fasse tous bouger.

Sans notre foi, Jésus est impuissant, hier comme aujourd’hui. À nous de nous offrir à lui ! Sans notre obéissance quand la volonté de Dieu se manifeste, rien ne bouge et le déluge arrive. C’est pourquoi je tire de l’attitude de Noé ce mot d’ordre pour nous : « Pour le bien et la survie de la cité, en avant ! arche ! »  Amen.