Culte du 4 septembre 2016, Couvet 10h
Prédication de Patrick Schlüter à télécharger en pdf
Lectures de la Bible :
Prédication sur « Apprends-nous la vraie mesure de nos jours : que nos cœurs pénètrent la sagesse. »
Le temps file ! Il passe trop vite !
La rentrée avec la reprise des activités est souvent une période chargée avec l’impression que tout arrive en même temps et que l’on n’aura pas le temps de tout faire !
La question du temps nous touche tous et elle évolue au fil de la vie. Le temps semble infini quand on est jeune, puis il semble s’accélérer avec l’âge. La perspective de la mort qui nous attend tous donne aussi son relief au temps Parmi toutes les activités de ces dernières semaines, il y a aussi des services funèbres que j’ai accompagnés.
J’ai repensé à une pensée de Confucius qu’une amie nous avait envoyé pour un anniversaire il y a quelques années : « on a 2 vies, la 2ème commence quand on se rend compte qu’on n’en a qu’une. »
C’est dans ce contexte de rentrée, alors que je me demandais quand je trouverais le temps de préparer ce culte que j’ai relu le psaume 90 et l’extrait de la lettre à Philémon. Ces 2 textes étaient proposés, parmi d’autres, par le lectionnaire que nous suivons pour les cultes. Alors, je me suis dit que méditer sur le temps quand on n’a pas le temps ou l’impression de ne pas avoir le temps, c’était justement une bonne idée.
J’ai été interpellé par la traduction proposée par le lectionnaire catholique du verset 12 du psaume 90 :
« Apprends-nous la vraie mesure de nos jours : que nos cœurs pénètrent la sagesse. »
Il ressort ici une sagesse du temps, une manière d’habiter le temps devant Dieu qui peut nous guider dans la vie. Finalement, le temps qui passe nous invite à trouver une spiritualité pour accueillir les événements et habiter au mieux notre temps.
Et c’est peut-être justement quand nous n’avons pas le temps de cela ou que le temps qui passe nous fait peur que cette spiritualité du temps peut nous être la plus utile.
Avant d’entrer dans cette méditation, j’aimerais relever que les 2 textes que nous avons entendus ont été écrits dans des temps difficiles pour leurs auteurs :
Beaucoup de spécialistes de la Bible pensent que le psaume 90 a été écrit après l’exil à Babylone. C’est ce qu’il pourrait y avoir derrière l’idée de fautes dont parle le psaume. On a perdu le pays promis, l’autonomie politique. Et on se souvient alors de Moïse qui n’est pas entré dans la terre promise et l’a vue de loin. Quel sens a le temps qui passe ? Comment se situer face à un avenir qui semble bouché ? Comment habiter le présent qui n’est pas facile ?
Bien des années plus tard, Paul est en prison. Il est âgé et il se demande sans doute s’il est encore utile à la transmission de l’Evangile.
Ces questions face au temps sont aussi les nôtres : Comment vivre notre temps et apprendre la vraie mesure de nos jours ?
Le temps pour Dieu, nous dit le psaume 90, est infini : mille ans sont pour lui comme un seul jour. Pourtant Dieu a choisi de créer le monde et d’y faire habiter l’humain. Dieu se veut un refuge pour les humains, de génération en génération.
Face à ce temps de Dieu, il y a le temps de l’homme plus bref : 70 ou 80 ans pour les plus vigoureux comme le dit le psaume. Aujourd’hui, nous dirions probablement un peu plus, mais il y a aussi les crises, les difficultés et la mort qui frappent parfois bien avant.
Pour le psaume 90, la situation difficile que vit le peuple d’Israël est une conséquence du péché. A cette époque, on attribuait les malheurs à Dieu. Cela donnait du sens à la vie, car, si le malheur vient de Dieu, la guérison peut aussi venir de lui. Cela fait partie du monde de pensée de l’Ancien Testament. Avec Jésus-Christ, nous sommes délivrés de cela. Nous n’avons plus besoin de chercher la cause du malheur, mais nous pouvons vivre devant Dieu tout ce qui fait nos vies. Nous pouvons accueillir le bonheur et le malheur sans y lire une récompense ou une punition.
Mais la question de comment habiter notre temps demeure. La finitude fait partie de nos vies : nous allons tous mourir un jour. Tous, nous rencontrons des difficultés. Nous commettons des erreurs. Tout cela fait partie de notre condition humaine.
La bonne nouvelle, c’est que nous sommes aimés dans notre finitude et que cette finitude peut donner sens à notre vie.
Notre monde d’aujourd’hui est devenu très agité. Il faut remplir sa vie de toutes sortes d’activités : le travail, les loisirs, etc. Et quand on sort de cela par la maladie, le chômage ou simplement l’âge, on peut se sentir inutile. J’entends beaucoup de témoignages de personnes qui se demandent à quoi elles peuvent encore servir. D’autres personnes ont peur d’être à charge des autres. Cela, c’est le revers de la médaille de l’agitation du monde qui aussi la nôtre.
Il y a une autre manière d’habiter le temps. C’est d’accepter ses limites et de consentir à l’action de Dieu. Dieu agit dans le monde depuis la création. Il agit aujourd’hui dans notre vie et dans celle des autres. Par la prière, nous pouvons ouvrir notre regard sur son action. Prier, c’est agir. C’est accompagner le travail que Dieu fait dans notre vie et dans la vie des autres. Prier, cela donne valeur à nos vies et à celle des autres.
Paul vit d’ailleurs une expérience forte avec Onésime. Cet esclave échappé de chez son maître chrétien, Philémon, vient chercher refuge chez lui. Onésime devient chrétien auprès de Paul. Celui-ci découvre que la grâce de Dieu continue d’être à l’œuvre même à travers lui-même qui est prisonnier.
Le temps de nos vies est compté, mais si elles s’intègrent dans le temps de Dieu, nos vies prennent sens. L’enjeu, c’est qu’elles deviennent un peu plus un chant d’amour qu’une plainte. C’est le passage que fait le psaume 90. Il commence par la plainte pour se terminer par un chant d’amour à Dieu :
« Dès le matin, comble-nous de ta bonté ; alors toute notre vie, nous crierons de joie. Pendant longtemps tu nous as humiliés. Donne-nous maintenant autant d’années de joie que nous en avons eu de malheur. Que nous puissions te voir agir, et que nos descendants découvrent ta grandeur ! Seigneur notre Dieu, accorde-nous ton amitié, et donne à nos travaux un résultat durable ; oui, donne à nos travaux un résultat durable. »
Amen