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Texte de la prédication de David Allisson, dimanche 17 septembre 2017, culte avec le baptême de Tiago
Salutations et bienvenue
Par-dessus tout, mettez l’amour, ce lien qui vous permettra d’être parfaitement unis. Que la paix du Christ règne dans vos cœurs. C’est à cette paix que Dieu vous a appelés. [Colossiens 3,14-15]
Prière
Seigneur, tu nous accueilles ici pour une rencontre tournée en direction de la vie.
Donne-nous l’ouverture et l’attention à ta présence.
Donne-nous l’ouverture et l’attention les uns autres.
Apprends-nous à aimer, à prier, à louer, à nous réjouir de ta présence.
Amen
Lecture de la Bible
Prédication de David Allisson :
Pasteur : Mercredi, chez les parents de Tiago, nous avons un peu plaisanté sur le fait qu’avec plus de 80 invités, la famille du baptisé serait plus nombreuse et intergénérationnelle que les fidèles réguliers. Et ça m’a fait réfléchir et me demander comment j’allais faire pour le moment de la prédication. Je me suis dit que j’allais aussi inviter quelqu’un. Comme dans les jeux télévisés où on peut demander l’avis d’un ami.Voilà, j’ai demandé à mon ami Melvin de venir pour m’aider au moment du message.Viens, Melvin, c’est maintenant.
Melvin : Ah ! enfin ! C’est qu’il fait un peu sombre dans mon trou, tu sais. (la marionnette sort de sa cachette)
Pasteur : Oui, c’est vrai, excuse-moi de t’avoir fait patienter ici en bas. C’était pour leur faire la surprise.
Melvin : Voilà que je suis juste la surprise du chef ! Je croyais que tu ne pouvais pas te débrouiller tout seul. Toi tu m’avais proposé une collaboration.
Pasteur : Oui, c’est vrai. Et je le pense toujours. Je me suis dit que si je t’invitais, tu n’allais pas laisser passer les choses que tu ne comprendrais pas où qui soulèvent des questions. Tu ne te gênes pas de m’interrompre, comme c’est le cas pour eux dans les bancs.
Melvin : Oui, c’est clair ! Et d’ailleurs si tu commençais ? Parce qu’il doit y avoir des choses à dire avec ton histoire de roi qui pardonne et de serviteur qui ne pardonne pas. Elle est pas réelle, ton histoire.
Pasteur : Hé, bien ! Tu commences fort. Non, elle n’est pas réelle mon histoire. Et d’ailleurs, ce n’est pas mon histoire, c’est celle de Jésus qui a essayé d’expliquer à quoi ressemble le Royaume des cieux.
Melvin : Le Royaume des cieux ? Alors en plus, c’est Dieu ce roi qui change d’avis à tous moments ?
Pasteur : Oui. Enfin non.
Melvin : Alors c’est oui ? ou c’est non ? Il faudrait savoir !
Pasteur : Je ne sais pas si c’est Dieu. Jésus nous invite à penser ça en tout cas, puisqu’il dit que c’est comme ça que son père fera avec ceux qui disent le suivre et qui ne pardonnent pas à leurs proches de tout leur cœur.
Melvin : Voilà une chose que j’ai de la peine à comprendre : annuler une dette comme dans l’histoire, ce n’est pas vraiment la même chose que pardonner. Pourquoi Jésus raconte-t-il cela pour dire quelque chose à propos du pardon ?
Pasteur : Tu as raison, Melvin, avoir une dette, ce n’est pas tout à fait la même chose qu’être coupable envers quelqu’un et avoir quelque chose à se faire pardonner. Mais il y a un élément qui se retrouve dans les deux situations : entre les deux personnes il y a quelque chose qui n’est pas réglé et qui doit l’être pour que chacun se sente à l’aise de continuer une relation dans de bonnes conditions.
Melvin : Oui, hé bien s’il m’a trop énervé ou trop fait de mal, je ne suis pas sûr que j’ai envie de continuer la relation, moi.
Pasteur : Des fois, on n’a pas trop le choix, tu sais. L’histoire parle de frère, de compagnons ou de collègues de travail. La relation continuera de toute façon. Elle sera juste soit mauvaise, soit bonne.
Melvin : Oui, il y a peut-être avantage à ce que qu’on s’entende un peu si on doit se croiser tous les jours. Mais enfin, s’il y a un problème comme une dette, il n’y a qu’à rembourser et c’est bon.
Pasteur : Oui, c’est vrai, c’est tout naturel, ta réaction. Et comme souvent, la vie, c’est juste un tout petit peu plus compliqué que cela. Il faut dire que la dette du premier serviteur est si grande qu’il faudrait travailler des milliers d’années pour pouvoir la rembourser. Et même si les personnages des histoires vivent parfois très longtemps, ce n’est juste pas possible.
Melvin : Alors c’est pour ça qu’il doit demander au roi d’avoir pitié de lui. Mais pourquoi il dit qu’il va payer tout si le roi lui laisse du temps, ce n’est pas possible !
Pasteur : En effet, ce n’est pas possible. Il espère peut-être encore pouvoir régler sa dette. Mais dans la vie, il y a des dettes que l’on ne peut juste pas rembourser. Il y a aussi des fautes ou des bêtises qu’on ne peut pas réparer.
Melvin : Ce que tu dis là, ça me rappelle une bêtise que j’ai faite. Pour embêter ma sœur, j’ai ouvert la cage de son oiseau pour le laisser s’échapper. Et quand j’ai vu comme elle était malheureuse, j’ai regretté et j’aurais bien voulu rattraper l’oiseau, mais il avait disparu, peut-être même qu’il s’est fait manger par un chat ou qu’il est mort de faim ou de froid. Et celui qu’elle a reçu ensuite ne remplace pas vraiment. Elle se souvient du premier et de sa disparition et celui là, c’est sûr il ne reviendra pas. Elle est restée triste pour lui.
Pasteur : Oui c’est cela. Pour retrouver une bonne relation avec toi, ta sœur devra décider de te pardonner une chose que tu as faite et que tu ne peux pas réparer.
Melvin : Ah, oui ! Et tu sais, quand elle a mangé mes deux derniers bonbons alors que j’en avais reçu et elle non. Elle ne pouvait pas me les rendre, même si des bonbons, c’est plus facile à remplacer qu’un oiseau qu’elle aimait et qui s’est échappé. Quand elle a fait ça j’ai crié, pleuré, ragé et demandé qu’elle me rende les bonbons, qu’elle soit punie dans sa chambre et privée d’argent de poche jusqu’à ce qu’elle puisse me rendre les bonbons.
Pasteur : Mais c’est la deuxième partie de l’histoire d’aujourd’hui, votre aventure avec les bonbons ! C’est bizarre que le serviteur trouve agréable et heureux la remise de la dette impossible à rembourser et que pour une petite somme il devienne tout à coup intraitable.
Melvin : Oui, tu vois, quand c’est réaliste de pouvoir rembourser ou réparer, il faut le faire.
Pasteur : Tu as peut-être raison sur le principe, bien qu’on pourrait en discuter un bon moment. Mais ce n’était pas plus réaliste de rembourser pour le compagnon qui devait une petite somme que pour le serviteur qui devait une fortune au roi. Les sommes en jeu paraissent toutes différentes, mais les sentiments de l’un et de l’autre devant la situation pouvaient se ressembler beaucoup, tu sais.
Melvin : Ah oui, peut-être. Alors si je suis aimé même quand j’ai fait un coup tordu, je pourrais apprendre à aimer moi aussi dans toutes les situations.
Pasteur : Je crois que c’est exactement là que Jésus veut en venir en racontant son histoire de remise de dette. Nous avons reçu de l’amour. Nous vivons dans un monde qui peut être beau et nous nourrir aussi nombreux que nous sommes. Nous sommes invités à aimer comme nous aimerions être aimés. Les parents de Tiago et les membres de sa famille l’aiment. Ils espèrent qu’il apprendra lui aussi à aimer les autres et à faire du bien autour de lui.
Melvin : Ah, oui ! ça je vais y arriver : aimer ceux qui font du bien pour moi, ça devrait aller.
Pasteur : D’accord, mais tu as entendu dans l’histoire de Joseph et ses frères. Les frères avaient fait un coup tordu très grave à Joseph : ils l’avaient vendu à des marchands ! Malgré ce malheur, Joseph s’en est sorti et a trouvé un bon métier. Plus tard il y a eu une sécheresse au pays où étaient restés les frères et le père et ils ont dû venir vers Joseph pour lui acheter des réserves pour manger. Joseph a été d’accord. On peut dire qu’il leur avait pardonné.
Melvin : Ah bien alors ils devaient être contents, les frères.
Pasteur : Oui, tu as raison, mais ils savaient qu’ils avaient mal agi et ils se sont fait du souci au moment où leur père devenu vieux est mort. Ils ont eu peur que Joseph profite que le père était mort pour se venger du mal que ses frères lui avaient fait il y a longtemps.
Melvin : Ah oui ? Mais il ne voulait pas faire ça Joseph.
Pasteur : Oui. Joseph avait décidé de ne plus revenir sur cette vieille histoire, mais les frères ne pouvaient pas s’empêcher d’y penser encore. C’est comme si c’était plus difficile pour eux de se pardonner à eux-mêmes que pour Joseph de les pardonner alors que c’est lui qui avait subi le malheur !
Melvin : C’est un peu comme si ils n’arrivaient pas à croire que Joseph leur a pardonné, on dirait.
Pasteur : Oui, il y a des choses qui nous semblent impossibles à pardonner. Pourtant la vie continue et à un moment il nous faut choisir entre vivre avec notre culpabilité ou accepter que nous pouvons être aimé avec tout ce qui fait notre personnalité et que nous pouvons aussi aimer à notre tour.
Melvin : J’aime bien ça, aimer, moi. Je veux aimer à tort et à travers.
Pasteur : C’est une bonne idée, ça pour un habitant du Val-de-Travers, de vouloir aimer à tort et à travers ! J’aimerais nous faire entendre un texte un peu triste, mais plein d’amour et de vie qu’un poète et chanteur a écrit quand un autre, qui est devenu comme fou, a tué sa femme quand elle avait 33 ans.
Melvin : Mais c’est horrible !
Pasteur : Oui, c’est une situation horrible. C’est une de ces choses qu’on ne peut pas réparer. Et ce poète, Julos Beaucarne, a décidé que la vie pouvait être belle et pleine d’amour malgré cette chose horrible qui lui est arrivée. Je vais t’installer pour que tu puisses suivre la fin du culte avec nous, et je vais conclure ce moment avec ce texte de Julos Beaucarne.
Melvin : D’accord, mais j’espère que je ne vais pas trop pleurer.
Pasteur : Moi aussi j’espère que je ne vais pas trop pleurer, j’aimerais arriver à le lire et que nous puissions comprendre ce que disent ces mots. Ces tristes événements sont arrivés il y a plus de 40 ans et Julos Beaucarne a décidé de vivre et d’aimer. Il a aujourd’hui 81 ans.
Témoignage de Julius Beaucarne
[texte écrit suite au décès de sa femme, assassinée à 33 ans]
Amis bien-aimés,
Ma Loulou est partie pour le pays de l’envers du décor, un homme lui a donné neuf coups de poignard dans sa peau dorée. C’est la société qui est malade, il nous faut la remettre d’aplomb et d’équerre par l’amour, l’amitié et la persuasion.
C’est l’histoire de mon petit amour à moi, arrêté sur le seuil de ses trente-trois ans. Ne perdons pas courage, ni vous ni moi. Je vais continuer ma vie et mes voyages avec ce poids à porter en plus et mes deux chéris qui lui ressemblent.
Sans vous commander, je vous demande d’aimer plus que jamais ceux qui vous sont proches ; le monde est une triste boutique, les cœurs purs doivent se mettre ensemble pour l’embellir, il faut reboiser l’âme humaine.
Je resterai sur le pont, je resterai un jardinier, je cultiverai mes plantes de langage. A travers mes dires vous retrouverez ma bien-aimée ; il n’est de vrai que l’amitié et l’amour.
Je suis maintenant très loin au fond du panier des tristesses. On doit manger chacun, dit-on, un sac de charbon pour aller en paradis. Ah ! comme j’aimerais qu’il y ait un paradis, comme ce serait doux les retrouvailles.
En attendant, à vous autres, mes amis de l’ici-bas, face à ce qui m’arrive, je prends la liberté, moi qui ne suis qu’un histrion, qu’un batteur de planches, qu’un comédien qui fait du rêve avec du vent, je prends la liberté de vous écrire pour vous dire ce à quoi je pense aujourd’hui : je pense de toutes mes forces qu’il faut s’aimer à tort et à travers.