« Mes enfants, n’aimons pas seulement en paroles, avec de beaux discours ; faisons preuve d’un véritable amour qui se manifeste par des actes. » 1 Jn 3,18 (Bible en français courant)
Culte en lien avec l’initiative pour des multinationales responsables
Dimanche 9 août 2020 à 10h00 – Temple de Fleurier 19ème dimanche du temps ordinaire
Musique : Fabienne Pantillon, organiste
Lecture et service : Marinette Jequier
Célébrant : Eric Bianchi, diacre stagiaire
Autres intervenants : Claire-Lise Vouga, Stéphanie Perregaux, Philippe Vaucher, Elisabeth Würgler
Lectures bibliques :
- Gn 2, 4-15
- Am 8, 4-7
- Lc 10, 25-37
Préambule important
L’initiative populaire pour des multinationales responsables défend les droits humains et la dignité que chaque personne possède de manière inaliénable. Elle vise également le respect et la protection de notre environnement.
Elle réclame que toute multinationale implantée en Suisse et qui contrevient à l’étranger aux droits humains et aux règles environnementales, puisse être tenue responsable civilement en Suisse pour les dommages causés. Aujourd’hui, de très nombreuses violations sont répertoriées, toutes aussi choquantes les unes que les autres.
Le Conseil paroissial de l’Eglise réformée du Val-de-Travers soutient celle-ci, à l’image de très nombreuses organisations et communautés religieuses.
Pour plus d’informations, nous vous invitons à consulter en supplément du site du comité référendaire, celui des « Eglises pour multinationales responsables« .
Accueil
Que le Seigneur qui nous accueille pose sur nous Son regard d’affection.
Qu’Il nous reçoive tels que nous paraissons devant Lui, à la fois forts de son amour et de sa tendresse, et en même temps soucieux et fébriles devant les éventuels tourments que nous vivons dans nos existences personnelles.
Prière d’invocation
Seigneur,
Offre-nous de nous rendre attentifs à ta présence toujours réelle,
Car ta voix est parfois couverte par le son de nos quotidiens bruyants.
Offre-nous d’être présents en nous-mêmes pour être présents pour et avec les autres.
Car absorbés par nos chemins, il nous est quelquefois difficile de regarder autour de nous.
Offre-nous d’être perméables à la force de ta Parole.
Car elle est source de vie, d’espoir et de sagesse.
Amen.
Prière de repentance
Seigneur Dieu,
Il nous arrive de nous enfermer dans notre maison intérieure.
Alors, dans ces moments :
Nous tirons les rideaux des fenêtres ouvertes sur le dehors,
pour ne plus être confrontés à la vue des malheurs,
nous verrouillons les portes aux étrangers qui y frappent,
nous coupons notre téléphone pour ne plus entendre les cris extérieurs.
La nuit, nous éteignons les lampes pour faire croire à notre absence.
Nous nous isolons d’un monde qui nous inquiète,
d’un monde que nous ne reconnaissons plus
et que nous ne voulons plus reconnaître comme étant le nôtre.
Oui Seigneur,
il nous arrive de construire des murs autour de notre maison,
de couper les ponts qui y mène
et à force de vouloir nous protéger de tout,
nous nous retirons tant et si bien que nous faisons de notre chaumière une prison.
Libère-nous de nos enfermements.
Murmure-nous au sein même de nos cœurs,
que rien n’arrête Ton amour qui ne force pourtant jamais,
que rien n’entame Ta patience de nous voir nous épanouir
et ta tendresse qui dit que rien n’est jamais plus doux que le confort de ta présence.
Amen.
Annonce de la grâce
Le Seigneur par la voix du prophète Esaïe a déclaré :
« Tu as du prix à mes yeux, tu comptes beaucoup pour moi et je t’aime » (Es 43,4).
Par cette parole, le Seigneur rebâtit inlassablement les ponts que nous avons coupés.
Il effrite les murs de sable qui entourent notre maison.
Il nous invite à ouvrir nos serrures et
Il tient toujours grandes ouvertes, les portes que nous avions fermées.
Il ouvre les rideaux de nos fenêtres pour y laisser pénétrer sa lumière.
Il rétablit sans cesse les communications que nous avions coupées, avec Lui, nous rendant attentifs aux bruissements de la vie extérieure.
Et lorsque vient la nuit,
Il allume toute les lampes de notre maison.
Et par l’éclat de son propre amour, la demeure devient un phare au sein même de nos cœurs guéris par son pardon éternel.
Amen.
Prière avant les lectures
Seigneur notre Dieu,
Tu sèmes ta Parole dans le monde et dans nos cœurs.
Le champ de nos vies n’est pas toujours prêt à te recevoir.
Prépare-nous !
Arrache de notre champ les pierres, les épines et les soucis
qui nous empêchent de t’accueillir.
Fais de nous une bonne terre ouverte à ta Parole.
Amen.
(EERV – Textes liturgiques 1997 (fiches de 1991) 21034)
Lecture 1 : Gn 2, 4-15
4 Voilà l’histoire de la création du ciel et de la terre. Quand le Seigneur Dieu fit la terre et le ciel, 5 il n’y avait encore aucun buisson sur la terre, et aucune herbe n’avait encore germé, car le Seigneur Dieu n’avait pas encore envoyé de pluie sur la terre, et il n’y avait pas d’êtres humains pour cultiver le sol. 6 Seule une sorte de source jaillissait de la terre et arrosait la surface du sol. 7 Le Seigneur Dieu prit de la poussière du sol et en façonna un être humain. Puis il lui insuffla dans les narines le souffle de vie, et cet être humain devint vivant. 8 Ensuite le Seigneur Dieu planta un jardin au pays d’Éden, là-bas vers l’est, pour y mettre l’être humain qu’il avait façonné. 9 Il fit pousser du sol toutes sortes d’arbres à l’aspect agréable et aux fruits délicieux. Il mit au centre du jardin l’arbre de la vie, et l’arbre qui donne la connaissance de ce qui est bon ou mauvais. 10 Un fleuve prenait sa source au pays d’Éden et irriguait le jardin. De là, il se divisait en quatre bras. 11 Le premier était le Pichon; il fait le tour du pays de Havila. Dans ce pays, on trouve de l’or, 12 un or de qualité, ainsi que la résine parfumée de bdellium et la pierre précieuse de cornaline. 13 Le second bras du fleuve était le Guihon, qui fait le tour du pays de Kouch. 14 Le troisième était le Tigre, qui coule à l’est de la ville d’Assour. Enfin le quatrième était l’Euphrate. 15 Le Seigneur Dieu prit l’homme et l’établit dans le jardin d’Éden pour le cultiver et le garder.
Lecture 2 : Am 8, 4-7
4 Écoutez donc ceci, vous qui piétinez les malheureux, vous qui éliminez les humbles du pays: 5 Vous dites: « Vivement que finissent les fêtes de nouvelle lune, pour que nous puissions nous remettre à vendre notre blé ! Vivement la fin du sabbat, pour rouvrir nos greniers ! » Vous diminuez la mesure, vous falsifiez les poids, vous faussez la balance. 6 Vous vendez à vos clients jusqu’aux déchets de votre blé. Vous récupérez comme esclaves des malheureux pour un peu d’argent qu’ils n’ont pu rembourser, des pauvres pour une paire de sandales.7 Le Seigneur a fait ce serment : «Par le pays dont Israël est si fier, jamais je n’oublierai vos façons d’agir! »
Lecture 3 : Lc 10, 25-37
25 Un maître de la loi intervint alors. Pour tendre un piège à Jésus, il lui demanda : « Maître, que dois-je faire pour recevoir la vie éternelle? » 26 Jésus lui dit : « Qu’est-il écrit dans notre loi ? Qu’est-ce que tu y lis ? » 27 L’homme répondit : «“Tu dois aimer le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ton intelligence.” Et aussi : “Tu dois aimer ton prochain comme toi-même.” » 28 Jésus lui dit alors : «Tu as bien répondu. Fais cela et tu vivras. » 29 Mais le maître de la loi voulait justifier sa question. Il demanda donc à Jésus : «Qui est mon prochain ? » 30 Jésus répondit : « Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho lorsque des brigands l’attaquèrent, lui prirent tout ce qu’il avait, le battirent et s’en allèrent en le laissant à demi-mort. 31 Il se trouva qu’un prêtre descendait cette route. Quand il vit l’homme, il passa de l’autre côté de la route et s’éloigna. 32 De même, un lévite arriva à cet endroit, il vit l’homme, passa de l’autre côté de la route et s’éloigna. 33 Mais un Samaritain, qui voyageait par là, arriva près du blessé. Quand il le vit, il en eut profondément pitié. 34 Il s’en approcha encore plus, versa de l’huile et du vin sur ses blessures et les recouvrit de pansements. Puis il le plaça sur sa propre bête et le mena dans un hôtel, où il prit soin de lui. 35 Le lendemain, il sortit deux pièces d’argent, les donna à l’hôtelier et lui dit: “Prends soin de cet homme ; lorsque je repasserai par ici, je te paierai moi-même ce que tu auras dépensé en plus pour lui.” » 36 Jésus ajouta : « Lequel de ces trois te semble avoir été le prochain de l’homme attaqué par les brigands ? » 37 Le maître de la loi répondit : « Celui qui a été bon pour lui. » Jésus lui dit alors : « Va et fais de même. »
Prédication
Trois textes et deux mots à retenir :
Le premier, c’est « amour ». Nous le savons, mais sans amour rien n’existe, rien n’a de valeur.
Et le second mot, intimement lié, c’est « responsable ». Ce mot nous vient du latin respondere, autrement dit et selon ce bon vieux Larousse : « Qui doit répondre de ses actes ou de ceux des personnes dont il a la charge ».
Nous toutes et tous connaissons bien le poids de ces trois syllabes.
Et lorsque l’on est responsable, c’est parce que l’on nous a confiés quelqu’un ou quelque chose de très important, de très précieux.
Dans le passage de la Genèse qui nous a été lu, il y a tout d’abord au point de départ un amour incommensurable. L’amour, lorsque l’humain est façonné par Dieu, puis lorsqu’il est animé de vie et enfin, lorsqu’il est installé dans le jardin d’Eden. Un petit peu comme lorsque l’on prend un objet précieux aux creux des mains, pour le déposer sur un lit de ouate ou dans un écrin.
Mais ce texte nous apprend autre chose. C’est que le jardin a été créé avec soin ; car non seulement les fruits des « arbres à l’aspect agréable » étaient nourrissants et différents, mais en plus, ils étaient délicieux. Cela me fait penser à une chambre que l’on prépare avec soin et amour pour un enfant à venir, pour un parent ou pour un ami cher que l’on reçoit.
Mais il y avait plus que de l’amour de la part de Dieu. Il y avait de la confiance aussi, lorsqu’Il a confié cette création à l’humain pour qu’il la « cultive » et la « garde ».
Ces deux verbes ne sont pas anodins. Lorsque l’on cultive, et celles et ceux qui jardinent le savent, on tend à faire prospérer, à faire fructifier, ce que l’on a semé, à le développer.
Garder ensuite, cela revêt une idée de protéger et de veiller sur quelqu’un ou sur quelque chose. Et c’est donc ici que nous effleurons un premier sens du mot responsable, car de l’amour que l’on porte à quelqu’un naît la confiance, qui elle-même engendre la responsabilité.
Dans notre seconde lecture, on peut dire que le concept de responsabilité, le prophète Amos, 750 ans avant notre ère, l’avait bien compris. Ou plutôt devrais-je parler d’irresponsabilité. Celle des dirigeants, des fortunés, des marchands. Amos, lui, qui était simple berger, était avant tout la voix de Dieu dans ce passage que nous avons écouté.
Il faut savoir qu’en ce temps-là, le royaume d’Israël était dirigé par Jéroboam II, et qu’il connaissait une période économique faste.
Et dans un monde idéal, dans un monde qui avait pour Dieu notre seul et unique Dieu, on aurait pu attendre une justice sociale plus équilibrée, afin que toutes et tous en profitent ; Mais voilà… l’argent, déjà lui, conduisait les plus riches à écraser toujours plus les plus démunis pour devenir encore plus prospères.
Chez Luc, il y a plusieurs choses importantes : la première c’est le double commandement d’amour. Vous le connaissez : « Tu dois aimer le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ton intelligence et ton prochain comme toi-même ». Et par la parabole du bon Samaritain, Jésus tente d’amener le maître de la loi à comprendre qui est réellement son prochain. Cet homme à terre, moribond, est-il son « prochain » ? Cette question peut sembler étrange, mais il faut savoir que dans le judaïsme ancien, le « prochain » était un compatriote, voire un membre de la même confrérie religieuse.
Sur un tout autre plan et dans la parabole, on se demande pourquoi le prêtre et le lévite passent loin de l’homme blessé, sans lui porter secours. En fait, on peut supposer que c’était à cause de prescriptions religieuses, mais le texte n’en dit rien.
Il nous a en effet été lu : « Vous récupérez comme esclaves des malheureux pour un peu d’argent qu’ils n’ont pu rembourser, des pauvres pour une paire de sandales. » Mais Dieu ne l’accepte pas et il le dit comme une sorte d’avertissement : « (…) jamais je n’oublierai vos façons d’agir ».
Oui vous le savez, ces pauvres, ils pourraient être vous, ou moi; quelque part en Suisse ou à l’étranger : au Pérou, en Inde, en Afrique…
Quoi qu’il en soit, seul le Samaritain, membre d’un peuple considéré comme hérétique par les Juifs, s’approche de ce malheureux. Et au contraire du lévite et du prêtre qui voient et ne font rien, la vue de cet homme saisi de pitié ou de compassion (selon les traductions) le Samaritain. Et qu’est-ce que la compassion ?! Le Larousse, encore lui, nous dit : « de compati, souffrir avec. Sentiment de pitié qui nous rend sensible aux malheurs d’autrui… ». Le mot grec signifie même : « être pris aux entrailles ».
Ce n’est pas rien… Là où le lévite et le prêtre se sont éloignés, le Samaritain, lui, s’est approché.
Et au terme de la discussion avec le maître de la loi, Jésus s’adresse à lui et lui dit : « Va, et toi aussi, fais de même ». Parce que ce que désire le Seigneur, ce ne sont pas que de belles paroles, mais des actes.
Alors dans ces trois textes, où est la responsabilité ?
Dans la Genèse, l’homme est responsable du merveilleux cadeau de la Création, confié avec Amour par Dieu.
Chez Amos, les dirigeants et les plus riches, ont la responsabilité d’une certaine justice sociale, mais sont responsables, dans le sens de la culpabilité, de délibérément s’en moquer. Ils sont coupables de leur manque de compassion, de leur manque d’amour. Ils sont responsables du malheur des plus démunis et pourquoi ? Au nom de la cupidité et de l’avidité ; au nom de l’idolâtrie du dieu argent.
Chez Luc, l’homme est responsable de son prochain, mais non par devoir, mais par amour. Un amour auquel Jésus ne donne aucune limite. Il ne donne même aucune définition du prochain. Au contraire, dans notre texte, il emmène le maître de la loi sur le chemin de la réflexion, au-delà des convenances qu’on lui a inculquées. Et nous, jusqu’où sommes-nous prêts à aimer, chacune et chacun ? De qui sommes-nous réellement prêts à nous faire proche ?
Et aujourd’hui ?
Vous savez, lorsque j’ai écrit ce message, les sentiments se bousculaient en moi.
Sentiment de tristesse profond quand je vois l’état de souffrance de notre planète.
Sentiment de révolte et de honte lorsque j’ai lu comment certaines entreprises basées dans notre pays empoisonnent l’air et l’eau dans d’autres contrées !
Sentiment de curiosité aussi quand j’ai pensé à Amos. J’aimerais bien, oui j’aimerais vraiment qu’il soit là pour nous parler de notre société. Parce que vous savez, il n’y aurait pas besoin de changer une seule virgule à son texte, pourtant vieux de 2750 ans… L’esclavage entre les hommes existe encore. Au Pérou par exemple, des mineurs travaillent pour extraire de l’or dans des conditions inhumaines. Et jusqu’à il y a quelques années, cet or était acheté par une entreprise suisse.
Sentiment de colère aussi, quand je pense aux criminels d’aujourd’hui qui dépouillent, rouent de coups et laissent à moitié-mort sur le bord du chemin des humains, comme celui de la parabole de Luc. Il y en a des exemples presque tous les jours dans les journaux. Mais s’il y en a chez nous, il existe aussi dans d’autre pays, des personnes qui dépouillent de leurs terres de pauvres gens, les violentent, tout ça par exemple, pour agrandir un gisement minier.
Je vous avouerais que je me suis demandé comment serait reçue l’idée de faire un culte, dont le thème est apparenté à l’objet d’une initiative politique. Et après avoir réfléchi, je me suis dit qu’il n’y avait pas meilleure place pour parler de ceci, car quoi de mieux que la Parole pour nous éclairer lorsque l’on parle des cadeaux de Dieu : la vie, la liberté, la dignité, l’amour et cette merveilleuse Création qui nous entoure, qui nous fait vivre et dont nous sommes dépendants et issus.
Comme Amos le faisait, je pense que l’Eglise se doit de dénoncer ici et ailleurs, les injustices des puissants et des riches qui soumettent en esclavage les plus démunis.
Parce que quiconque empoisonne des enfants, des femmes, notre environnement, tout ça par appât du gain et qui plus est se moque des souffrances générées, va à l’encontre de notre foi chrétienne.
Et parce que ça nous concerne…
Parce que si aujourd’hui je ne vous en parle pas, si je me dis qu’il est plus commode et moins exposant pour moi de taire ce sujet, alors, j’agirai de la même manière que le lévite et le prêtre dans la parabole de Luc. Je ne veux pas d’une Eglise qui passe à côté de son prochain, et qui s’éloigne de lui. Je ne veux pas d’une Eglise qui passe son chemin comme si de rien n’était.
Amen.
Message – Témoignage de M. Philippe Vaucher
Quand Monsieur Bianchi m’a contacté pour parler de ce que représente, en tant que chrétien, mon engagement en faveur de l’initiative « Multinationales responsables » au culte de ce 9 août, j’ai été très touché de sa confiance, mais aussi inquiet, car l’exercice ne me semblait pas facile, ce qu’il fut.
Je me suis alors posé la question : pourquoi suis-je habité par ce besoin de me battre pour plus de justice, de respect et d’équité ?
Enfant déjà, l’injustice me révoltait. Mais se mettre du côté du plus faible n’est pas sans risque. Dans la cours de l’école, j’ai ainsi pris et donné quelques peignées ! J’ai aussi quelquefois manqué de courage. Mais ce que j’ai surtout découvert, c’est que quand on prend position, cela peut devenir contagieux, et que d’autres se joignent à vous.
À 10 ans, j’ai été choqué en voyant une émission de télévision sur les flamands du lac Nakuru au Kenya, victimes de la pollution et de la surexploitation du lac. J’ai décidé de vendre les timbres du WWF pour racheter le territoire aux entreprises qui exploitaient la région.
À l’école du dimanche, on nous racontait la vie de personnes courageuses qui avaient osé se mettre en porte à faux par rapport à la société, par respect de l’autre, par esprit de justice, par respect de Dieu. L’enseignement du Christ m’a marqué par son humanité, son ouverture sans a priori et sa manière de ne pas donner de réponses aux questions, mais des clés pour trouver chacun son chemin et nous aider à le suivre. J’ai découvert qu’ensemble, on peut faire des miracles, comme au bord du Lac de Tibériade où un jeune garçon propose à Jésus ses cinq pains et ses deux poissons pour nourrir la foule qui, suivant son exemple, partage alors ses provisions. Le miracle se produit et la foule est nourrie. (évangile de Jean 6)
Et il y a surtout ces deux phrases de Jésus : « Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le de même pour eux (…) » et « Ce que vous ferez au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous le ferez ». (évangile de Matthieu, chapitres 7 et 25).
La sagesse populaire dit aussi « Ne faisons pas aux autres ce que nous n’aimerions pas qu’on nous fasse ».
Ces phrases ont pris une place centrale dans ma vie et je m’efforce de les appliquer au mieux, au quotidien dans ma relation aux autres, dans ma pratique professionnelle avec mes élèves, comme dans mon action politique.
S’il est possible d’agir ponctuellement et localement, l’éloignement géographique et l’ampleur de certaines injustices nous paraissent rendre la tâche au-dessus de nos forces. Nous nous sentons souvent très impuissants.
Et même ici… Je me souviens d’un soir où nous espérions être plusieurs pour soutenir un projet et où nous n’étions que deux, dans la cuisine d’un ami. Cette situation me déprimait, mais l’épouse de mon ami m’a mis la main sur l’épaule et m’a dit : « Ne t’en fais pas, là où deux ou trois sont réunis… » Elle n’a pas eu besoin de terminer sa phrase, j’avais retrouvé confiance et le courage de continuer.
L’initiative « Multinationales responsables » est donc une aubaine, puisqu’elle nous permet d’agir collectivement, grâce à notre démocratie directe. En agissant ici, nous pouvons avoir une grande influence sur ce qui se passe ailleurs dans le monde. Ce qui pour moi n’est pas acceptable en Suisse, ne l’est pas davantage à l’étranger : les entreprises ayant leur siège dans notre pays doivent respecter les gens qui travaillent pour eux et respecter l’environnement, comme elles doivent le faire en Suisse. C’est pour moi une question de cohérence et d’honnêteté. Voilà pourquoi j’ai récolté des signatures lors du lancement de cette initiative et je vais m’investir pour convaincre de la soutenir.
En tant que chrétien, je ne peux pas rester inactif face à la souffrance de mon prochain et à la destruction de la nature. Dieu nous a rendus libres de nos choix, c’est un cadeau extraordinaire, mais ce cadeau nous rend aussi responsables de nos actes.
Pour soutenir ce en quoi nous croyons, l’importance d’être nombreuses et nombreux nous aide, et notre foi nous porte.
Message – Témoignage de Mme Claire-Lise Vouga
Pendant ces mois particuliers de confinement et, de questionnement, j’ai écouté des conférences de Michel Maxime Egger de PPP et profité de lire ou relire différents ouvrages sur le sens de la vie. Voilà le fruit de ma réflexion :
Je vous ai donné la terre en héritage dit Dieu.
Et nous qu’en avons-nous fait ?
Des multinationales suisses violent encore et toujours les droits humains et détruisent l’environnement :
Dans le district de Yavatmal au centre de l’Inde, près de 800 paysans ont été empoisonnés en l’espace de 12 semaines après avoir pulvérisé des pesticides sur leurs champs de coton. Vingt d’entre eux sont décédés. L’un des insecticides mis en cause est fabriqué en Valais pas Syngenta et exporté depuis la Suisse, alors que cet insecticide est depuis longtemps interdit ici !
La planète est malade parce que l’humanité est malade.
L’Église est appelée à prêcher la conversion et c’est bien. Mais l’Église n’est-elle pas appelée en premier à se convertir ?
Le Seigneur Dieu prit l’homme et l’établit dans le jardin d’Éden pour le cultiver et le garder.
Pour moi, il est important de me rappeler que l’humain fait partie de la Création et que s’il est appelé à être jardinier de la planète, il est avant tout une simple espèce parmi les autres. Dieu nous a créés à partir de la glèbe. Mais à Son image. Il a mis en nous Son souffle de vie, Il a mis en nous Son Esprit.
Le Créateur a placé l’humain à la frontière entre la terre et le ciel non pas supérieur aux autres créatures mais responsable.
Ainsi l’Humain est capable de Dieu. Nous avons la capacité de rendre grâce, de percevoir la présence divine dans la Création.
Nous avons la liberté de dire oui à la vie… mais aussi de dire non.
La liberté c’est des fois lourd à porter. On fait des choix, on se trompe, on s’entête même souvent, on se croit puissant, invincible…
Et surtout, c’est difficile de faire des choix.
Dans notre monde l’argent a pris le pouvoir sur l’amour. Le consumérisme et la peur du manque, voilà deux outils que le diviseur emploie avec finesse pour nous manipuler.
Et la terre se meurt. L’humain se laisse contaminer. Plus encore, puisque c’est sa responsabilité de gérer le Jardin que Dieu lui a donné.
Dans la parole de ce jour, Amos nous invite à prendre nos responsabilités avec lucidité.
Et parce que j’ai conscience de ma responsabilité dans ce domaine, j’ai envie de réagir et de m’engager.
Seigneur, fais-nous revenir à toi. Béni Sois-Tu parce que tu te laisses trouver par ceux qui te cherchent.
Par le souffle que tu as mis en nous, tu fais de nous des chercheurs. Ta présence m’accompagne. Tu es là, mais souvent je ne t’aperçois même pas.
Comme dit cette parole attribuée à un Père du désert :
« Seigneur, puisque tu es partout, comment cela se fait que je sois si souvent ailleurs ! »
Pierre Rabhi parle des hommes d’aujourd’hui comme des humains hors sol. C’est aussi lui qui nous rappelle la fable du colibri. Il est important que chacun fasse sa part, même petite. Par exemple, réfléchir sur l’utilité d’un achat ou ses conséquences, signer une pétition, etc.
Mon Dieu, viens, s’il te plaît, me conduire à la Source.
Mais avant tout, que je remette mes pieds dans la terre, la glèbe.
Que je me laisse composter par l’ Esprit saint pour retrouver en moi le terreau de l’humilité sur lequel poussera Ton Amour.
Et que la colère qui m’habite face à tant d’injustices soit transformée en courage pour rendre mon cœur brûlant du désir de dire avec Marie : Oui. Me voici. Je viens faire Ta volonté.
Prière lue par Mme Elisabeth Würgler
Seigneur donne-moi de prendre ma part d’habiter l’identité que tu me donnes, d’exploiter les charismes que ton regard déploie en moi, d’être présent là où tu me places.
Seigneur donne-moi d’être ce que tu espères de moi.
Seigneur donne-moi de prendre toute ma part, de ne pas me réfugier derrière mon sentiment d’insuffisance, de ne pas brandir ma petitesse pour me dérober à mes devoirs.
Seigneur donne-moi d’oser ce que tu attends de moi.
Seigneur donne-moi de prendre seulement ma part, de ne pas présumer de mes forces, de ne pas ombrager l’espace dont les autres ont besoin pour grandir, de m’ouvrir à l’altérité dans le respect de mes limites.
Seigneur donne-moi de naître à ce que je suis par toi.
Amen.
Marion Muller-Colard, Comme la première foi – Prier, Editions Passiflores, Boyer, 2013.
Prière d’intercession écrite et lue par Mme Stéphanie Perregaux
Seigneur, quand tu créas le ciel et la terre, tu as dit à tout ce qui vit : « Soyez fécond ». Puis tu as établi l’humain pour cultiver le sol et le garder. Seigneur, tu nous donnes la responsabilité de prendre soin de la terre, de l’environnement et de tous les êtres vivants. Aujourd’hui nous te prions pour les terres souillées au nom du profit, pour l’air pollué au nom du rendement, et pour les humains abusés et sous l’emprise de multinationales suisses à l’étranger.
Nous te prions pour te demander d’ouvrir un nouveau chemin afin que toute Vie puisse vivre et s’épanouir partout dans le monde.
Mon Dieu, aujourd’hui nous te prions pour ces actionnaires, ces entrepreneurs, ces manageurs et autres dirigeants qui mesurent et qui ne mesurent pas leurs actes, afin qu’ils ouvrent les yeux et puissent accueillir la bienveillance de nouvelles réglementations.
Oh Seigneur, oui aujourd’hui nous te prions pour toute la population suisse. Tout comme il est bon d’avoir des règles de circulation pour ne pas nous laisser griser par le sentiment de puissance en roulant vite, donne à notre peuple la sagesse de voir le bien-fondé d’établir des règles contraignantes pour les multinationales suisses à l’étranger.
Aide-nous Père à prévenir les multinationales de l’aveuglement du profit tout comme il est nécessaire de prévenir le routard grisé par la vitesse.
Tu nous appelles tous, Seigneur, à prendre soin de la terre et de la Vie, chacun selon sa responsabilité. Donne-nous de discerner quelle est la nôtre et de la manière de prendre soin de ta Création avec amour et bienveillance aussi bien en Suisse qu’ailleurs.
Seigneur donne à notre pays le chemin vers des multinationales responsables et respectueuses.
Nous portons aussi dans la prière les personnes qui souffrent à travers ce monde. Nous pensons tout particulièrement aux Libanais de Beyrouth, qui se trouvent meurtris une nouvelle fois, aux personnes déplacées en raison de la guerre, des maladies, de la faim et du climat, à tous les pays endeuillés par le Coronavirus.
Puisses-tu les accompagner et les soutenir, toi qui es présent sur tous nos chemins.
Amen
Envoi
Allons dans le monde, vivifiés par la Source des sources, et qu’ainsi, demain soit pour nous rafraîchissant comme l’ondée des nouveaux jours. Enfin, comme à chacune de ces aubes, que nous puissions être une lumière attendue pour notre prochain.
Bénédiction
Que notre Dieu nous entoure de son inaltérable affection.
Qu’il nous aide à porter les responsabilités
qu’il a confiées à l’humanité et à chacune et à chacun de nous.
Qu’il nous permette sans cesse de discerner au-delà de notre propre regard.
Qu’il nous bénisse, Lui qui est Père, Fils et Saint-Esprit.
Amen.