De Paul à moi qui passe l’épaule !

Culte du dimanche 4 février 2024 à Môtiers

C’est mon dernier culte qui clôt mon temps de remplacement dans la paroisse

Nous sommes deux pour la prédication ; Véronique méditera l’Evangile du jour

Texte biblique : 1 Corinthiens 9,16-19,22-23

De René Perret

Je commence avec une remarque personnelle : ce culte, je le vois comme un culte de remerciements et non un culte d’adieu (d’ailleurs quelqu’un a dit : « Mais on lui a déjà dit adieu, en 2019 ! »).

Des remerciements pour mon temps de remplacement, qui s’achève aujourd’hui ; et mes remerciements pour votre accueil, votre confiance et votre soutien qui m’ont touché. Des remerciements à l’Eglise, à Dieu aussi, évidemment, pour avoir pu vivre ces mois avec vous.

Et j’aime que Véronique ait accepté de célébrer ce culte avec moi. Car c’est à mes yeux comme un passage de témoin : elle revient de son congé sabbatique, et je retourne à mon état de retraité, béat !

Méditant le texte de Paul aux Corinthiens, j’en retiens deux éléments.

Premièrement, quand il dit : « Annoncer la Bonne Nouvelle, je ne peux pas faire autrement ! »

Lui qui a été persécuteur des premiers chrétiens, Jésus l’a trouvé et il l’a converti à l’Evangile. Habité par cette foi, il se comprend maintenant comme appelé depuis toujours à être témoin du Christ.

Personnellement, après avoir choisi d’être pasteur plutôt que traducteur, parce que je vivais dans un groupe de jeunes chrétiens où les questions essentielles de la vie me passionnaient, j’ai progressivement mesuré à quel point ce métier était un cadeau pour moi : j’étais constamment en relation avec toutes sortes de gens, et confrontés à l’essentiel dans ce que nous vivons : la santé et la maladie, la vie et la mort, le bonheur et l’injustice du malheur, etc. Ce qui fait que je peux dire aujourd’hui que je ne vois pas ce que j’aurais pu faire autrement qu’être témoin de l’Evangile, revêtu de la confiance de Dieu et de l’Eglise.

Frère jumeau de Thomas, je continue ma recherche de Dieu et de comment le vivre et le partager. Mon doute persistant est comparable à celui d’un chercheur honnête ; il sait qu’il ne comprendra pas tout, qu’il n’aura pas réponse à tout. Mais ce qu’il a vécu et reçu lui suffit pour aimer continuer ce chemin de vie.

Et vous, quelle est votre vocation ? À qui ne le sait pas précisément, j’ai trouvé inspirante cette réponse d’un Père du désert à qui cherchait ce qu’il devait faire :

« L’Ecriture dit qu’Abraham était hospitalier et que Dieu était avec lui, qu’Elie aimait la retraite et que Dieu était avec lui, que David était humble et que Dieu était avec lui. Donc, ce que tu vois que ton âme désire devant Dieu, fais-le et garde ton cœur. »

Le deuxième élément du texte de Paul, le voici : « J’ai voulu devenir le serviteur de tous, pour gagner le plus de gens possible. »

En cela – devenir le serviteur de tous – Paul ne fait qu’imiter Jésus qui, le premier et tout au long de son ministère, a été le serviteur de tous. Sa façon de se mettre à hauteur de qui il rencontrait est pour nous une source inépuisable d’inspiration, de gratitude et d’adoration ! Si nous listions toutes ces personnes avec qui Jésus a vécu une rencontre, un dialogue, ça nous donnerait une leçon de vie inépuisable.

Envers chacune et chacun, il écoute sans juger, il propose l’accueil ; il reconnait la valeur devant Dieu de chaque vie. Et en faisant ainsi, il permet à la confiance de s’établir chez son interlocutrice ; il incite à la confidence son interlocuteur ; il donne une envie de libération à tant de personnes empêtrées dans leur existence. 

Dans mon ministère, j’ai vécu ces moments où, au-delà des idées préconçues, un vrai dialogue s’établit, un partage profond est possible, un lien se renoue avec Dieu, avec la vie éclairée par Jésus. Ce sont des moments de grâce qui me bouleversent chaque fois.

Je sais que j’ai été un semeur, et humainement il m’est arrivé de regretter de ne pas voir la moisson. Mais c’est Dieu qui fait germer ; et donc, malgré la situation de notre Eglise, et des Eglises chrétiennes plus généralement, je continue de croire qu’il nous appartient de laisser à Dieu la conduite de l’Eglise et du monde.

Et qu’il nous appartient de rester serviteurs, à la façon de Jésus, envers toutes les personnes qui nous sont confiées. Avec les forces et l’intelligence que ne cesse de nous souffler l’Esprit Saint.

Amen.

Message N° 2 pour le culte d’adieu (bis !) de René Perret

A partir du texte de Marc 1, 29-39 :

De Véronique Tschanz Anderegg

Jésus guérit beaucoup de malades

29Ils quittèrent la synagogue et allèrent aussitôt à la maison de Simon et d’André, en compagnie de Jacques et Jean.

30La belle-mère de Simon était au lit, parce qu’elle avait de la fièvre ; dès que Jésus arriva, on lui parla d’elle.

31Il s’approcha d’elle, lui prit la main et la fit lever. La fièvre la quitta et elle se mit à les servir.

32Le soir, après le coucher du soleil, les gens transportèrent vers Jésus tous les malades et ceux qui étaient possédés d’un esprit mauvais.

33Toute la population de la ville était rassemblée devant la porte de la maison.

34Jésus guérit beaucoup de gens qui souffraient de toutes sortes de maladies et il chassa aussi beaucoup d’esprits mauvais. Il ne laissait pas parler les esprits mauvais, parce qu’ils savaient, eux, qui il était.

Jésus parcourt la Galilée

35Très tôt le lendemain, alors qu’il faisait encore nuit noire, Jésus se leva et sortit de la maison. Il s’en alla hors de la ville, dans un endroit isolé ; là, il se mit à prier.

36Simon et ses compagnons partirent à sa recherche ;

37quand ils le trouvèrent, ils lui dirent : « Tout le monde te cherche. »

38Mais Jésus leur dit : « Allons ailleurs, dans les villages voisins. Je dois prêcher là-bas aussi, car c’est pour cela que je suis venu. »

39Et ainsi, il alla dans toute la Galilée ; il prêchait dans les synagogues de la région et il chassait les esprits mauvais.

Message

« Vite… préparer le déjeuner. Ne pas oublier de signer le carnet et de mettre le pique-nique dans le sac pour la course d’école. Et aussitôt, partir au colloque, sans oublier d’aller acheter les croissants ! Retour à la maison. Préparation du repas. Téléphoner au vétérinaire pour prendre rendez-vous. Après la cuisine rangée, départ pour une visite à domicile, en pensant à avertir le secrétariat pour la location du beamer. Une séance KT pour conclure la journée. Retour à la maison en passant par la gare pour récupérer les enfants de la course d’école : finir les devoirs, anticiper le repas du lendemain, et ne pas oublier de prendre des nouvelles de la voisine malade. Encore quelques rangements avant d’aller se coucher. Ouf ! La journée est finie ! »

Voici le résumé d’une journée banale pour une ménagère lambda en charge de famille ! Je vous raconte ceci parce que le récit dans l’Évangile de Marc m’a fait penser à une grosse journée pour Jésus, dans la vitesse et l’accumulation !

D’ailleurs, ce texte se veut être un inventaire en accéléré de la mission du Christ. Les différents éléments de ses rôles seront étoffés tout au long de l’Évangile.

En parlant de mission, quelle est la nôtre ? Car nous en avons toutes, tous une ! Chacun de nous cherche le but de son existence et comment la remplir au plus proche de qui nous sommes.

Je ne sais pas pour vous, mais c’est parfois difficile de discerner notre mission, le quand, le quoi, le comment !

Comme les disciples qui cherchent Jésus, nous aussi nous sommes appelés à chercher…  chercher nos liens à Jésus, chercher comment le servir, chercher notre place dans ce vaste monde !

Dans le passage de l’Évangile que nous venons d’entendre, Jésus nous offre une première piste pour effectuer ce travail de discernement : il prend une pause pour prier et pour être au plus près de ce que Dieu attend de lui, pour se trouver au bon endroit au bon moment.

J’aime beaucoup la façon dont Eric Emmanuel Schmitt décrit ce temps dans son ouvrage « L’Evangile selon Pilate ». Je le cite : » Je (c’est Jésus qui parle) descends en moi, au plus profond, j’y trouve un puits de lumière ; à l’intérieur de moi, je trouve. Plus que moi, un fondement qui me dépasse et qui me constitue, un tout inconnu d’où part toute connaissance, un Père dont je suis le Fils ».

Avons-nous toujours cette sagesse de faire une pause, de prendre le temps de ralentir le rythme effréné de nos activités, de descendre en nous jusqu’au puits de lumière ? Pas sûr…

La deuxième piste que je perçois, c’est que dans notre recherche, nous oublions de voir que finalement, c’est Jésus qui nous trouve, c’est lui qui nous met debout (à l’image de la belle-mère de Pierre).

Il nous trouve, mais pas toujours comme nous l’avions pensé, imaginé ou espéré. Nous avons dès lors besoin de lâcher prise, d’ouvrir notre regard et de nous laisser emporter dans des endroits pas toujours agréables, voire franchement désagréables !

Il nous trouve et nous met en route pour la mission qui est la nôtre. Il n’est aucune sotte mission !

J’aimerais vous dire que mon voyage « Sur les traces des Huguenots » m’a éclairé sur la suite de ma mission et que je sais exactement ce que je dois faire… mais ça n’est pas aussi facile ! Ce ne sont pas simplement des cases à remplir !

Néanmoins, lors de mon voyage, j’ai découvert une richesse que je connaissais peu. Pour vous aider à deviner quelle est cette richesse, je vous ai amené mon nouvel animal fétiche : ESCARGOT !

Eh ! oui ! J’ai découvert le trésor de la lenteur. Dans ce monde hyper connecté, où la vitesse est le maître mot, j’ai ressenti les bienfaits de la temporisation.

Alors peut-être que ma mission va dans ce sens : faire et vivre l’éloge de la lenteur !

Vous y verrez peut-être là une tâche futile, inutile, bien au-delà des problèmes sociaux, paroissiaux et mondiaux qui nous entourent !

Je vous avoue que cette mission ne fait pas partie de mes élans naturels ! Je dois l’apprivoiser, me confronter à elle, reconnaître qu’elle a du sens et de la valeur.

Car elle en a de la valeur : la lenteur permet de mieux être disponible à l’instant présent, à celles et ceux que nous rencontrons ; la lenteur nous aide à moins « papillonner » d’une activité à l’autre !

La lenteur nous donne l’opportunité de rester en lien avec nos émotions, nos instincts. Elle nous offre la joie de la contemplation. Elle nous procure le bonheur de la découverte du « puits de lumière » dont parle Eric E. Schmitt.

Et paradoxalement, la lenteur nous met en marche et nous laisse entrer dans la part d’inattendu, d’imprévisible dont Dieu a le secret.

J’ai un bon professeur de la lenteur : mon chien Sugus ! Mais ne croyez pas que je ne suis pas parfois agacée par sa lenteur ! Et ne rêvez pas, vous me verrez encore courir pour prendre mon train !

Mais je vais faire de mon mieux pour offrir à celles et ceux que je croiserai sur mon chemin les bienfaits de la lenteur et ainsi accomplir un bout de la mission que Dieu me destine.

Amen