Une équipe à l’esprit ouvert et inclusif – prédication des 25-26 septembre 2021

Prédication de David Allisson – lien pour ouvrir le fichier pdf

Image par falco de Pixabay 


Culte des 25-26 septembre 2021

Couvet et La Côte-aux-Fées

Temps de L’Église 26e dim.

Lecture de la Bible

Nombres 11,25-29
Marc 9,38-48

Prédication

de David Allisson

« Celui qui vous donnera à boire un verre d’eau parce que vous appartenez au Christ, je vous le déclare, c’est la vérité : il ne restera pas sans récompense. » Mc 9,41

Un verre d’eau, une petite offrande, une participation modeste à la contribution ecclésiastique, un coup de main ou autre service. Même venant de distancés, même si les personnes concernées semblent manifester peu d’intérêt à la paroisse, c’est à cause du Christ que ces gestes ont lieu. 

Ce n’est qu’un verre d’eau. Ce n’est qu’une petite participation, mais c’est déjà un acte de foi, une confession qui dit une confiance : vous, vous êtes aussi reconnus comme « appartenant au Christ », comme chrétien engagé, et celui qui donne exprime, en vous donnant, son attachement.

Il y a celui qui donne. Il y a celui qui reçoit. Les deux le font au nom de Jésus, par attachement au Christ.

L’un a besoin de l’autre pour être reconnu dans ce lien au Christ. On n’est pas chrétien tout seul. L’attention à l’autre et la reconnaissance réciproque font partie de l’engagement de foi. De la même manière, la confession de foi que nous avons dite ensemble tout à l’heure nous met en lien – en reconnaissance réciproque – avec tous les chrétiens de l’histoire et avec les chrétiens de toutes les langues qui disent la même confiance.

Chers amis, je suis troublé par l’Evangile d’aujourd’hui.

Ce n’est pas tellement par les images un peu sanglantes et dures qu’il y a dans la deuxième partie du texte. J’ai déjà vu ce genre d’images dans les séries que j’aime regarder.

C’est plutôt sur la manière de regarder l’Église ou la communauté que je me sens troublé.

Voyons un peu.

Vous connaissez cette image des sports d’équipe où les membres du groupe se rassemblent au début du match ou juste avant la compétition. Ils sont en cercle. Ils se tiennent les uns les autres par les épaules. L’un d’entre eux prononce des paroles pour motiver le groupe et cela finit par le cri de l’équipe accompagné ou non d’un geste. Les visages sont concentrés, déterminés. Ils se font face les uns les autres. 

Ceux qui sont hors du cercle sont exclus. Ils n’ont pas d’importance. Et au milieu du cercle, qu’est-ce qu’il y a ? Rien. Il y a en fait l’espoir et la détermination d’atteindre l’objectif. Si l’équipe s’apprête à jouer la finale, certains participants y voient peut-être l’image du trophée qu’ils veulent remporter.

Le reste du monde est à l’extérieur, dans le dos.

L’objectif est encore à atteindre.

C’est un cercle comme celui-là que Jean et le groupe des Douze a essayé de former en venant raconter à Jésus qu’ils avaient voulu empêcher d’agir un homme qui chassait les esprits mauvais au nom de Jésus.

Et Jésus casse le cercle. Jésus casse le cercle pour prendre sa place au centre. La communauté qui se forme autour de Jésus n’est pas une communauté qui se définit à l’exclusion des autres, de ceux qui n’en font pas partie. La communauté que Jésus est en train de construire se constitue avec. Elle se constitue en incluant celles et ceux qui ne s’opposent pas : « Car celui n’est pas contre nous est pour nous. »

Pour l’instant, il y a surtout une bonne nouvelle : la communauté de l’Église est constituée autour de et par Jésus, le Christ. Toutes celles et tous ceux qui s’intéressent à lui y ont leur place. Toutes celles et tous ceux qui agissent en son nom y ont leur place. Toutes celles et tous ceux qui n’ont rien contre lui y ont leur place. Toutes celles et tous ceux qui se sentent attachés d’une manière ou d’une autre à Jésus y ont leur place.

Celle ou celui qui consacre sa vie à l’étude de la Bible et à ce que cela peut impliquer dans son existence y a sa place.

Celle ou celui qui a entendu parler de Jésus et qui s’y intéresse d’un peu loin et plein de confiance y a sa place.

Jésus fait éclater le cercle. Les participants n’y sont plus épaule contre épaule pour fermer l’accès à ceux qui ne sont pas invités. Les participants sont les uns avec les autres, avec une main en direction de Jésus qui est au centre et avec l’autre main libre pour inviter à s’approcher celles et ceux qui viendraient à passer par là.

Le trouble que je ressens est celui-ci : 

Dans mes manques de toutes sortes je me sens pleinement accueilli et je sens un attachement fort au Christ.

D’un autre côté, l’EREN, ou la paroisse, dans ses réflexions de ces dernières années a plusieurs fois posé la question des engagements qu’implique le fait d’être membre : témoigner de sa foi, participer à la vie de l’Église, contribuer aux finances de l’Église.

Va-t-on facturer les services de l’Église à ceux qui n’y contribuent pas financièrement ? Faut-il maintenir une structure qui permette d’accueillir tout un chacun dans les activités d’Église sans vérifier qu’il ou elle tient bien ses engagements de membre ? Comment valoriser le statut de membre de l’Église ? Nous nous sommes posés toutes ces questions et nous y avons répondu avec plus ou moins de bonheur et de précision. Je suis troublé parce que j’ai le sentiment que je risque d’être comme Jean et les disciples en train de définir le groupe par les participants plutôt que par l’attachement au Christ qui en est le centre.

Ce trouble est bien naturel et compréhensible. Il n’y a que l’installation définitive du Royaume des cieux qui pourra le résoudre définitivement. En effet, nous vivons ensemble cet attachement au Christ qui nous est donné sans condition, qui ouvre un espace qui nous permet de nous sentir inclus dans le rayonnement de la présence de Dieu. Et en même temps, l’église s’organise avec ses forces humaines pour vivre cette rencontre qui dépasse complètement notre compréhension.

Il y a une tension entre d’un côté l’église comprise comme le cercle des adhérents actifs et cotisants qui font vivre l’église et qui ont droit à ses prestations et de l’autre côté l’église qui reconnaît comme les siens toutes celles et tous ceux qui s’intéressent à vivre une forme d’attachement au Christ que cela soit sur le vif de manière spontanée ou de façon patiemment construite et élaborée.

C’est une tension qui est bien présente dans toutes les églises chrétiennes, quel que soit leur mode d’organisation ou leur reconnaissance publique. Dans chacune, une dimension d’ouverture et de lien à l’Évangile se joue avec, et parfois contre, la manière de s’organiser pour rechercher ensemble l’attachement au Christ.

La menace pour la communauté de l’Église, ce n’est pas que des personnes non autorisées agissent au nom du Christ. C’est plutôt que, voulant contrôler qui est de notre groupe et qui ne l’est pas, nous fassions tomber un de ces petits qui croient en Christ. En cherchant le contrôle de cette façon-là, nous continuerions de penser que notre groupe est fort, épaule contre épaule, tous tournés vers l’intérieur du cercle. Apercevons-nous que Jésus, le Christ, autour de qui notre confiance se crée, ne se trouve plus au centre du cercle, mais juste à côté, avec un geste d’ouverture et d’accueil. Il nous invite à reformer une ronde ouverte et accueillante dans une nouvelle direction.

Vous appartenez au Christ.

Ensemble, nous appartenons au Christ.

Gardons cette ouverture à celles et ceux qui viennent à Christ pour y rencontrer le Royaume de la présence de Dieu.

Amen.