3 audaces – prédication des 24-25 octobre 2020

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24-25 oct. 2020 – Môtiers et Les Verrières

Ouverture

Le Seigneur est déjà là quand nous entrons.

Le Seigneur est avec nous quand nous avançons.

Le Seigneur reste avec ceux que nous avons laissé derrière nous.

Il nous accueille pour ce temps de recueillement, de prière, de chant et de rencontre.

Dans ce culte, je nous inviterai à l’audace. Parce que nous vivons avec le Christ, nous sommes envoyés. Cela peut être là où nous sommes ou plus loin. Nous sommes tous concernés. Nous sommes tous appelés.

Psaume 9,2.10-15

Lecture de la Bible

Exode 17,8-13
2 Timothée 4,1-8
Luc 12,8-12

Prédication de David Allisson

Vous avez peut-être déjà pensé ceci :

Je n’ose plus écouter, lire ou regarder les infos : il n’y a que des mauvaises nouvelles dans ce monde. C’est trop déprimant, je préfère fermer le journal et éteindre le poste.

Oui…

Je suis d’accord pour ce qui est des infos relayées par les médias. Vous pouvez vous dire ce genre de choses. Mais vous êtes là aujourd’hui et un des médias les plus importants, c’est vous-mêmes. Vous venez au culte entendre une Bonne Nouvelle. Du moins, cela devrait être le cas, puisque c’est le sens du mot Evangile, celui que nous entendons quand nous nous rassemblons pour le culte.

Alors, qu’est-ce qui vous empêche d’approfondir et de faire fructifier cet héritage en le partageant autour de vous ?

Vous verrez, entretenir l’héritage et partager la Bonne Nouvelle qui en est la partie principale, c’est une des audaces auxquelles nous sommes appelés aujourd’hui.

(…)

Je suis sûr que vous avez déjà réfléchi à la question de la place de l’Eglise dans notre société.

Les textes bibliques qui viennent de nous être lus peuvent tous nous y faire réfléchir et je choisis comme porte d’entrée celui de la deuxième lettre à Timothée.

Cette lettre fait partie des épîtres dites « pastorales » avec la première à Timothée et la lettre à Tite. Paul, ou l’un de ses héritiers dans la mission de proclamer la Bonne Nouvelle qu’est l’Evangile, s’adresse aux futurs responsables de la communauté chrétienne. Ils veulent organiser l’Eglise, maintenant qu’il semble que la venue du Christ en gloire tarde. Ces trois lettres forment comme un groupe dans le Nouveau Testament. Elles donnent des directives aux responsables de l’Eglise qui est en train de se mettre en place. Voilà pourquoi elles sont appelées de ce nom général de « pastorales ». Elles veulent interpeller les pasteurs. (…)

Même si vous n’êtes pas pasteur, continuez d’écouter ! Je relis le dernier verset du passage : Le prix de la victoire m’attend : c’est la couronne du salut que le Seigneur, le juste juge, me donnera au jour du Jugement – et pas seulement à moi, mais à tous ceux qui attendent avec amour le moment où il apparaîtra –. 2Tm 4,8

Pas seulement le pasteur, mais tous ceux qui vivent de l’amour du Christ. Voilà. Maintenant que vous y êtes aussi, je peux continuer.

La lettre est adressée à Timothée qui va prendre la responsabilité de l’Eglise et par lui à toutes celles et ceux qui s’engagent dans une relation vivante au Christ. Alors, en écoutant ce qui lui est écrit, comment va-t-on situer l’Eglise dans la société d’aujourd’hui ?

Timothée est appelé à trois audaces, et l’Eglise aussi avec lui :

Oser reprendre l’héritage.

Oser s’engager intensément.

Oser résister durablement.

(…)

Oser reprendre l’héritage.

Ces audaces sont aussi celles que l’Eglise doit assumer aujourd’hui. Et vous sentez bien qu’il faudra que tout le monde participe. Pour vaincre les Amalécites, cela n’a pas suffi d’envoyer le pasteur Moïse diriger les opérations. Ils ont dû se mettre à deux pour l’aider à brandir le bâton en un geste qui allait donner la victoire à son peuple.

Jésus envoie tous ses disciples, même s’ils ont l’impression qu’ils ne trouveront pas les mots, comme de nombreux prophètes au moment d’être envoyés. C’est le complexe d’Elie et des prophètes dont Marion Muller-Colard a fait le titre d’un livre récent : le prophète est choisi justement parce qu’il n’a rien de plus que les autres et qu’il se sent à côté de la plaque. Il est choisi justement parce qu’il se dit « je ne veux pas y aller, la tâche n’est pas pour moi. Il faut quelqu’un de plus compétent ou de mieux instruit que moi. »

Eh, bien ! Non ! C’est Moïse que Dieu a choisi, C’est Jonas qu’il a rappelé alors que celui-là voulait s’enfuir dans la direction opposée, c’est Paul qu’il a envoyé avec son écharde dans la chair, ses mots maladroits et son sale caractère, c’est cette équipe de bras cassés que formaient ses disciples que Jésus a envoyés.

Alors pourquoi pas vous et moi en fin de compte ?

Quand nous nous retrouvons, nous le petit nombre, nous voyons bien qu’il faut faire quelque chose. Jésus a rencontré les enfants, les femmes et les hommes de son temps et leur a ouvert des perspectives de vie qu’ils n’imaginaient plus. Ils étaient enfermés dans les lois religieuses, sociales, politiques. Jésus a su s’adresser aux uns et aux autres pour leur révéler une vie qui a du sens, une vie ouverte à différents possibles, une vie placée sous le signe de l’amour.

Jésus a souffert sous Ponce Pilate, il a été crucifié, il est mort, il a été enterré et le troisième jour de sa mort, il est ressuscité. Il est ressuscité, cela veut dire que cette vie dont l’avenir est ouvert est encore possible, parce que le destin tragique qu’a connu Jésus n’est pas la fin de tout, mais au contraire marque l’ouverture à cette vie toujours possible.

Et c’est exactement ça, l’Evangile, la Bonne Nouvelle : on ne peut pas tuer la vie, parce que c’est la mort que Jésus a tuée.

L’Eglise trouve sa place dans notre société quand les chrétiens, celles et ceux qui vivent de l’amour du Christ répondent à l’envoi qui leur est adressé.

Voilà l’héritage qu’il vous faut oser reprendre, partager et faire fructifier. Cette vie qui vous nourrit, elle va nourrir d’autres personnes. Dans le texte de l’épître, Paul arrive au bout de sa course. D’autres vont prendre le relais : « L’avenir est entre tes mains, moi j’ai terminé mais la course de l’Evangile continue… » – Osons reprendre l’héritage.

Oser s’engager intensément.

En lisant 2 Timothée, on peut penser que Paul met la pression : Je te le demande solennellement (…) : prêche la parole de Dieu avec insistance, à temps et à contretemps ; sois persuasif, adresse des reproches ou des encouragements, en enseignant avec une patience parfaite. (2Tm 4,1-2)

Remplis ton ministère.

Remplis ta vie.

Oui, il y du travail et de quoi nous rendre hyperactif au point de perdre le sens de ce que nous faisons. On le dit parfois à propos de la médecine actuelle : les progrès médicaux ont permis d’ajouter des années à la vie et maintenant nous cherchons comment ajouter de la vie aux années. Il faut que ces années à vivre permettent un sens à ce qui est vécu.

Plutôt que de remplir notre emploi du temps avec ce qui est demandé ici, il s’agit de donner un véritable contenu à notre engagement.

Et si cela commençait  par la redécouverte du lien de personne à personne avec le Christ ? Etre engagé dans l’Eglise n’implique pas un savoir : cela peut facilement être remplacé par les légendes dont parle la lettre (2Tm 4,4). Etre engagé dans l’Eglise n’implique pas un savoir-faire : il y a déjà toutes sortes de paroles agréables à entendre qui circulent dans notre monde et déjà à l’époque du Nouveau Testament.

Etre engagé dans l’Eglise, c’est d’abord un « vivre avec le Christ ». Et là réside l’enjeu d’une réalité de l’Eglise, à toutes les époques. Vivons avec le Christ et discutons de ce que cela nous fait – osons nous engager intensément.

Oser résister durablement.

De nos jours et dans notre contexte de société, nous voyons bien que l’Eglise comme telle n’a plus la cote. Il faut aller à contre courant pour relever les éléments importants de cette Bonne Nouvelle qui fait vivre les chrétiens. Et cela coûte des efforts et un engagement sur le long terme.

Le temps viendra où les gens ne voudront plus écouter le véritable enseignement, mais ils suivront leur propres désirs et s’entoureront d’une foule de maîtres qui leur diront ce qu’ils aiment entendre. (2Tm 4,3)

Le temps de la résistance est aussi à comprendre comme une résistance contre nous-mêmes. Nous aimons nos temples, nos salles de paroisses et nos cures, mais notre mission n’est pas de préserver cela, ni non plus une pureté de doctrine pour laquelle nous serions prêts à mourir ou à tuer.

Je te le demande solennellement devant Dieu et devant Jésus Christ, qui jugera les vivants et les morts, je te le demande au nom de la venue du Christ et de son Royaume : prêche la parole de Dieu avec insistance, que l’occasion soit favorable ou non ; sois persuasif, adresse des reproches ou des encouragements, en enseignant avec une patience parfaite. (2Tm 4,1-2)

Peut-être que nous devrons renoncer à un certain nombre de temples un jour. Peut-être que nous n’aurons plus autant de salles de paroisse à disposition pour nos réunions. Ce n’est pas grave, parce que c’est la vie en Christ qui doit être favorisée. L’autre jour, je parlais avec une jeune femme qui me disait qu’elle est chrétienne et qu’en même temps elle n’aime pas en parler comme d’une appartenance. Pour elle, parler d’appartenance, c’est créer des exclusions. Il y a ceux qui en sont et il y a ceux qui n’en sont pas. Son engagement chrétien est inclusif dans le sens où elle se reconnaît fille de Dieu et tous les humains sont enfants de Dieu. Ce n’est pas à elle de définir les appartenances et les exclusions.

Vivre l’Eglise comme ça, c’est entrer en résistance par rapport aux besoins actuels d’identifier les bons et les méchants, les vrais réfugiés des faux, les travailleurs indigènes ou les étrangers, les travailleurs locaux et les frontaliers, etc.

Jésus a quitté ses disciples qui ont dû organiser leur vie et leur espérance en son absence.

Paul est l’un des successeurs. Lui-même s’apprête à se retirer, c’est ce que nous lisons dans la deuxième lettre à Timothée. Timothée à son tour va organiser sa vie et son espérance en l’absence de Paul.

Entrons nous aussi dans cette persévérance et dans cette résistance. Vivons aujourd’hui notre relation avec le Christ dans les dimensions de la vie, de l’espérance et de l’ouverture. Osons résister durablement.

J’ai combattu le bon combat, je suis allé au bout de la course, j’ai gardé la foi. (2Tm4,7)

Cette phrase est parfois citée sur des faire-part de deuil.

Elle est d’abord appelée à affermir le courage, la persévérance et l’audace des vivants que nous sommes.

Peu importent les contrariétés, nos sentiments de faiblesses, nos complexes ou notre manque de volonté. Jésus a envoyé ses disciples en leur demandant de ne pas se faire de souci pour les mots qu’ils auront à prononcer. Ils savaient bien que la relation au Christ les rendait vivants et ouverts. C’est de cette vie qu’ils auraient à témoigner. Qu’il en soit de même pour nous. Nous venons nous nourrir de la Bonne Nouvelle qu’est l’Evangile. Nous propagerons cette Bonnes Nouvelle autour de nous et d’autres la recevront, se l’approprieront et la transmettront à leur tour. Et ce n’est pas grave si ce n’est pas exactement de la même manière que nous. 

Eux aussi auront ces trois audaces :

Oser reprendre l’héritage.

Oser s’engager intensément.

Oser résister durablement.

Allons-y pour eux et avec eux. Le Saint-Esprit vous enseignera ce que vous devez exprimer.(Luc 12,12) Quiconque reconnaît publiquement qu’il est mon disciple, dit Jésus, le Fils de l’homme aussi reconnaîtra devant les anges de Dieu qu’il est à lui. (Luc 12,8)

Le Saint-Esprit vous enseignera ce que vous devez exprimer.

Amen.