Prédication de Zachée Betche – 4 août 2024 – Collégiale de Neuchâtel
Texte : 1 Rois 17, 1-7
Ni rosée, ni pluie. Cela semble de toute évidence fort insupportable. Car il voudrait simplement traduire une famine dans des localités déjà éprouvées par la rudesse du climat. Il n’y aura ni à manger ni à boire. Qui nierait l’importance et la nécessité de pouvoir s’alimenter dans la vie d’un être humain, d’un être vivant tout court ? Le spectre de ce qui est le plus redouté plane : la mort est à l’horizon.
Chers amis, l’histoire d’Elie nous rappelle l’itinéraire d’un homme solitaire, un prophète qui vit des situations contrastées. Confronté à ce 7e roi d’Israël, Achab, Elie doit être dans son rôle prophétique. Annoncer une nouvelle difficile qui s’apparente à un jugement n’est pas une tâche quelconque surtout lorsque l’usage de la violence n’est pas impossible. Achab a choisi la facilité en prêtant allégeance à Baal, dieu étranger, symbole de la réussite exubérante et du confort apparent par excellence, summum de l’idolâtrie. Mais telle désobéissance au Dieu d’Israël, au vrai Dieu, va provoquer cette colère dont Elie est chargé d’annoncer les conséquences.
Toute famine est en soi une anomalie dans la vie d’un peuple. La famine n’est pas dans le plan initial de Dieu. Lui qui nous prépare à une vie en abondance, qui destine à son peuple un pays où coulent le lait et le miel. Dieu n’est pas un Dieu de misère mais de la vie abondante (Jn 10, 10). Cela n’a l’air de rien mais chaque jour qui passe devrait être un hymne consacré à ce Dieu pour la vie qu’il ne cesse de nous gratifier.
Lorsque nous rendons grâce à Dieu avant chaque repas, nous nous souvenons de ce que nous ne sommes pas abandonnés. Le Seigneur ne nous a-t-il pas aimés ! Chaque soleil qui se lève, chaque table dressée, ne sont-ce pas là des miracles au quotidien ? Habitués au train qui arrive à l’heure, nous ne saurions vraiment y croire. Or, imaginez que tout vienne à s’arrêter, que la situation devienne totalement incontrôlable comme lors des grandes inondations, des avalanches impossibles, des voies de communication coupées… A la vérité, rien ne doit être pris pour acquis. Rien n’est jamais évidence. Nous sommes peu de chose, pour finir, et tout est grâce.
Peut-être ne sommes-nous pas dans un désert et que la spectre de la famine nous est étranger. Mais la vie au quotidien n’est-elle pas par moment semblable à un désert. De quoi nous nourrissons-nous en réalité ? Sans se faire peur, l’industrie à outrance nous affame quelquefois par la qualité des produits et pour nombre de nos familles, accéder à la qualité est un luxe inatteignable. L’évangile peut-il véritablement y répondre ? Il faut revenir à la simplicité et se tourner sans cesse vers le créateur qui octroie l’intelligence nécessaire. Dieu qui sait nous faire vivre dans l’abondance comme dans la disette prend soin de nous. Cela passe par cette dépendance et cette confiance en lui. Posons-nous cette question : le torrent était-il inconnu du roi Achab, lui qui était roi ? Mais seul Elie se trouvait là, au bon endroit. L’obéissance à Dieu ouvre la voie d’un chemin singulier.
Dans ce contexte d’austérité, le clin d’œil de Dieu se fait montre. Rien ne lui manquera. Elie entend la promesse de Dieu et l’accueille fermement. Cette attitude paraît déraisonnable mais c’est bien la caractéristique de la foi-confiance. Lorsque l’horizon s’assombrit et que rien ne semble possible, être à l’écoute de Dieu ouvre les voies les plus insoupçonnées. Il ne s’agit pas simplement de croire mais de croire au Dieu de la vie, au Dieu vivant qui sait nous trouver dans nos recoins.
Dans l’incroyable histoire d’Elie, l’austérité succédera à ce moment de tranquillité. Car « au bout d’un certain temps le torrent fut à sec ». Ce passage en annonce un autre, celui de la rencontre avec la veuve de Sarepta. Et même là, même dans cette situation doublement chaotique, Elie tirera son épingle du jeu du fait de sa dépendance à Dieu. C’est la seule explication qui lui fait échapper à cette famine ambiante. Pour Elie, Dieu reste le même dans les temps ordinaires comme dans les temps improbables. Pour lui, le Dieu de la Genèse reste d’actualité. Il crée le monde à partir de rien. Nous qui croyons en lui devrions nous le rappeler souvent. Il s’agit pour nous de dépendre de celui qui crée plutôt que de ce que nous semblons posséder ou maîtriser. Lorsque tout tend à s’envoler, tous nos acquis prennent la clé des champs. Souvenons-nous alors que Dieu n’est ni lointain ni sourd à nos situations.
Frères et sœurs, Sachons voir la main de Dieu dans nos vies et ne cédons pas à l’incurie, aux facilités des Baal d’aujourd’hui prompts à nous vendre le rêve. Ils sont si nombreux et nous promettent monts et merveilles à travers la publicité intempestive et faussement providentielle. Aujourd’hui, la parole de Jésus nous rejoint dans ce questionnement essentiel. Nous n’avons rien à craindre. Il est venu parmi nous. Il est parmi nous et il est vie, vie impérissable, vie abondante selon l’horizon divin. Sachons la vivre et la savourer de toutes nos forces. Ouvrons-nous à la joie de vivre qui est là devant nous, dans ces liens communautaires où la joie se manifeste, dans notre marche croyante pleine d’espérance. Oui Dieu fait pour nous chaque jour des miracles. Il nous as aimés et cet amour, au-delà des mots, est une réalité vivante. AMEN