Prédication de Constantin Bacha – 30 juin 2024 – Collégiale de Neuchâtel
Psaume 51 (extraits) – TOB
3Aie pitié de moi, mon Dieu, selon ta fidélité ; selon ta grande miséricorde, efface mes torts. 4Lave-moi sans cesse de ma faute et purifie-moi de mon péché. 5Car je reconnais mes torts, j’ai toujours mon péché devant moi. 6Contre toi, et toi seul, j’ai péché.
8Voici, tu aimes la vérité dans les ténèbres, dans ma nuit, tu me fais connaître la sagesse. 9Ote mon péché avec l’hysope, et je serai pur ; lave-moi, et je serai plus blanc que la neige.
12Crée pour moi un cœur pur, Seigneur ; enracine en moi un esprit tout neuf.
Matthieu 5,13 – TOB
13« Vous êtes le sel de la terre. Si le sel perd sa saveur, comment redeviendra-t-il du sel ? Il ne vaut plus rien ; on le jette dehors et il est foulé aux pieds par les hommes.
Prédication
« Les Repas dans la Bible ». Voilà le thème principal de nos cultes d’été, qui commencent aujourd’hui et se terminent le 18 août. Vous trouvez le programme des menus concocté pour cette série estivale sur un flyer et sur le site de la paroisse.
Aussi, après chaque culte, un apéro aura lieu dans le cloître pour partager et échanger.
En entrant dans cette belle Collégiale tout à l’heure, vous avez été accueillies dans le Grand Restaurant, celui du Royaume, avec une table bien garnie, et vous avez pu sentir la fragrance de quelques épices que nous évoquons dans notre méditation.
Au tout début de la Bible (Genèse 2,9) on parle d’un jardin plein d’arbres « d’aspect attrayant et bons à manger » (TOB).
C’est dire l’importance de la nourriture, indispensable pour notre vie.
Jésus a passé une grande partie de son temps à table, à discuter et à manger avec des gens de toute la société. Et il y a beaucoup de récits bibliques où l’on mange, en discutant et en partageant, et où il se passe quelque chose d’important.
Le repas touche à tous les sens. On regarde, on sent, on touche, on goûte, on écoute et on parle.
Autour de la table, il y a le plaisir de déguster les mets et la joie de lier d’amitié ; il y a reconnaissance pour les personnes qui ont préparé le repas et pour Celui dont nous recevons tout. Nous pouvons carrément parler de « spiritualité de la table ».
Ce matin, nous commençons notre série avec le titre « Des épices pour la vie »
Pour que la nourriture soit bonne et agréable à manger, il faut des ingrédients – ces petits rajouts aux éléments principaux – qui donnent goût au plat.
Depuis l’antiquité, les épices ont été convoitées et recherchées, où des fortunes ont été dépensées et de grands voyages entrepris. Cette recherche a donc contribué à la découvertes de territoires éloignés et en quelque sorte à la mondialisation, où les épices d’un continent étaient transportées vers un autre, faisant le bonheur de découvrir de nouveaux goûts et de nouvelles sensations.
Avec les épices, les plus humbles plats deviennent une explosion de saveurs, mettant les papilles gustatives en émoi. Aujourd’hui, dans ce Restaurant du Royaume, nous sommes conviés à un petit tour sur les riches variétés des saveurs bibliques.
Que notre vie ait du goût, qu’elle soit assaisonnée aux épices les plus variées :
- Le Cumin permet d’ouvrir l’appétit, selon Pline l’Ancien. Autrefois une épice des riches, le cumin servait de monnaie d’échange pour payer des dettes. Réputé faciliter la digestion, le cumin est essentiel à un plat de houmous, et certaines recettes de lentilles, poisson, et volaille. Il nous rappelle les richesses que Dieu met en nous et que rien ni personne ne peut nous enlever.
- La coriandre C’est une épice avec une puissante saveur aromatique que l’on cultivait dans les jardins de Babylone, une épice libératrice. Non seulement elle est douce, mais comme une manne, elle nous rappelle la nourriture que Dieu nous donne.
- La Menthe participe à l’équilibre digestif et améliore le tonus général. Grâce à son odeur rafraîchissante, la menthe est utilisée dans: thé / salades / sorbet / dentifrice / les chewing-gum … La menthe nous rappelle d’accepter le don de la vie que Dieu nous fait, d’accepter notre humanité, avec ses beautés et ses laideurs, de renouveler notre confiance en Dieu.
- La Cannelle (cinnamon) fût une épice très couteuse et précieuse, employée sur l’autel des parfums (Exode). On la fabrique avec l’écorce d’un arbre. Réputée stimuler la respiration, au dessert, le parfum de la cannelle donne à notre être toute sa saveur spirituelle. C’est aussi elle qui donne à la chaleur de l’amour son parfum d’éternité.
- La moutarde. Elle pique, donne à la salade toute sa saveur. Une grillade sans moutarde c’est chose impossible. Jésus compare la graine de moutarde au Royaume de Dieu. Insignifiante en soi, planté et devenant arbre, elle abrite les oiseaux du ciel. Cela nous dit l’importance que Dieu donne à chacune et chacun, qui pouvons témoigner de l’amour de Dieu en dépit de notre situation.
- L’hysope, une plante qui pousse dans les régions méditerranéennes. Elle soulage les voies respiratoires et la toux. On emploie l’hysope pour aromatiser des plats de viandes, et relever le goût des salades et des légumes. L’hysope a été employée par les hébreux pour marquer les portes des maisons avec du sang de l’agneau. Elle rappelle le salut de Dieu.
Dans le Ps 51,9, David s’adresse à Dieu : « 9Ote mon péché avec l’hysope, et je serai pur ; lave-moi, et je serai plus blanc que la neige. »
Dans ce Psaume, David revient sur l’épisode de sa vie où, pour s’approcher de Bethsabée, femme mariée, pour laquelle il est pris de passion et de désire, il envoie son mari sur le front du combat afin qu’il meure, pour finalement avoir sa femme.
En effet, la première phrase de ce Psaume est : « 1Du chef de chœur. Psaume de David. 2Quand le prophète Nathan alla chez lui, après que David fut allé chez Bethsabée »
Cette situation nous dit quelque chose de notre nature humaine: nous sommes rarement satisfaits de ce que nous avons, nous voulons toujours un peu plus. David, Roi d’Israël, puissant, avec tant de richesses, pour assouvir son envie, perd le goût du bonheur et la saveur de la vraie satisfaction.
Ce Psaume est une expression d’un cœur accablé par la honte, brisé par la culpabilité. Peut-être le plus difficile est de se pardonner soi-même. C’est ce qu’on ressent dans les parole du psalmiste.
Avec un cœur repentant, ayant le sentiment d’avoir agi contre Dieu, il plaide envers son Seigneur qui seul peut le sauver, le suppliant: « 9Ote mon péché avec l’hysope, et je serai pur. »
Dans le Restaurant du Royaume, la grâce de Dieu n’est jamais tarie, les ingrédients d’amour et de pardon ne sont jamais épuisés.
- Le Sel. Venons-en à cet ingrédient dont parle Jésus. Le sel est indispensable en cuisine. Il assaisonne les légumes et viandes, il en relève le goût, il en empêche la fadeur, il en prévient la corruption.
Jésus-Christ dit à ses disciples qu’ils sont le sel de la terre. Il le dit à nous également.
Puis il fait cette remarque étonnante: « Si le sel perd sa saveur, comment redeviendra-t-il du sel ? Il ne vaut plus rien ; on le jette dehors et il est foulé aux pieds par les hommes. »
Je ne sais pas s’il est possible que le sel perde sa saveur. En tout cas, plus il est dilué, et moins il donne du goût. Nous en avons toutes et tous fait l’expérience.
Les paroles de Jésus ici nous invitent à ne pas diluer le don de Dieu pour nous, le don de la vie de l’Esprit, ne pas diluer les saveurs qui font de nous ce que nous sommes, ni le goût délicat de l’Amour qui nous est offert, ni l’assaisonnement indispensable de la Grâce qui nous donne toujours une seconde chance.
Dans son Grand Livre de cuisine, Dieu parle de menus. Il veut nous offrir un repas, un festin afin que nous ayons une vie en plénitude.
La différence entre le Restaurant du Royaume et les autres, est que dans le premier nous apprenons à préparer les menus de nos vies pour leurs donner un sens. Nous sommes actrices et acteurs de notre propre histoire, avec l’aide du Grand Chef.
En effet, Dieu nous aime et nous apprécie, aime chacune de nos cartes de vie. Il les regarde avec tendresse et quelque fois peut-être avec perplexité. Mais il veut que nous ayons un bon goût.
Ainsi, nous pouvons considérer notre vie, comme un menu à apprêter, qui peut être délicieux, succulent.
Certes Dieu apprécie une vie bien épicée qui a du bon goût. Une vie dont les denrées de base sont bien choisies. Une vie magnifiée par les senteurs et les épices du soleil levant.
Mais le plus grand génie de Dieu c’est de mettre les pieds dans notre plat. Autrement dit de nous interpeller, nous bousculer ! En un mot, d’incorporer à notre menu le pain de vie et le vin de la joie du partage. Mais nous parlerons de la Cène lors d’un prochain culte dans cette série d’été.
« Vous êtes le sel de la terre. » Et nous sommes appelés à dire aux autres qu’ils sont aussi sel de la terre. Nous sommes invités à sortir de nos murs pour découvrir et apprécier nos frères et sœurs en humanité, qui cuisinent avec d’autres épices et avec d’autres ingrédients, ce qui enrichis le monde des dons de Dieu, offerts à toutes et tous, et qui dit l’importance de notre humanité, pour laquelle le Dieu de la vie a envoyé son Fils, afin que ses goûts ne se perdent ni ne se fadent. Amen