Message d’Yvena pour ce 5e dimanche de Carême (29 mars 2020)

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Jean 11, 1-45, 5ème dimanche de Carême

Yvena Garraud Thomas, pasteure

 

A Cana, Jésus change l’eau en vin. Ce fut le premier signe=miracle. Et voici le 7ème signe : Jésus ressuscite Lazare. Un miracle pétri de détails qui ne laisse pas indifférent. Chaque personne peut se situer et voir en quoi cette scène reflète une image qui l’implique.

En effet, « Les sœurs de Lazare envoyèrent dire à Jésus : « Seigneur, celui que tu aimes est malade ! ». Jésus ne s’est pas dépêché de partir. Marthe, Marie, des Juifs ont eu de la peine à concilier l’amour de Jésus pour son ami Lazare et son absence à son chevet. Comme nous avons de la peine à comprendre l’amour de Dieu devant la maladie, le deuil et la souffrance. Pour beaucoup de gens la maladie est contraire à l’amour de Dieu. Si Jésus aimait Lazare, pourquoi ne l’a- t-il pas empêché de mourir ? Et s’il ne l’a pas empêché de mourir, comment admettre qu’il l’aime.

La nouvelle de la maladie de Lazare lui parvient sur le chemin de sa fuite. Il vient d’échapper à ses ennemis en Judée et à Jérusalem où en deux fois, il a failli se faire lapider. Jésus arrive à Béthanie. Un lieu dangereux pour lui. Il risque sa vie. C’est ainsi que s’accomplit la promesse : « Ce sont nos souffrances qu’il a portées, c’est de nos douleurs qu’il s’est chargé ; le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. » Esaïe 53,4-5

Entretemps, Lazare est mort. Marthe va à la rencontre de Jésus. Dans sa souffrance, envahie par des regrets, elle lui confie : « Si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort ». Comme pour dire que Lazare aurait pu guérir, la mort aurait été repoussée si Jésus avait été là. Cette parole monte aux lèvres de toutes les familles confrontées au deuil d’un proche.

Ceux qui sont venus consoler la famille disent avec ironie : « Lui qui a ouvert les yeux de l’aveugle, ne pouvait-il pas faire aussi que cet homme ne mourût pas ? ». A ces paroles sarcastiques, Jésus ressent bien autre chose que de l’humiliation, le texte nous dit : «il frémit en son esprit », « il fut très ému », il pleura ».

Le tombeau de Lazare, ouvert devant lui, préfigure un autre sépulcre, le sien propre. Bientôt, ce sera son tour, il sera enveloppé d’un linceul et étendu derrière la pierre. D’où son trouble. Nul ne peut imaginer ce qui se passe en lui. Le chemin qui conduit au tombeau de Lazare est le chemin de sa propre mort sur la croix.

Jésus a ressuscité Lazare. Derrière le tombeau vide de Lazare apparaît celui du matin de Pâques. La résurrection de Lazare préfigure la résurrection du Jésus, avec une nuance importante. Lazare vivra quelques années puis mourra. Jésus, lui, est ressuscité pour l’éternité.

Cependant comment concevoir la résurrection de Lazare sans qu’elle n’apparaisse comme une restauration de la vie antérieure ou comme la négation de la mort ? Le récit précise la réalité de la mort sans laquelle la résurrection n’a pas de sens. La mort ainsi que la peur, les angoisses qu’elle suscite n’est pas escamotée. La mort de Lazare est bien réelle. Pas même Jésus ne peut fournir une protection contre cette issue inévitable. On ne peut pas faire l’économie de la mort.

Marthe affirme sa foi en la résurrection au dernier jour. Jésus l’apprend : « C’est moi qui suis la résurrection et la vie. Celui qui met sa foi en moi, même s’il meurt vivra. Et quiconque vit et met sa foi en moi ne mourra jamais !». 11,25-26

La résurrection n’est pas une réalité à attendre à la fin des temps comme le croit Marthe mais elle se produit au quotidien de la vie, une réalité à saisir aujourd’hui, elle est une nouvelle façon de vivre. Celui qui croit en Jésus vit, même s’il est mort, enterré comme Lazare ; même-là il reste entouré de son amour.

En communion avec Jésus, les uns avec les autres, nous faisons l’expérience de la résurrection, aujourd’hui dans la créativité, dans la solidarité dans la réinvention de nouvelles façons d’être ensemble, de vivre ensemble, d’une vie qui résiste et plus forte que la peur et mort.

« Crois-tu cela ? » Cette déclaration ne peut être démontrée, elle ne peut être accueillie que dans la foi. Jésus nous pose la même question qu’à Marthe : Crois- tu cela ? Pourrons-nous dire, « je vivrai », « Je surmonterai » cette épreuve même quand nous ne savons pas vers quoi nous allons ?

La foi en cette promesse, est-elle pour nous une force dans la crise sanitaire mondiale que nous traversons ? Nous avons besoin de croire en cette promesse, aujourd’hui, plus que jamais dans ce contexte de pandémie. Cette crise fragilise, suscite de l’angoisse et déstabilise la vie sociale, professionnelle, familiale de beaucoup de personnes. Personne n’y était préparé.

Que pouvons-nous faire ? Prier et nous encourager les uns les autres. Laissons- nous nous encourager avec les paroles du psalmiste : « Dieu est pour nous un abri et un appui, un secours bien précieux dans la détresse. C’est pourquoi nous n’avons pas peur quand la terre tremble, quand les montagnes vacillent au cœur des mers, quand leurs eaux grondent, écument et font trembler les montagnes en se soulevant. » Ps 46,1-4

Croire ! croire en celui qui a dit : « Je suis la résurrection et la vie ! ». Martin Luther en paraphrasant le Magnificat écrit : « Une chanson s’exprime ainsi : Au milieu de la vie, nous sommes cernés par la mort…Mais nous, nous disons : Au milieu de la mort, nous sommes entourés par la vie ! ». Voilà de quoi méditer sur les mots mort et vie, sens de la vie, temps. Qu’est-ce mourir ? Qu’est-ce vivre ? Qu’est-ce qui est essentiel ?

Que ce temps de carême en quarantaine nous soit bénéfique pour un renouvellement de vie dans la relation à soi, au prochain et à Dieu. Et que sa paix demeure avec nous ! Amen

 

Prière

L’apôtre Paul nous encourage à « prier sans cesse » (1 Thessaloniciens 5:17).

Nous prions,

Père, nous te prions les uns pour les autres, nos amis et notre famille, les personnes vulnérables, les services d’urgence, les personnels soignants, les scientifiques, les autorités fédérales et communales, la population suisse.

Nous te prions pour Conseil Synodal de notre église et son président, nos communautés paroissiales, les conseillers, les membres de nos communautés, les collègues.

Nous te prions pour ceux et celles qui luttent physiquement, émotionnellement et spirituellement.

Pour les employés des supermarchés, pour le travail de ceux qui font en sorte que la situation reste vivable et supportable malgré tout. Nous pensons aux jeunes solidaires des paroisses de Neuchâtel et de la Côte.

Pour ceux et celles qui sont malades, isolés, inquiets, frustrés ou confrontés à une incertitude et à des difficultés économiques effrayantes.

Nous te prions pour les personnes sans domicile fixe qui doivent adapter leur réalité de vie déjà difficile aux mesures sanitaires et sécuritaires.

Pour les personnes les plus faibles que la crise du coronavirus plonge dans une situation de détresse et de fragilité.

Pour les couples, les familles et les enfants, les enseignants.

Pour nous-mêmes, renouvelle en nous le don de la confiance, soutiens notre espérance.

Aide-nous à être porteurs, porteuses d’espérance par nos pensées, nos prières, nos paroles et nos actes d’amour et de solidarité. Nous t’en prions, au nom de Jésus, le Christ, notre vivante espérance. Amen