Président du Conseil synodal de l’EREN, Yves Bourquin revient sur la situation tendue que vit le monde actuel, en particulier au Proche-Orient, et souhaite rappeler une exigence de justice et de paix. Un billet d’opinion paru dans ArcInfo du 27 mars 2025.
Les conflits qui ravagent le monde, en particulier le drame qui se joue entre Israël et la Palestine, suscitent une profonde douleur et un sentiment d’impuissance. Comment, depuis la Suisse, réagir face à ces tragédies humaines? L’Eglise réformée évangélique du canton de Neuchâtel (EREN) veut, en ces temps troublés, rappeler une exigence fondamentale: celle de la justice et de la paix.
Notre prise de parole n’est ni une condamnation unilatérale ni une posture politique, mais un appel à la lucidité et à la responsabilité. Nous affirmons sans ambiguïté que toute vie humaine a une valeur inestimable et que la souffrance des populations civiles, qu’elles soient israéliennes ou palestiniennes, est intolérable.
Les débordements de violence dont a fait preuve le Hamas, tout comme les bombardements massifs sur Gaza et leurs conséquences dramatiques, doivent être regardés en face et condamnés. Tout acte de violence de cet ordre, passé ou futur, doit être sanctionné au niveau international.
Reconnaître à Israël son droit à l’existence et à la sécurité ne signifie pas fermer les yeux sur les souffrances infligées aux Palestiniens. De même, défendre le droit des Palestiniens à une patrie ne signifie pas cautionner les actes d’un gouvernement ou d’un groupe armé qui refuse toute cohabitation. Faire la distinction entre un peuple et ses dirigeants, entre une communauté et ses extrémistes, est essentiel pour ne pas tomber dans la simplification et l’injustice.
L’Eren refuse toute instrumentalisation des textes religieux à des fins de domination ou de justification de la violence. Notre foi ne nous appelle pas à éliminer l’autre, mais à aller à sa rencontre. Dans cet esprit, nous appelons à soutenir les initiatives de paix, qu’elles viennent d’Israéliens ou de Palestiniens.
Des personnes, souvent dans l’ombre, refusent de céder à la haine et bâtissent des ponts au lieu de creuser des fossés. Pensons à ces Israéliens qui protègent les villageois palestiniens des exactions des colons, à ces familles vivant ensemble dans le village binational de Neve Shalom/Wahat as-Salam, qui évoque dans les deux langues une oasis de paix, et à toutes ces initiatives de dialogue qui persistent malgré l’horreur.
Mais que faire, ici, en Suisse? D’abord, refuser la polarisation et les discours simplistes. Informons-nous avec rigueur, évitons les raccourcis et la désinformation. Ensuite, refusons que ces conflits nourrissent l’antagonisme au sein de notre société: la montée des actes antimusulmans et antijuifs en Europe est une alerte à ne pas ignorer. Nous avons le devoir de protéger notre vivre-ensemble. Maintenons un dialogue interreligieux sain et porteur de fruits.
Enfin, nous pouvons agir concrètement en soutenant des ONG engagées pour la paix, en répondant aux appels à l’aide humanitaires, en encourageant les prises de position courageuses de nos autorités pour un règlement juste et durable du conflit. Nous pouvons aussi nous rassembler, quelles que soient nos convictions, pour prier ou méditer ensemble en faveur de la paix.
Face à l’ampleur du drame, nos gestes peuvent paraître modestes. Mais ils témoignent de notre humanité et de notre refus de l’indifférence. L’histoire nous enseigne que la paix ne se construit pas en un jour, mais qu’elle commence toujours par des femmes et des hommes qui osent croire en un avenir différent.