https:\/\/www.eren.ch\/barc\/wp-content\/uploads\/sites\/4\/2020\/03\/200322_0020.mp3<\/a><\/audio>\nL\u2019enfer, c\u2019est les autres!<\/em> \u00e9crivait Jean-Paul Sartre. Une affirmation forte qui devient terriblement d\u2019actualit\u00e9 ces jours o\u00f9 chaque proximit\u00e9 est v\u00e9cue comme une violation de mon espace prot\u00e9g\u00e9.<\/p>\nJe n\u2019avais jamais lu Huis clos<\/i> de Sartre. Cette semaine a donc \u00e9t\u00e9 l\u2019occasion de faire quelques fouilles dans la biblioth\u00e8que pour d\u00e9couvrir cette \u0153uvre qui n\u2019a rien perdu de sa force. Jou\u00e9e pour la premi\u00e8re fois en 1944 \u00e0 Paris, au th\u00e9\u00e2tre du Vieux-Colombier (!).
\nL\u2019enfer c\u2019est les autres\u2026 et apr\u00e8s une semaine enti\u00e8re \u00e0 partager mon espace de vie 24 heures sur 24 avec mon mari et mes enfants, je r\u00e9alise que dans beaucoup de familles, l\u2019enfer \u00e7a va devenir les proches.<\/p>\nOn s\u2019\u00e9nerve plus vite et la moindre petite chose peut devenir sujet d\u2019irritation. In\u00e8s, un des personnages de Sartre d\u00e9clare: Petit \u00e0 petit. Un mot, de-ci, de-l\u00e0. Par exemple, il faisait du bruit en buvant\u00a0; il soufflait par le nez dans son verre. Des riens.<\/p><\/blockquote>\n
Des riens\u2026 mais qui peuvent d\u00e9clencher des ouragans.<\/p>\n
Le premier \u00e9lan de solidarit\u00e9 qui est apparu apr\u00e8s l\u2019annonce de l\u2019obligation de rester chez soi a \u00e9t\u00e9 dirig\u00e9 vers les personnes seules. L\u2019inqui\u00e9tude est l\u00e9gitime: comment prendre soin \u00e0 distance de celles et ceux que ces mesures pourraient isoler des relations sociales qu\u2019ils entretiennent ? La solidarit\u00e9 s\u2019est tr\u00e8s vite mise en route: cha\u00eene t\u00e9l\u00e9phonique pour prendre des nouvelles, propositions de faire des courses et rendez-vous de pri\u00e8re chacun chez soi mais en communion les uns avec les autres. Une dame me disait qu\u2019on n\u2019avait jamais pris de ses nouvelles aussi souvent que cette semaine!<\/p>\n
J\u2019ose \u00e0 peine l\u2019avouer, mais vous qui \u00eates seuls chez vous, je vous envie un peu ces jours. Je vous envie parce que vous avez l\u2019habitude, vous, de g\u00e9rer votre solitude, de tromper l\u2019ennui, d\u2019\u00e9couter vos besoins, vos envies pour calquer le rythme de vos journ\u00e9es.<\/p>\n
D\u2019autres doivent s\u2019adapter en quelques jours et le choc est rude.
\nJe mesure ma chance de vivre dans un appartement suffisamment spacieux pour que chaque membre de la famille puisse avoir des petits moments \u00e0 soi. Je mesure ma chance d\u2019avoir des enfants qui aiment la lecture, source infinie d\u2019\u00e9vasion. Et malgr\u00e9 cela, ce n\u2019est pas simple de se supporter tout le temps.
\nEt je pense aux familles qui vivent dans de petits appartements, parents et enfants ensemble dans un espace exigu. Aux jeunes parents qui ne peuvent fuir les pleurs d\u2019un b\u00e9b\u00e9, juste le temps d\u2019une heure. Aux parents qui travaillent dans les soins ou la vente, pas pr\u00e8s de diminuer leurs heures de travail, et qui du jour au lendemain se retrouvent \u00e0 devoir faire l\u2019\u00e9cole \u00e0 la maison. Aux ados qui se retrouvent avec leurs parents sur le dos sans arr\u00eat et qui ne peuvent plus voir leurs copains.<\/p>\n
Nous voici entr\u00e9s dans une r\u00e9alit\u00e9 qui se r\u00e9tr\u00e9cit sur elle-m\u00eame. Sur le cercle familial r\u00e9duit. Sans les soupapes habituelles qui permettent \u00e0 tous les membres de la famille de m\u00e9nager leur espace \u00e0 eux\u00a0: temps pour soi si pr\u00e9cieux et qui rend disponible \u00e0 la vie avec les autres.<\/p>\n
La crise est sanitaire, certes.
\nLa crise actuelle est aussi sociale et familiale.
\nIl nous faut en \u00eatre conscients et prendre soin de ces relations qui seront mises \u00e0 rude \u00e9preuve.<\/p>\n
Nous sommes actuellement dans le temps du car\u00eame, temps de pr\u00e9paration \u00e0 P\u00e2ques. Le car\u00eame dure 40 jours. Nous sommes le 22 mars et jusqu\u2019au 30 avril, date jusqu\u2019\u00e0 laquelle (au minimum) les rassemblements sont interdits, il y a exactement 40 jours. C\u2019est le car\u00eame dans le car\u00eame.
\nC\u2019est car\u00eame pour tout le monde! Chr\u00e9tiens ou non. Tous \u00e0 la m\u00eame enseigne.<\/p>\n
40. C\u2019est un nombre important dans le monde biblique. Le peuple h\u00e9breu erre 40 ans dans le d\u00e9sert, les passagers de No\u00e9 restent 40 jours dans l\u2019arche, J\u00e9sus est tent\u00e9 dans le d\u00e9sert pendant 40 jours.
\n40 c\u2019est le nombre de l\u2019\u00e9preuve. Le temps du d\u00e9sert. Le temps de la solitude, de l\u2019inqui\u00e9tude, de l\u2019incertitude. C\u2019est aussi le temps de la rencontre avec Dieu, le temps de la rencontre avec soi.
\nUn temps qui pr\u00e9c\u00e8de une vie renouvel\u00e9e.<\/p>\n
Dans ce temps de car\u00eame, je vous propose de lire ensemble la r\u00e9cit des tentations de J\u00e9sus, tel qu\u2019il est rapport\u00e9 dans l\u2019\u00e9vangile selon Luc.
\n(Luc 4,1-13 traduction Nouvelle Bible Second)<\/p>\n
J\u00e9sus, rempli du Saint-Esprit, revint du Jourdain. Il fut conduit par l\u2019Esprit dans le d\u00e9sert o\u00f9 il fut tent\u00e9 par le diable pendant 40 jours. Il ne mangea rien durant ces jours-l\u00e0 et, quand cette p\u00e9riode fut pass\u00e9e, il eut faim.<\/p>\n
Le diable lui dit\u00a0: \u00ab\u00a0Si tu es le Fils de Dieu, ordonne \u00e0 ces pierres de devenir du pain.\u00a0\u00bb
\nJ\u00e9sus lui r\u00e9pondit\u00a0: \u00ab\u00a0Il est \u00e9crit\u00a0: L\u2019homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole de Dieu\u00a0!\u00a0<\/i>\u00bb<\/p>\n
Le diable l\u2019emmena plus haut, sur une haute montagne, et lui montra en un instant tous les royaumes de la terre. Puis il lui dit\u00a0: \u00ab\u00a0Je te donnerai toute cette puissance et la gloire de ces royaumes, car elle m\u2019a \u00e9t\u00e9 donn\u00e9e et je la donne \u00e0 qui je veux. Si donc tu te prosternes devant moi, elle sera toute \u00e0 toi.\u00a0\u00bb
\nJ\u00e9sus lui r\u00e9pondit\u00a0: \u00ab\u00a0Retire-toi satan\u00a0! En effet, il est \u00e9crit\u00a0: C\u2019est le Seigneur, ton Dieu, que tu adoreras et c\u2019est lui seul que tu serviras.\u00a0<\/i>\u00bb<\/p>\n
Le diable le conduisit encore \u00e0 J\u00e9rusalem, le pla\u00e7a au sommet du temple, et lui dit\u00a0: \u00ab\u00a0Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi d\u2019ici en bas, car il est \u00e9crit\u00a0: Il donnera, \u00e0 ton sujet, ordre \u00e0 ses anges de te garder. <\/i>Et\u00a0: Ils te porteront sur les mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre.\u00a0<\/i>\u00bb
\nJ\u00e9sus lui r\u00e9pondit\u00a0: \u00ab\u00a0Il est dit\u00a0: Tu ne provoqueras pas le Seigneur, ton Dieu.\u00a0<\/i>\u00bb<\/p>\n
Apr\u00e8s l\u2019avoir tent\u00e9 de toutes ces mani\u00e8res, le diable s\u2019\u00e9loigna de lui jusqu\u2019\u00e0 un moment favorable.<\/p><\/blockquote>\n
J\u00e9sus est conduit dans le d\u00e9sert pour un temps d\u2019\u00e9preuve.
\nUn r\u00e9cit \u00e9trange, qui nous emm\u00e8ne dans un univers presque fantastique<\/i>. Un r\u00e9cit initiatique. L\u2019adversaire qu\u2019il rencontre est personnifi\u00e9. On l\u2019appelle le diable, le diviseur, le destructeur. Il s\u2019insinue dans ses pens\u00e9es, s\u2019engouffre dans ses fragilit\u00e9s.<\/p>\n
3 tentations.
\nLa premi\u00e8re, celle toute humaine de la nourriture. Tentation d\u2019assouvir sa faim. Le manque fait peur. D\u2019autant plus peut-\u00eatre dans notre soci\u00e9t\u00e9 d\u2019abondance. Les rayons d\u00e9valis\u00e9s de nos magasins disent quelque chose de cette peur.
\n\u00c0 cette tentation, J\u00e9sus oppose la conviction que l\u2019\u00eatre humain ne se r\u00e9duit pas \u00e0 un estomac, mais que sa faim est aussi spirituelle. Nos besoins sont bien plus nombreux que les seuls besoins premiers. Nos vies ont faim de sens.<\/p>\n
Deuxi\u00e8me tentation, celle du pouvoir.
\nLe diable pr\u00e9tend poss\u00e9der le pouvoir sur le monde. Il le c\u00e9dera si J\u00e9sus se prosterne devant lui. C\u2019est bel et bien la vocation du Christ d\u2019\u00e9tendre sa puissance sur le monde entier, mais pas de cette mani\u00e8re l\u00e0. Jamais il ne s\u2019impose \u00e0 l\u2019\u00eatre humain. Toujours il lui laisse la libert\u00e9 de placer sa vie entre ses mains.
\nLe diviseur n\u2019a rien compris au r\u00e8gne de Dieu qui se r\u00e9v\u00e8le non pas dans la gloire et la grandeur, mais dans la faiblesse de la croix.<\/p>\n
Troisi\u00e8me tentation, celle du pouvoir religieux.
\nEt le diable se fait de plus en plus malin. Pour appuyer ses dires, il cite les \u00c9critures. M\u00eame des paroles de vie peuvent devenir mortif\u00e8res lorsqu\u2019elles sont instrumentalis\u00e9es. Il convient de discerner entre les paroles qui portent la vie et celles qui cultivent la peur, la haine, le mal.<\/p>\n
Les 40 jours s\u2019ach\u00e8vent. Le diviseur a \u00e9t\u00e9 repouss\u00e9\u2026 mais il reviendra s\u2019insinuer quand les temps seront favorables.
\nJ\u00e9sus emport\u00e9 au d\u00e9sert, sur une montagne et au sommet d\u2019un temple. 3 lieux pour 3 tentations. 3 lieux parlants pour un.e lecteur.trice des r\u00e9cits bibliques: des lieux privil\u00e9gi\u00e9s par Dieu pour se faire conna\u00eetre.<\/p>\n
Pour les 40 jours \u00e0 venir (au moins), notre d\u00e9sert, notre montagne, notre temple, ce sera notre salon, notre cuisine, notre chambre \u00e0 coucher.
\nNos appartements seront des lieux d\u2019\u00e9preuve, des lieux aussi \u2013 esp\u00e9rons-le \u2013 de rencontre avec Dieu et avec soi, pourquoi pas autour de ces trois questions:<\/p>\n
\n- De quoi avons-nous r\u00e9ellement faim?<\/li>\n
- Comment d\u00e9couvrir la puissance de Dieu dans la faiblesse?<\/li>\n
- Quelles sont les paroles qui portent la Vie?<\/li>\n<\/ul>\n
La solitude sera l\u2019\u00e9preuve de certains.es.
\nLa promiscuit\u00e9 celle des autres.
\nL\u2019enfer c\u2019est les autres, \u00e9crivait Sartre. Non pas parce qu\u2019ils sont insupportables. D\u2019autant moins que les autres sont ceux que nous aimons. Mais parce qu\u2019ils nous font prendre conscience de nous-m\u00eames. Qu\u2019ils mettent en exergue nos fragilit\u00e9s. Qu\u2019ils nous tendent un miroir sur nous-m\u00eames.<\/p>\n
Prenons courage et force et serrons-nous les coudes. Notre esp\u00e9rance est qu\u2019au terme du temps d\u2019\u00e9preuve la vie se trouve renouvel\u00e9e. Nous d\u00e9jouerons les tours du diviseurs, nous proclamerons avec le Christ que la puissance se r\u00e9v\u00e8le dans la faiblesse, et avec l\u2019aide de Dieu, nous nous rel\u00e8verons.<\/p>\n
De Huis clos<\/em>, il est rest\u00e9 cette phrase mythique L\u2019enfer c\u2019est les autres<\/em>. Il vaudrait la peine aujourd\u2019hui de m\u00e9diter aussi celle-ci\u00a0:<\/p>\nAucun de nous ne peut se sauver seul ; il faut que nous nous perdions ensemble ou que nous nous tirions d\u2019affaire ensemble. Choisissez !<\/p><\/blockquote>\n
Amen<\/p>\n
Pri\u00e8re<\/h2>\n
Le pasteur Christian Vez<\/a> a r\u00e9\u00e9crit les psaumes avec ses mots: Les Psaumes tels que je les prie<\/a>. Un travail magnifique et inspirant dont je vous recommande vivement la lecture personnelle ou communautaire.<\/p>\nJe partage ici avec vous son<\/em> psaume 91 \u00c0 l’abri dans la cachette du Tr\u00e8s-Bas <\/em>qui prend une toute autre dimension lorsqu’il se trouve dans une autre bouche que celle du diviseur.<\/p>\nBien \u00e0 l\u2019abri dans la cachette du Tr\u00e8s-Bas, prot\u00e9g\u00e9 par son ombre plus grande que les montagnes, je murmure \u00e0 son oreille:
\nTu es mon camp retranch\u00e9, l\u2019endroit o\u00f9 je me sens totalement en s\u00e9curit\u00e9.<\/em>
\nCar c\u2019est vrai: je peux compter sur lui en toute confiance.<\/p>\nComment pourrais-je te d\u00e9crire qui est mon Dieu?
\nJe te dirais simplement que c\u2019est lui qui te tires d\u2019affaire quand tu es mal pris et qu\u2019il te pr\u00e9serve de tout ce qui cherche \u00e0 te d\u00e9molir. Il t\u2019abrite sous son aile et t\u2019y garde bien au chaud. Avec force, avec constance, il te prot\u00e8ge tout en d\u00e9licatesse.<\/p>\n
Tu n\u2019as plus \u00e0 redouter les cauchemars la nuit, ni de devenir la cible de snipers en plein jour.
\nTu n\u2019as plus \u00e0 craindre les rumeurs sournoises ni les diffamations tapageuses. Si tout devait s\u2019\u00e9crouler autour de toi, et que plus personne ne se trouve en mesure de faire face \u00e0 la situation, toi, tu resterais sain et sauf.<\/p>\n
Regarde un peu et vois ce qu\u2019il advient des gens sans foi ni loi! C\u2019est une catastrophe. Heureusement que tu es l\u00e0, mon Dieu, car tu es ma v\u00e9ritable assurance vie. Comment cela se peut-il?
\nEh bien si tu fais de Dieu Tr\u00e8s-Bas ta chambre haute, si tu te sens en lui comme \u00e0 la maison, alors aucun mal ne saurait t\u2019an\u00e9antir. Car Dieu chargeras ses messagers de te garder o\u00f9 que tu ailles. Ils te porteront \u00e0 bout de bras pour que tu ne te blesses pas. Gr\u00e2ce \u00e0 eux, tu pi\u00e9tineras all\u00e8grement les langues de vip\u00e8re, tu cloueras le bec des forts en gueule, tu terrasseras ceux qui cherchent \u00e0 te terroriser.<\/p>\n
Car c\u2019est Dieu lui-m\u00eame qui te le dit:
\nJ\u2019agis en faveur de celui qui s\u2019est \u00e9pris de moi.<\/em>
\nJe lui donne acc\u00e8s au meilleur de lui-m\u00eame,<\/em>
\ncelui qui cherche \u00e0 me conna\u00eetre en profondeur.<\/em>
\nJe r\u00e9ponds \u00e0 ses appels. Plus encore, je le fortifie lorsqu\u2019il n\u2019en peut plus. <\/em>
\nJe le mets en s\u00e9curit\u00e9, car je lui accorde beaucoup d\u2019importance. <\/em>
\nJour apr\u00e8s jour, je lui donnerai ce dont il a besoin pour vivre en lui faisant d\u00e9couvrir comment je prends soin de lui.<\/em><\/p>\nAmen<\/p>\n
Musique<\/h2>\n
Et pour clore ce temps de culte, je vous propose l’\u00e9coute du choral O heiliger Geist, o heiliger Gott<\/em> compos\u00e9 par Ga\u00ebl Liardon et interpr\u00e9t\u00e9 par Benjamin Righetti.<\/p>\n