Culte sous le soleil

Je suis tombée l’autre jour sur une émission de France Culture intitulée van Gogh ébloui et j’ai accroché sur la présentation qui citait ces mots que le peintre écrivait à son frère Théo: «Ah, ceux qui ne croient pas au soleil d’ici sont bien impies». Il évoquait la lumière dorée de la Provence. La présentation de l’émission se poursuivait ainsi: Retour sur l’importance de cet omniprésent et presque divin soleil dans l’œuvre du maître néerlandais en compagnie du professeur Jan Blanc.

Je dois l’avouer, Vincent van Gogh n’est pas un de mes peintres préférés et la visite il y a 5 ans de cela au Musée van Gogh à Amsterdam n’a pas contribué à me le faire plus apprécier. Je garde de ce moment un souvenir détestable: un musée bondé, l’obligation d’entrer dans le flux de touristes pour passer devant les toiles sans possibilité de s’arrêter devant l’une ou de passer tout droit devant une autre. Si nous ne nous insérions pas dans le rythme imprimé par la masse de la première à la dernière salle, nous étions bousculés et regardés de coin. Mais le pire c’est que personne n’observait, personne ne paraissait prendre plaisir à découvrir ces tableaux. Personne dans ce musée ne semblait un tant soit peu sensible à une quelconque dimension artistique. Seule comptait la coche sur le programme de voyage: Musée van Gogh ✔️
Seuls deux endroits du musée rompaient le rythme: l’endroit où sont exposés les fameux tournesols, mais la pause était plus due au fait que le tableau trônait en milieu de salle, protégé par une cage de verre, que par l’intérêt des touristes à admirer la peinture. Le second était un immense panneau mural sur lequel étaient reproduits les tournesols et devant lequel les touristes faisaient des selfies. Musée van Gogh: j’y étais 😉

Bref: je n’ai pas a priori une grande attirance pour le peintre néerlandais. Mais la présentation de l’émission radio m’a intriguée et je n’ai pas été déçue. Je l’ai trouvée passionnante. J’ai choisi d’en tirer quelques réflexions pour le culte à la maison que je vous propose aujourd’hui. Je vous conseille l’écoute de cette émission radio en complément. Elle peut être écoutée avant ou après.

Entrons maintenant dans ce temps de célébration par la prière d’un psaume.

Psaume 19

Le ciel proclame la gloire de Dieu, la voûte étoilée révèle ce qu’il a fait. Chaque jour en parle au jour suivant, et chaque nuit l’annonce à celle qui la suit.
Ce n’est pas un discours, ce ne sont pas des mots, l’oreille n’entend aucun son. Mais leur message parcourt la terre entière, leur langage est perçu jusqu’au bout du monde .

Dieu a dressé dans le ciel une tente pour le soleil. Le matin, celui-ci paraît,
tel un jeune marié qui sort de sa chambre, s’élance dans sa course avec la joie d’un héros. Il sort à une extrémité du ciel, son tour le mène à l’autre extrémité, rien n’échappe à ses rayons.

La loi du Seigneur est parfaite, elle rend la force de vivre.
Les ordres du Seigneur méritent confiance, ils aident les simples à savoir se conduire.
Les exigences du Seigneur sont justes, elles remplissent le cœur de joie.
Les commandements du Seigneur sont limpides, ils aident à y voir clair.
Le respect qu’inspire le Seigneur est pur, il persiste à travers les siècles.
Les décisions du Seigneur sont fondées, toutes, sans exception, sont justifiées, plus attirantes que l’or, qu’une quantité de métal précieux,
et plus agréables que le miel, que le miel le plus doux.
Seigneur, moi qui suis ton serviteur, j’y trouve un avertissement ; on a tout avantage à suivre tes avis.
Tout le monde fait des erreurs sans le savoir : pardonne-moi les fautes qui m’ont échappé.
Préserve-moi encore des insolents, fais qu’ils n’aient aucune prise sur moi. Alors je serai sans reproche, et préservé d’une faute grave.

Ce que j’ai dit et médité devant toi, j’espère que cela te sera agréable,
Seigneur, mon Rocher, mon Défenseur.

Ô Sole mio!

En ces journées printanières, j’admire l’œuvre du soleil. Ses rayons qui caressent les feuillages encore humides des pluies nourricières. Sa chaleur qui rend l’atmosphère douce et agréable: elle n’a rien encore de celle, étouffante, du plein été. Et sa lumière qui peu à peu allonge nos journées.

Rien d’étonnant que les civilisations anciennes aient rendu un culte à l’astre du jour. Sans lui, pas de vie possible sur Terre. Le récit de la Création nous invite à la louange d’un Dieu plus grand encore que le Soleil (Genèse 1,16). Le Créateur a lui-même suspendu l’astre du jour dans la voûte du ciel, offrant ainsi un espace possible pour que la vie se développe. Nous confessons un Dieu qui nous façonne pour nous un monde dans lequel nous pouvons vivre. Gloire lui soit rendue!

En quête du soleil

Le peintre van Gogh n’a d’expérience du soleil que ce qu’il en voit dans ses contrées néerlandaises puis dans la grisaille parisienne. Mais cela n’a rien à voir avec ce qu’il découvre du soleil du Sud, de l’Afrique et du Japon par le biais de la littérature, de ses correspondances ou d’œuvres d’autres peintres. Il rêve de ce soleil, de cette lumière, des ces couleurs.
Il y a le soleil qu’il connaît et celui qu’il imagine. Celui qu’il observe et celui dont il a lu le témoignage. Et c’est cette envie de faire coïncider sa représentation rêvée avec une expérience concrète qui pousse van Gogh à aller s’installer dans le Sud de la France.

En écoutant cela, je ne peux m’empêcher de faire le lien avec la foi chrétienne. Toujours nourrie à la fois de notre expérience propre et du témoignage d’hommes et de femmes qui vivent de leur foi. Ainsi les disciples de Jésus, enfermés dans leur tristesse après la mise à mort de leur maître, sont interpelés pas les femmes (Luc 24,9). Avant même d’être témoins par eux-mêmes de la résurrection du Christ, ils reçoivent le témoignage de celles qui sont déjà dans la foi.

C’est la foi qui a mené van Gogh dans le Sud. La foi que le soleil là-bas est différent. Qu’une autre réalité existe. Que ce qu’il connaît du soleil n’est pas le Soleil dans tout sa vérité. Voici la foi qui met en route, comme elle a mis Abraham en route: « Va, quitte ton pays et va dans le pays que je te montrerai. » (Genèse 12,1). La foi qui révèle que notre connaissance n’est pas complète et qui vit de l’espérance qu’elle le sera un jour. « À présent, ce que nous voyons est semblable à une image obscure reflétée par un miroir; mais alors, nous verrons face à face. À présent, je ne connais qu’incomplètement; mais alors, je connaîtrai complètement, comme Dieu me connaît. » écrivait Paul (1 Corinthiens 13,12).

Astre inaccessible

Peut-on représenter le soleil? C’est une question qui doit occuper tous les artistes peintres. Pour parvenir à le représenter encore faudrait-il pouvoir l’observer, le regarder droit dans les yeux. C’est possible à l’aube ou au soleil couchant, quand il n’est plus qu’une part de lui-même. Mais lorsqu’il est pleinement soleil, on ne peut le regarder sous peine de se brûler la rétine. Il n’est possible de le regarder que de manière indirecte.

Contempler pleinement la gloire de Dieu était le désir de Moïse, comme il est probablement le désir de beaucoup d’entre nous. Mais de même que nos yeux ne sauraient supporter de regarder le soleil en face, de même on ne peut contempler de face la gloire de Dieu (Exode 33,20).

Que percevons-nous donc du soleil si nous ne pouvons le regarder? Que percevons-nous de Dieu si nous pouvons le contempler? – Sa lumière! La lumière qui n’est pas elle-même visible mais qui révèle le monde. Elle met en lumière les beautés et les aspérités. Elle donne du relief et met à nu ce qui se perdait dans l’obscurité.

Face à la recherche incessante de van Gogh à représenter le soleil dans toute sa gloire, dans sa persévérance à tendre vers toujours plus de vérité dans la couleur et la matière, je ne peux m’empêcher de faire raisonner l’évangile de Jean qui, tout entier, cherche à parler du Christ à travers la relation entre lumière et obscurité. Le Christ qui se définit lui-même comme la lumière du monde (Jean 8,12).

Devenir lumière

Le rapport du peintre néerlandais avec le soleil était fait à la fois d’admiration, d’aspiration à en saisir l’essence mais aussi d’envie de devenir lui-même ce soleil qui rayonne et marque le monde de son empreinte.

Une quête formidablement religieuse que vit chaque croyant.e qui est toujours en recherche de mieux connaître Dieu. Conscient que cette connaissance sera toujours incomplète mais qui s’enrichit petit à petit de nouvelles facettes. Que ce soit par le biais de la lecture de la Bible, de la confrontation d’idées, du témoignage reçu ou de l’expérience personnelle voire mystique, le croyant grandit dans la foi à la recherche de la lumière.

Dans le même temps, nous répondons à  l’appel à devenir à notre tour lumière dans le monde, rayonnant de l’Évangile. « C’est ainsi que votre lumière doit briller devant les hommes, afin qu’ils voient le bien que vous faites et qu’ils louent votre Père qui est dans les cieux » (Matthieu 5,16).

Envoi

Je suis la lumière du monde, dit Jésus.
Celui qui me suit aura la lumière de la vie et ne marchera jamais dans l’obscurité (Jean 8,12).

Que Dieu vous bénisse et qu’il vous garde!

Que sa lumière brille sur votre réalité.
Et qu’elle éclaire tous les contours de votre vie.
Amen


Si le cœur vous en dit…

Pourquoi ne pas aller faire un petit tour sur le site du Museum van Gogh qui propose, par exemple une série de vidéos qui permettent de faire une visite virtuelle.

Ou écouter l’émission de France Culture Van Gogh ébloui qui faisait partie d’une série de 4 épisodes sur le thème du Soleil.

Ou réécouter Nina Simone chanter Here comes the Sun, que les Beatles ont reprise quelques années plus tard.

Bon dimanche à vous et belle fête à toutes les mamans!